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RÊVES ET RÉALITÉS

par Belkacem Ahcene-Djaballah

Livres

Le vendeur de rêves. Roman de Houria Bousdira. Editions El Qobia, Alger 2024, 157 pages, 1 000 dinars.



Khadidja, 54 ans, institutrice, divorcée, mère de deux grandes filles (vivant ailleurs) mais vivant seule, possédant son propre logement et une voiture, est malheureuse. Elle a une très bonne amie... Tout pour être heureuse. Presque tout. Car, elle ne supporte plus son corps, ...tel qu'elle le voit et l'interprète. Elle fait donc appel à la « chirurgie plastique reconstructrice et esthétique »... pour redonner à ses seins, qu'elle trouve désormais lourds et sans attraits, une allure bien plus attirante.

L'opération est coûteuse mais elle lui paraît nécessaire. Elle vend sa voiture car il faut payer d'avance. L'opération a lieu, vite suivie d'une certaine déception. Pire encore, bien qu'insatisfaite, elle tombe (presque) amoureuse de son chirurgien, lequel, bien plus jeune qu'elle, après avoir presque raté son opération, semble se jouer d'elle.

Bref, une double déception. Plusieurs morales de l'histoire : le poids de la solitude, tout particulièrement pour les personnes seules, et pour les femmes encore plus ; le refus de penser que la vieillesse est une maladie dont on doit guérir, alors que c'est une « douce fatalité que l'on doit apprivoiser et savoir accepter ».

L'Auteure : Licenciée en sciences naturelles. Déjà auteure d'un premier roman, en 2023, « Mon enfant est différent ». Table : 11 parties

Extraits : « Derrière chaque quémandeur se cache une histoire, un cas, un drame » (p 28), « Certaines chirurgies sont pratiquées par de simples médecins généralistes s'improvisant pour l'occasion plasticiens. D'autres, par des chirurgiens viscéraux reconvertis en chirurgiens esthétiques. Les prestations de médecine plastique réalisées par les coiffeuses esthéticiennes restent les plus à risque » (p 65), « Des prothèses mammaires qui se rompent. Des cicatrices qui s'éventrent et surtout des résultats éphémères pour la plupart des prestations esthétiques. Car mère nature reprend inexorablement ses droits. Vieillir est un état naturel auquel personne n'échappe » (p 67), « Khadidja est coincée dans l'étape « adolescence du troisième âge ». Elle est vieille pour les jeunes ; les moins de quarante-cinq ans. Et jeune pour les vieux ; les plus de soixante-dix ans » (p 90).

Avis - Un roman un peu difficile à lire car racontant le « drame » d'une dame, « bien sous tous rapports », mais malheureusement perturbée par le fait même qu'elle ne parvient pas à se voir « vieillir ». Un livre triste et quelque peu déprimant. Un roman parcouru de pudeur(s), ce qui nous laisse sur notre faim (fin ?).

Citations : « Se faire réajuster le nez, poser des implants mammaires dans la clinique du coin, entre la visite d'un musée ou une balade à la Casbah sont d'une banalité déconcertante. On appelle cela le tourisme esthétique » (p 40), « Le divorce n'est que la fin d'un mariage. Un simple document qui stipule que certains couples ne peuvent plus partager légitimement la même couche. Même infructueuse, cette expérience de la vie reste gravée en nous à tout jamais » (p108), « L'amour ne se dit pas. Il se révèle » (p129).



Douleurs muettes. Nouvelles de Fatiha Belkacem. Editions El Qobia, Alger 2022, 78 pages, 1 000 dinars (Fiche de lecture déjà publiée, début décembre 2024. Extraits pour rappel. Fiche complète in www.almanach-dz.com/société/bibliotheque dalmanach)



Faiza, Fodil, Kallou, Attika, Rachida, Samia, Zahra, Rabea, Zakia, Wahiba, Miryam, Latifa, Nacera, Fadila. Quatorze récits de vies douloureuses, s'exprimant à travers cet ouvrage qui a réussi, en peu de pages, à résumer des « douleurs muettes », surtout féminines. Douloureuses parce qu'elles expriment, à travers des mots, simplement dits et franchement écrits, des situations multiples mais « invisibles » sinon à travers les conséquences... emplissant, par la suite, soit les pages de la presse, soit les bancs des tribunaux, soit les cellules des prisons, soit les lits d'hôpitaux (...)

L'Auteure : Née à Boufarik en 1949. Etudes en philosophie, ancienne correspondante d'un journal et carrière dans une banque en tant que cadre dirigeant...(...)

Extrait : « Elles sont si nombreuses ces personnes condamnées à se taire en traînant leurs lourds secrets dans leurs sépultures » (p 5)

Avis - Les douleurs « muettes » ne sont pas aussi rares qu'on le croit, et sont bien plus nombreuses et bien souvent bien plus proches.(...). Des récits douloureux... souvent déprimants.

Citations : (...), « La première (note : La première union par le mariage) est un contrat social avec beaucoup d'obligations et la seconde (note : Une seconde union) un contrat moral sans engagements ni responsabilités et pour la plupart des cas on craint beaucoup plus la société que la morale qu'on peut piétiner quand on le souhaite, par lâcheté ou facilité » (p 61).