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Un consensus s'est dégagé de la rencontre qui a réuni, dans l'après midi
de jeudi dernier à la salle de conférence de l'IDRH, des architectes, des
associatifs, des espagnols séjournant à Oran dans le cadre de la coopération et
des intellectuels oranais : l'urgence de la promulgation du plan de sauvegarde
de Sidi El Houari. Ce texte, qui a force de loi selon les explications fournies
par les spécialistes présents, devait être promulgué juste après la tenue du
colloque international sur la réhabilitation de Sid El Houari organisé en
Octobre dernier. Quatre mois après, ceux soucieux de la préservation de ce
quartier, témoin privilégié de l'histoire millénaire de la ville, attendent
toujours un geste de la part du ministère de la culture et du ministère de
l'habitat. On souligne qu'Alger et Constantine ont bénéficié de plans de ce
genre, ce qui a permis l'entame de travaux de restauration de certains sites
historiques dans ces villes. Précisons que la rencontre de jeudi dernier
s'inscrit dans le sillage du colloque cité et coïncide avec l'enveloppe dégagée
pour l'embellissement et l'entretien de certains immeubles et places de ce
quartier historique. Ajoutons que lors de sa dernière visite à Oran, le
Président de la République a soulevé avec les responsables de ce secteur la
question du devenir de ce quartier.
L'absence de ce plan se traduit, comme l'ont noté à juste titre certains intervenants, par l'absence d'une stratégie bien définie fixant au préalable les objectifs à atteindre. Dans ce sens, un urbaniste, fin connaisseur du quartier, a relevé que la question de préservation de ce « musée historique à ciel ouvert» est débattue depuis 1967. Ce qui n'a pas empêché sa détérioration et la déperdition de pans entiers de son patrimoine architectural. Pour cause, jusqu'ici, toutes les initiatives ont été prises par les autorités publiques sans concertation des spécialistes. D'ailleurs, le débat a porté entre autres sur la clarification des notions, notamment celles de « réhabilitation » et « revitalisation ». Un spécialiste expliquera qu'il s'agit d'un processus de longue haleine, recommandant un savoir faire et surtout une fine connaissance du quartier du point de vue sociologique et économique. Donc, il ne s'agit pas d'une simple opération de lifting, touchant les façades d'immeubles, les escaliers et leur étanchéité comme on a l'habitude de constater jusqu'ici. Dans ce cadre, certains participants à cette rencontre ont constaté que malheureusement l'enveloppe de 1.400.000 DA dégagée pour Sid El Houari sera engloutie dans ce genre d'entreprises. L'on apprendra que c'est la Sonatrach qui prend en charge les frais de cette opération de lifting qui s'inscrit dans le cadre de la préparation d'Oran à recevoir le Congrès mondial du GNL l'an prochain. Plus grave, un architecte ayant pour centre d'intérêt ce quartier, et donc connaissant le terrain, relèvera qu'actuellement des immeubles ayant une valeur architecturale inestimable ont été condamnés à la démolition. Il donnera l'exemple d'une maison se trouvant à la rue Montauban avec une façade classique et un intérieur turc qui risque d'être rasée d'un moment à l'autre. D'autres intervenants réclament une relecture des rapports établis actuellement par le CTC. Cet organisme établit des expertises et définit les immeubles à raser, ceux à retaper et ceux jugés encore en bon état. Sans remettre en cause la compétence du CTC, les intervenants réclament une seconde expertise qui serait du ressort des architectes et qui viserait à sauver de la démolition les immeubles et bâtisses représentant un intérêt architectural ou historique. Intervenant dans le débat, une femme représentant la direction de l'urbanisme (la DUC) fournira des chiffres qui donnent froid au dos. Plus de 50% des immeubles examinés jusqu'ici dans un premier périmètre sont classés dans la case « rouge » c'est-à-dire condamnés à être rayés de la carte du quartier. Ce qui signifie tout simplement l'engloutissement pur et simple de témoins architecturaux de plusieurs époques de l'histoire de la ville. Abondant dans ce sens, un architecte notera qu'il existe à Sid El Houari 120 monuments historiques, dont uniquement 20 sont classés et le reste risque la déperdition, notamment durant les opérations de démolition entreprises dans ce quartier. Certains assistants ont relevé quand même le risque d'effondrement de certaines habitations et le danger de mort qui plane au dessus des têtes de leurs habitants. Evoquant le cas de l'hôpital Baudens, qu'un associatif propose de transformer en université, un architecte répliquera que sur les six hectares de sa surface trois encourent un sérieux risque de glissement de terrain. Il expliquera que le sort de cet édifice historique a été scellé lors de l'opération de démolition du quartier la Scalera dans les années 80. Soulignons que la rencontre a été riche en propositions concrètes. Mais comment les synthétiser et comment fédérer toutes les bonnes volontés soucieuses de la conservation d'un quartier dont le nom va de pair avec celui de la ville ? Mohamed Bahloul, l'hôte de cette rencontre, expliquera la nécessité de la création d'une fondation, structure pouvant assurer l'engineering opérationnel dans pareil cas. Autrement dit, la société civile, représentée dans pareille structure, doit s'organiser pour s'imposer en tant que facteur incontournable dans les desseins réservés à ce quartier. Le rendez-vous est pris pour une prochaine rencontre qui sera consacrée à cette question, parce qu'il y a péril en la demeure. |
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