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Le monde se
compose de deux hémisphères, le Nord et le Sud. Ils sont séparés par une ligne
innominée passant par la mer Méditerranée.
Le point de départ entre ces deux blocs n'est pas identique. A ce moment, il est cintré par une mentalité distincte de part et d'autre, liée au climat, à la terre, à la faune, à la flore... Ce qui va engager un mode de comportement social différent à l'origine d'un genre de vie économique dissemblable et donc de tout ce qui va en découler. Plusieurs étapes ont prévalu pour faire de l'Europe ce qu'elle est, et de l'Orient ce qu'il est maintenant. Rome va décider à tort de tracer une frontière entre le Nord et le Sud en créant le limes, frontière consolidée par de puissantes citadelles physiques et psychiques, tendant à séparer la race supérieure, celle des gens du Nord ; de la race inférieure, celle du Sud. La cité éternelle s'est autoproclamée race supérieure et a décrété que l'hémisphère sud n'a plus le droit à l'existence. Elle s'est convaincue de la supériorité de sa race, de sa civilisation en laminant les nations d'en face barbares, primitives, arriérées, grands enfants... Imbu de cette conviction, l'Occident sans scrupule va se permettre d'envahir le Sud. Cette aventure a débuté il y a plus de vingt cinq siècles et continue à ce jour. Les Romains ont occupé la rive sud de la mer Méditerranée jusqu'aux confins les plus reculés. Ils ont créé l'Empire romain, «la mare nostrum», pour s'implanter et imposer leur civilisation. Cette occupation va durer environ 400 ans. Les Vandales en mai 429 débarquent à leur tour sur la rive «basse» pour déloger leurs prédécesseurs et tirer profit des pays à leur tour. Ils en sortent en 533. Les Byzantins tentent de récupérer leur empire des mains des Vandales. Ce sont les autochtones qui paieront la facture. Les guerres de Croisades constituent aussi un déni à cette race du Sud qui prétend construire une nation modèle. La colonisation est pratiquée tout azimut. Presque tous les pays d'Europe se sont lancés dans la conquête du sud, pour se partager ses ressources naturelles. Même si la colonisation politique n'existe plus, la domination économique, dont les effets ne sont pas plus différents, fait des ravages. Elle a fait main basse sur les matières premières : pétrole, cuivre, or, diamant, uranium, bauxite, fer et sur les produits agricoles. Les Phéniciens du même bord n'ont pas envahi la rive sud de la Méditerranée, ils ont établi un comptoir commercial à Carthage et développé un commerce sur le littoral nord-africain, sans prétendre coloniser et mettre à genoux les autres peuples. Les Arabes, à partir du VIIème siècle, ont entrepris à partir de la péninsule d'Arabie de répandre la religion islamique à travers le monde de manière pacifique. Ils se sont étendus à l'ouest et à l'est. Vers l'ouest, sous la houlette de Sidna Okba Bnou Nafaa, le Maghreb est atteint en 670. En 681, il arrive jusqu'aux rivages de l'Atlantique. La nouvelle religion, très vite adoptée par les gens du peuple, s'est heurtée aux intérêts du clergé chrétien et des autorités qui ont opposé une résistance qui a duré selon les pays une dizaine d' années. Les autochtones islamisés vont être le fer de lance de la religion musulmane. Dans le même contexte, on ne peut parler de colonisation par les Maghrébins de la péninsule ibérique, mais d'Islamisation. Leur présence, leurs relations avec les autochtones étaient similaires à celles observées au niveau des autres pays islamisés. L'expulsion des musulmans de l'Andalousie par la Reconquista s'est faite au nom de la chrétienté et pas au nom de la décolonisation. C'est une religion qui a mis une autre dehors. L'Europe étant considérée comme étant la terre exclusive de la religion du Christ. Les gens du Sud sont caractérisés par un certain nombre de particularités ataviques mentales et psychologiques. Les traits psychiques originels vont créer un système propre de valeurs à la base d'institutions qui reflèteront leurs natures comportementales. Les gens du Sud, sont plutôt des penseurs, des poètes, imaginatifs, pacifiques «ma allamou el harb illa ennaçara» disaient les Andalous, se contentent du peu, plus portés à la métaphysique. La passivité, l'indifférence, absence de non compétitivité correspondent à une certaine conception des rapports entre l'homme et le monde et des hommes entre eux. Ils sont plus près du conformisme que de la compétition, ce qui explique l'attachement aux valeurs traditionnelles, leur fidélité à une société établie, ce qui raffermit en permanence la rigidité des structures sociales. Il s'agit de conservateurs, réfractaires à tout changement. Il ont établi des sociétés où domine le principe de tradition. Les institutions sont comprises comme stables et comme ne devant pas dévier d'un modèle hérité des ancêtres. Les règles sociales sont semblablement héritées et toute la vie est tournée vers le passé qu'il s'agit de reproduire, de conserver. Ce figisme est à l'origine d'un substrat social augurant le sous-développement tel que compris par les Européens. Ces sociétés traditionnelles possédaient un véritable équilibre. En vertu des conditions même de cet équilibre, elles demeurèrent étrangères à l'appétit du développement avec tout ce qui l'accompagne. Ces sociétés suivaient donc une autre voie ; elles avaient fait un autre choix, elles étaient engagées dans une autre structure, cohérente, suffisante et la poursuivaient sans aucune autre idée d'aller à droite ou à gauche. Même s'il y a eu des découvertes physiques et mécaniques, elles se sont heurtées au rejet de la société. Nous avons pour exemple les nombreuses découvertes entreprises lors du règne du khalifat de Haroun Ar- Rachid ; celles d'El-Faham pour ne citer que ce savant pendant la dynastie des Zianides et celles réalisées par les Andalous... Le citoyen a le sentiment de ne trouver sa garantie, sa sécurité et même sa liberté que dans un ordre stabilisé en conformité avec sa simplicité. La notion du temps est secondaire, ce qui explique sa lenteur, à l'antipode de la perception européenne qui considère que le temps c'est de l'argent. Pour bien se caler dans son ordre établi, pour se prémunir, il va être le réceptacle de théories coconnières. C'est un monde où vont apparaître les religions, les philosophies, les doctrines. Du sud, de l'Inde partiront les religions, le judaïsme, le christianisme, l'islam, le bouddhisme, le taoïsme... Elles se sont répandues à travers le monde pour diffuser le monothéisme, mais aussi des valeurs éternelles de vie, reconnaître le bien du mal, s'intéresser plus au spirituel qu'au matériel. Nous avons été des conquérants de la foi, pas des richesses du sol ou du sous-sol. Nous avons transmis une vie d'amour. Les soi-disant incapacités congénitales du Tiers-monde ont fait l'objet de plusieurs recherches d'intérêt scientifique. A ce sujet, plusieurs tests ont été entrepris à tort pour mettre en évidence la différence entre les deux peuples. Il s'agissait de prouver scientifiquement les dissemblances entre les membres d'une race dominante et les membres d'une race dominée. Les membres des pays sous-développés sur lesquels ces tests ont été pratiqués ont eu de mauvaises notes pour avoir donné de mauvaises réponses. Les résultats ont abouti au constat que les enfants d'une race de couleur réagissent moins bien à ces tests que les enfants européens, d'autres tests d'aptitude, de quotients d'intelligence ont été pratiqués pour aboutir au même constat de déficience intellectuelle... On en a conclu que les populations des pays développés étaient de race blanche et les pays de couleur se trouvaient dans les pays sous-développés. Ce qui a fait valider un constat : il y aurait corrélation entre développement et race blanche, entre sous-développement et race de couleur. Donner trop d'importance à ces comparaisons pour conclure aux inaptitudes manifestées, c'est méconnaître beaucoup de choses, si ce n'est exprimer du mépris aveugle : - Les tests employés ont été conçus par des Européens en fonction de leur propre milieu et de leur propre culture; - les tests sont d'emblée déroutés par ces questionnements; - l'influence des facteurs sociaux fussent-ils au sein même d'une même race influe énormément. Si l'on compare les enfants d'une couche sociale bien placée et ceux de couches sociales mal placées, analphabètes, pauvres... la différence ne tient pas au facteur racial. Elle dépend très probablement d'un degré plus ou moins poussé d'acculturation; - l'absence d'adaptation des divers groupes à la culture européenne d'où étaient issus ses tests. On est donc en droit de contester la validité des comparaisons effectuées et en effet elles le sont. Par contre, les enfants européanisés sont parfaitement à l'aise au cours de ces tests et ont eu de bonnes notes, peut-être meilleures que celles des jeunes Blancs. Il suffit d'une transplantation ou d'une migration pour que des populations qui semblent passives, inaptes au développement, deviennent subitement plus actives et dynamiques en dehors de leur milieu originaire. Tant que les Levantins évoluent dans leur milieu naturel et entretiennent des attaches avec leurs familles, leurs tribus, leurs relations et les autorités de leur patelin, ils ne pourront changer. Ils demeurent donc sous l'emprise des traditions et du poids des institutions, donc à l'écart du développement. Mais, rien ne permet d'exclure qu'ils n'aient pas la plasticité intellectuelle qui va leur permettre de s'adapter aux transformations qui les conduiront à ce qu'on appelle le développement. Il a été prouvé, par des tests subis à des mammifères de laboratoires, un accroissement frappant de la masse de l'épaisseur du cortex cérébral, dans un milieu varié, vivant, enrichi. Tandis que l'épaisseur du cortex cérébral reste la même dans un environnement ennuyeux, répétitif, appauvri. Il est impératif de souligner l'importance d'un environnement favorable. Les intellectuels sincères, les vrais humanistes, les spécialistes de l'anthropologie comme de l'ethnologie font tous remarquer au contraire la surprenante homogénéité constitutionnelle de ce qu'on peut appeler la race humaine. Ces nombreuses conquêtes, répétées, inhumaines ont rendu les pays-victimes faibles, fragiles, exsangues... Les conquérants ont dilapidé les richesses, ont pillé, envoyé des butins à leur gouvernants, ont tué, ont violé, ont volé et ont adressé des trésors à leurs parents, ils ont transformé les seigneurs en esclaves et ont hissé les laissés-pour-compte à des hautes fonctions et leur ont donné des privilèges... Pour eux, ce n'était pas plus qu'un business, une affaire commerciale, une source de profits. S'enrichir au détriment des autres. Peu importe les torts, les préjudices les souffrances, les milliers de peines... Ces envahissements ont déséquilibré et bousculé par vagues successives l'organisation économique traditionnelle, incapable de résister à tant de chocs. Cet équilibre antérieur n'existe plus aujourd'hui. Les sociétés traditionnelles, transformées apparaissent alors arriérées par tous ces torts causés. Les pays du Sud n'ont pas eu le temps d'évoluer, selon leur propre mental. Nous avions notre façon de vivre, les Occidentaux avaient la leur, pourquoi cette volonté à vouloir uniformiser les ressemblances ? Les gens du Nord sont plus rationnels, épris de l'exactitude ce qui explique leur penchant à la mécanique à la technologie... Le développement des pays de race blanche est donc expliqué par les qualités intrinsèques de ces populations industrieuses, habiles, énergiques, entreprenantes. Plus dynamiques, ils cultivent le goût du risque, de l'effort, plus disposés à la compétition des individus et des groupes, ils hébergent une certaine volonté de puissance, un appétit de liberté. En dehors de ces attributs, les Occidentaux considèrent les autres propriétés comme carences. Cela ressemble étrangement à la division du cerveau humain. Celui-ci se compose de deux hémisphères, le gauche et le droit, et deux modes de pensée différentes, le verbal et le non verbal, représentés respectivement par l'hémisphère gauche et l'hémisphère droit. Le cerveau gauche est le siège du rationnel, du réel, de la dextérité, de la vélocité, du langage, du calcul, de la logique, de l'analytique, avec une tendance à résoudre le problème pas à pas, en préférant parler, lire, écrire les mots et penser les nombres et les faits présentés en une séquence logique, préfère l'enseignement professionnel, étudier la mécanique ou la législation. Les scientifiques, depuis le XIXème siècle, ont toujours considéré que la partie gauche est ce qui caractérise la partie essentielle de l'être humain. Tout ce qu'on attend d'un brillant cerveau. Le cerveau droit est le siège de la psychologie, de l'art, de la musique, de l'imaginaire, de la métaphysique, de la poésie, de l'instinct, de l'émotion, de la perception de l'espace et de la géométrie, donc de la cartographie mentale et de l'aptitude à manipuler les formes. Très différente, la stratégie d'un cerveau droit sera de chercher à comprendre, de rechercher des images, des concepts, des modèles, des sons et des mouvements, il préfère l'enseignement général. Le cerveau droit est important, mais a toujours été considéré comme quelque chose d'inférieur. Cette opposition factice entre les deux cerveaux ressemble bien à notre constat géographique. La partie droite a retrouvé ses lettres de noblesse, elle n'est plus considérée comme inférieure mais comme différente. Des récentes études ont rehaussé le cerveau droit. Il est devenu la nouvelle star : c'est lui qui nous rend réel, humain. Le cerveau droit ne peut pas être le cerveau gauche et celui-ci ne peut pas être le droit. Et si celui-ci se prenait la tête et envahirait son vis-à-vis. Qu'adviendrait-il de l'homme ? Ce qui ressort de la recherche sur les deux hémisphères est que le cerveau est fait pour traiter différemment mais de façon complémentaire à l'information. On ne peut pas dire que l'un des cerveaux soit supérieur à l'autre. L'un et l'autre sont nécessaires pour penser efficacement, étant donné l'importance de ces deux modes de pensée. Ce n'est plus de plaisir ou de science dont nous avons besoin, les deux sont inséparables pour arriver à un développement harmonieux de l'esprit et du corps. Je pense qu' à l'exemple du cerveau qui est le siège des différences comportementales d'ordre congénitales, il faut accepter la dichotomie du globe terrestre en deux hémisphères complémentaires. Actuellement, les «sudistes» sont en déphasage, parce que le monde occidental a bénéficié de leurs richesses, ce qui leur a porté un coup mortel, décisif. Il ne sera jamais possible aux gens de l'austral d'atteindre le sommet où les auraient conduit leurs qualifications mentales à cause de ces injonctions sauvages, multiséculaire qui ont permis par contre à l'envahisseur de culminer au dépend de l'autre. Il y a eu transvasement de richesses au profit de l'un nécessairement au détriment de l'autre à l'origine du retard, sujet de tous les reproches. Quelle belle épopée aurait été vécue, d'autres dimensions révélées sans ces interventions nihilistes. Il y a une manière de vivre chez les sudistes, les gens du nord ont la leur, pourquoi exiger la ressemblance. Il faut accepter que mentalement, il y a des différences et que personne ne pourra ressembler à l'autre ! Il n'y aura pas plus de changement que celui figé au niveau du cerveau. Au lieu de vouloir coûte que coûte nous rendre européen, laissez-nous des gens de l'hémisphère sud. Et pour tout le mal que vous nous avez fait, aidez-nous à revivre une vie décente, à rompre le cadenas de l'immobilisme. Une société dynamique, évolutive, dans laquelle nous pourrons améliorer nos capacités mentales originelles et construire un monde meilleur et dans lequel cohabiteraient le Nord avec ses spécificités et le Sud avec les siens, en complémentarité. A la veille de l'Indépendance de l'Algérie, De Gaule a répondu au bachagha Boualem à qui il se plaignait : «mon général vous nous abandonnez». Ce à quoi a répondu le chef de l'Etat français «eh bien ! mon cher bachagha, ils ne nous aiment pas et ils ne nous ressemblent pas». le verdict est sans appel. «ils ne nous aiment pas» est l'expression du rejet colonial, «ils ne nous ressemblent pas » confirme la loi de la nature ! Malgré la présence de plusieurs siècles les autochtones se sont toujours affranchi de l'occupation. Il y a toujours eu un rejet de l'Occidental par l'Oriental. Les occupants occidentaux sont toujours retournés par bateaux d'où ils sont venus. Malheureusement, le divorce n'a jamais eu lieu à l'amiable bien qu'il ne s'agisse que d'incompatibilité d'humeur. Il est temps de penser et de revoir à la lumière de cette étude, que nous sommes faits non pas pour nous quereller mais pour nous compléter. Nous devons vivre dans un monde complémentaire au nord la motricité, la technologie, les sciences et de l'autre côté, la conception, la morale, la vie spirituelle... L'«affaire du sous-développement» n'est pas une affaire des peuples inférieurs. Certes, il y a un abîme technique entre les deux civilisations. Les sociétés restées «en marge du développement» sont pourvues d'institutions et de systèmes de valeurs très différents par rapport à ceux des pays développés. Il y des habitudes comportementales non pas des incapacités raciales. Aucun pays n'a le monopole de l'intelligence. Il est temps d'abandonner la philosophie de l'homme dominant. Nous avons besoin d'une nouvelle philosophie qui freine l'orgueil et l'arrogance de l'homme. L'homme n'a pas le droit de rechercher un meilleur bien-être aux dépens d'un autre être humain. Les nations prospères, les grandes puissances ne doivent pas rechercher à acquérir plus de richesses au détriment des pauvres. Batailles et conflits épuisent la diversité de la vie, laissant un désert social dans leur sillage. * Membre de l'Instance exécutive du FLN ex-député |
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