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Des ruines et de gloire. Roman de Akli Tadjer, Casbah Editions, 325 pages, 1.400 dinars Après sa prestation de serment d'avocat, à Paris, où il a effectué ses études de droit, Adam El Hachemi Aït Amar est revenu (avec son père) en Algérie. Avec, pour idée, de défendre ses compatriotes subissant encore le joug colonial. Nous sommes en 1962, juste avant les négociations devant aboutir aux Accords d'Evian, en mars. Collaborateur d'un avocat d'origine européenne, libéral politiquement, ne voilà-t-il pas qu'il se retrouve défendeur d'une activiste, proche de l'OAS, mortellement pro-Algérie française, Emilienne Postorino. Respectant beaucoup plus les termes de son serment que ses sentiments nationalistes, il va s'engager pleinement dans la prise en charge du dossier et, en attendant le procès qui s'éternise au vu de la situation assez confuse régnant à Alger à la veille du cessez-le-feu, l'auteur nous raconte les états d'âme du jeune homme qui ne sait plus où finit la justice et où commence le patriotisme. A tout cela se greffent deux histoires d'amour, l'une contenue avec la prisonnière et l'autre déclarée avec Irène Konstantopoulos, une employée européenne du cabinet d'avocat et les aventures maquisardes, du côté d'El Kseur, du père toujours sur les traces de ceux qui ont martyrisé Zina, sa bien-aimée. Bien sûr, tout est bien qui finit bien..., pour (presque) tous et toutes. L'Auteur : Né en 1954 à Paris. Auteur de plusieurs romans (et d'un essai à succès : «Qui n'est pas raciste, ici ?», Lattès 2019) dont trois adaptés à la télévision : «Les ANI du Tassili», «Le Porteur de cartable» et «Il était une fois..., peut-être pas». Plusieurs livres à succès, dont «Le Porteur de cartable», «La meilleure façon de s'aimer»... et... «La Reine du tango» (2006) qui a reçu le Prix Nice Baie des Anges. Ses romans sont traduits dans de nombreux pays. Sa bio-express indique qu'«il poursuit son exploration des liens entre la France et l'Algérie pour mieux tisser notre histoire commune». Extraits : «Que ce soit à Alger ou à El Kseur, le comité d'accueil est le même : l'armée. Ils vous dévisagent de travers, vous malmènent, vous palpent, éructent les mêmes grossièretés aux récalcitrants qui en ont ras le turban de se faire contrôler» (p 51), «Peut-on faire sa vie avec quelqu'un sans être sûr de ses sentiments ? Je connais des tas de gens qui vivent ensemble sans s'aimer, s'aimer à fond, je veux dire. Ils s'aiment à l'usure. Je ne parle même pas de nos mariages arrangés ou forcés, où ni l'un ni l'autre ne se connaissent, pour le pire ou le moins pire. Il se peut pourtant que le bonheur survienne entre ces deux inconnus, mais il faut bien admettre que cela tient du miracle» (p 253). Avis - Une histoire parcourue de «fraternité» au sein d'une société coloniale en plein naufrage et débandade. Un équilibre difficile à tenir et il fallait tout l'art de l'auteur pour y parvenir. Se lit d'un trait... sans convaincre cependant. Une remarque : le quotidien «Alger Républicain», maintes fois cité durant la période, ne paraissait plus, ayant été interdit par les autorités coloniales le 1er septembre 1955 (et, El Bassaïr seulement en avril 1956) et n'a repris que le 18 juillet 1962 . Citations : «On ne libère pas un peuple, un peuple se libère par lui-même» (p 63), «Il y a trois sortes d'avocats : ceux qui se soumettent aux lois, au-dessus ceux qui les refusent, au-delà ceux qui s'en imposent (...). Pardon, j'en oublie une, les avocats hors-la loi, ceux qui n'écoutent que la loi de leur cœur» (Me Jacques Vergès cité, p 108), «Avant de soigner les hommes malades de l'injustice, il fallait d'abord soigner les hommes qui font la justice» (p 147), «Vos pieds (note : ceux d'un pied-noir) sont ici, mais votre tête est restée là-bas. C'est ce que j'appelle l'esprit colonial» (p 268), «L'essentiel, c'est l'audace, l'amour, la liberté» (p 270). D'audace et de liberté. Romande Akli Tadjer. Casbah Editions, Alger 2023, 229 pages, 1.200 dinars La guerre (la 2ème) est finie, Adam Bousoulem ne retourne pas en Kabylie natale. A quoi bon puisque Zina, son premier et grand amour, est désormais mariée au Caïd du coin. Autant rester en France, bien que le pays se soit montré peu généreux à son égard pendant la guerre. Enrôlé en 1939, enfermé ensuite en Picardie dans un camp de travail réservé aux coloniaux, il s'en était évadé. «D'audace et de liberté » renoue avec un héros ignoré et rendu à un pays qui se reconstruit. Lecteur de «Combat», admirateur de Danton, il tire, peu à peu, les leçons du passé tout en dirigeant, en compagnie (jusqu'à l'intime) d'Elvire, la fille, de confession juive, du propriétaire (non revenu des camps nazis) d'une tannerie dont il a hérité à Gentilly. Ce deuxième volet de la fresque épouse, petit à petit, les contours d'un monde colonisé impatient, prêt à faire craquer les anciennes coutures. Puis, patatras, le père d'Elvire réapparaît en Palestine. Parallèlement, la redécouverte du pays et des origines est accélérée par la venue à Paris d'un autre Adam..., un jeune homme, dont le «père» (le Caïd, époux de la bien-aimée Zina) a été tué par des révoltés. Après les aventures du guerrier, après celles de l'amant, c'est le temps du papa qui commence. Pour Adam senior, la vie est ainsi faite. A l'image d'une représentation de pièce de théâtre «On y arrive quinze minutes après le début et on s'en va quinze minutes avant la fin, sans connaître la fin». L'Auteur : Voir plus haut Extraits : «Après la guerre, nous n'avons eu ni remerciements ni reconnaissance, pas même une petite breloque, pour dire... À la vérité, nous n'attendions rien et nous n'avons pas été déçus. Aux yeux des Français, nous sommes restés ce que nous n'avons jamais cessé d'être : des colonisés corvéables à merci. Mais là n'est pas le principal, ce qui nous rapproche et nous unit, c'est cette soif de justice et de liberté» (p 123). Avis - Un auteur facile à lire et à comprendre grâce à sa maîtrise de l'écriture et au rythme du récit. Cela va vite, très vite, mais pas trop. Peut-être un peu trop tendre à l'endroit des autres... de ceux, il le sait, qui ne nous aiment pas. En attendant, assurément, la suite... certainement la guerre de libération nationale en France même ou... en Algérie. Le troisième volet de la fresque. Citations : «Sans utopie, il n'y a pas d'avenir possible» (p 101), «La liberté, c'est refuser ce qu'on ne veut pas faire» (p 198). (Fiche de lecture déjà publiée in almanach-dz.com/société /bibliotheque dalmanach, août 2023. Extraits pour rappel) |
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