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![]() ![]() ![]() Afrique à la croisée des chemins : ruine ou renouveau ?
par Elhabib Benamara ![]() L'Afrique,
berceau de la civilisation, traverse un moment critique de son histoire. Jadis
riche en écosystèmes florissants et en ressources abondantes, elle fait
aujourd'hui face à des crises sans précédent:
sécheresses incessantes, forêts en disparition, sources d'eau asséchées et
terres fertiles en plein effondrement. Ce n'est pas seulement une catastrophe
environnementale, c'est une menace existentielle pour des millions de
personnes. Pourtant, au milieu du désespoir, une révolution silencieuse est en
marche : un combat pour restaurer la terre, récupérer l'eau et raviver
l'espoir.
Un continent en crise Du Sahel aux rivières épuisées d'Éthiopie, la richesse naturelle de l'Afrique est en train de disparaître à une vitesse alarmante. Chaque heure, l'équivalent de 300 terrains de football de sols fertiles se transforment en poussière (source : UNCCD). La désertification avale les terres agricoles, les récoltes s'épuisent et des communautés entières vacillent au bord de la survie. L'eau se raréfie, forçant des populations à parcourir des kilomètres pour une simple goutte, tandis que les conflits pour les ressources s'intensifient. Mais cette crise ne se résume pas au changement climatique. Une mauvaise gestion et des politiques court-termistes aggravent la situation. Les inondations de 2024 à Béchar, illustrent les conséquences de l'urbanisation excessive : au lieu de recharger les nappes phréatiques, les eaux de pluie ont été canalisées vers les routes, transformées en torrents, emportant tout dans leur passage. Paradoxalement, bien que l'Afrique joue un rôle clé dans la capture du CO2 à travers ses forêts et zones humides, elle reçoit moins de 5% des financements mondiaux pour le climat (source : PNUE). Une révolution de l'espoir Mais l'histoire de l'Afrique ne se limite pas à la souffrance. C'est aussi une histoire de résilience, d'ingéniosité et de renouveau. Partout sur le continent, des individus ordinaires accomplissent des exploits extraordinaires : ils luttent contre la désertification, récupèrent des terres arides et redonnent vie aux sols. Les trous de Zaï au Burkina Faso : ces petits trous remplis de compost attirent les termites, qui décomposent la matière organique et restaurent la fertilité des sols. Les terrasses en pierre du Tigré, en Éthiopie : elles ralentissent l'érosion, restaurent la végétation et redonnent vie aux rivières. Les barrages de sable au Kenya : ils stockent l'eau de pluie et fournissent une réserve hydrique permanente à 500 000 personnes. L'agroécologie et l'agriculture biologique : en utilisant des semences locales et du compost, les agriculteurs réduisent leur dépendance aux intrants coûteux tout en augmentant la fertilité des sols. Restaurer la terre en Afrique L'eau et le sol sont inséparables, éléments fondamentaux de toute vie. Pourtant, une gestion irresponsable et le changement climatique continuent d'accélérer la désertification et l'insécurité alimentaire. La solution repose sur une rétention massive de l'eau et une régénération des sols : Récolte des eaux de pluie : stocker et réorienter les eaux pluviales pour recharger les nappes et soutenir l'agriculture. Reforestation et restauration des zones humides : ces écosystèmes naturels agissent comme des réservoirs et sécurisent l'approvisionnement en eau.Régénération des sols : l'agroécologie et le compost naturel restaurent la capacité des sols à retenir l'humidité. Agriculture en courbes de niveau et terrasses : ces pratiques préviennent l'érosion et stoppent la progression du désert. Le nouveau paradigme de l'eau Le scientifique slovaque Michal Kravèík et son équipe ont démontré que l'urbanisation et l'agriculture industrielle perturbent le cycle naturel de l'eau, accélèrent l'évaporation et appauvrissent les sols. Leur ouvrage Le Nouveau Paradigme de l'Eau, que j'ai eu l'occasion de traduire en français, prône des solutions inspirées de la nature: La création de micro-barrages et bassins de rétention L'installation de ceintures végétales pour ralentir l'écoulement et favoriser l'infiltration. Des techniques agricoles régénératrices pour améliorer la structure du sol. Le choix nous appartient Si rien n'est fait, le Sahara engloutira encore 100 000 hectares cette année. Pourtant, la Grande Muraille Verte a déjà restauré 18 millions d'hectares, bien que cela ne représente que 4 % de son objectif pour 2030. Accélérer ces efforts nécessite plus que des investissements : il faut une volonté politique. Pendant ce temps, des multinationales profitent de l'accaparement des terres et de l'eau, tandis que des fonds climatiques sont détournés. La bataille pour l'avenir écologique de l'Afrique est aussi une lutte pour la justice. L'Afrique n'est pas condamnée à la ruine - elle est en train de se réveiller. Sauver ses terres, c'est restaurer sa dignité, son héritage et la promesse d'une abondance retrouvée. La terre sait comment revivre. Sommes-nous prêts à nous battre pour elle ? |
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