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Depuis
plusieurs années, et plus particulièrement depuis l'arrivée d'Abdelmadjid Tebboune à la présidence, l'Algérie fait l'objet de
critiques récurrentes.
Ces attaques proviennent notamment du Makhzen marocain, dans le cadre du conflit autour du Sahara Occidental, mais également de certains pays occidentaux, dont la France. Ces critiques y sont amplifiées par divers courants politiques, notamment l'extrême droite, la droite conservatrice, ainsi que par des lobbies influents, souvent désignés sous l'appellation de « France profonde », qui perpétuent des attitudes paternalistes, voire néo-colonialistes, dans la gestion des relations avec l'Algérie. Jusqu'à récemment, elles étaient perçues comme une composante habituelle du jeu diplomatique, nécessitant de la part de l'Algérie une attitude de détermination et de résilience pour y répondre efficacement. Cependant, ces dernières semaines ont été marquées par une escalade significative, accompagnée d'une campagne de déshumanisation visant non seulement les autorités algériennes, mais également la population. Cette offensive a pris une tournure particulièrement virulente après l'arrestation de Boualem Sansal, suscitant une onde de chocs en France. Médias, réseaux sociaux et figures politiques se sont unis pour critiquer frontalement l'Algérie, dénonçant ce qu'ils perçoivent comme une atteinte aux droits de cet écrivain binational, récemment naturalisé français. Le ministère de l'Intérieur français, souvent perçu comme influencé par des courants d'extrême droite, a récemment franchi un nouveau cap en procédant à l'arrestation de plusieurs influenceurs algériens. Ces actions reposent sur des accusations émises par un lanceur d'alerte, Chawki Benzahra, parmi d'autres. Le conflit entre les deux pays, souvent qualifiés de frères ennemis, s'est encore intensifié avec l'affaire du refoulement de l'influenceur Boualem. Les autorités algériennes ont refusé son retour en invoquant des motifs juridiques clairement détaillés dans un communiqué officiel publié le 11 janvier 2025 sur leurs canaux officiels. Cette série d'événements témoigne d'un durcissement des tensions entre Alger et Paris. Cette situation soulève des interrogations sur les véritables motivations derrière ces attaques et sur leur impact à long terme sur les relations entre l'Algérie et ses partenaires internationaux. Pourquoi cette focalisation particulière sur l'Algérie, alors que des incidents similaires ailleurs n'ont pas suscité la même réaction ? Cela évoque-t-il une forme moderne de l'Affaire de l'éventail, comme celle qui opposa Hussein Dey au Consul de France en 1827, et qui servit de prétexte à l'invasion de l'Algérie ? Par ailleurs, ces mêmes acteurs qui critiquent vigoureusement l'Algérie sont restés curieusement silencieux face à d'autres situations tout aussi graves. On peut citer l'arrestation du journaliste français Sylvain Mercadier par l'armée israélienne au Golan ou encore l'humiliation subie par la France avec l'arrestation de deux gendarmes français à Jérusalem. Ni le Président Macron ni l'extrême droite française n'ont exprimé la moindre indignation dans ces cas. Cette différence flagrante de traitement questionne la cohérence et l'objectivité des positions adoptées. Pourquoi ce silence radio dans certaines circonstances, alors que d'autres sont amplifiées de manière disproportionnée ? Ces incohérences ne traduisent-elles pas des intérêts cachés et des stratégies politiques sélectives ? Sans céder à une vision complotiste, il est évident que les Accords d'Abraham, qui ont établi des relations diplomatiques entre Israël et plusieurs pays arabes, jouent un rôle significatif dans l'intensification des tensions régionales. Ces accords ont profondément remanié les alliances et les intérêts stratégiques dans la région, exerçant une influence indéniable sur les dynamiques actuelles. Cette reconfiguration géopolitique contribue à créer un climat d'escalade aux conséquences imprévisibles. Par ailleurs, la reconnaissance par la France de la souveraineté marocaine sur le Sahara Occidental s'inscrit dans une stratégie visant à renforcer l'axe stratégique unissant le Maroc, Israël et la France. Ce partenariat, solidement ancré au sein des institutions françaises, semble utiliser des affaires comme celle de Sansal pour ternir l'image de l'Algérie. Cette approche pourrait viser à mettre en lumière certaines faiblesses algériennes dans le but de déstabiliser le pays, tout en profitant de la situation pour durcir les restrictions à l'accès des Algériens au territoire français. Une telle démarche reflète une volonté manifeste de nourrir les tensions et d'affaiblir la position de l'Algérie sur la scène internationale. D'un autre côté, certains observateurs estiment que l'Algérie paie le prix de son positionnement ferme sur des questions stratégiques, notamment son soutien indéfectible à la Palestine ou encore sa nouvelle politique d'indépendance économique, marquée par un rapprochement avec d'autres partenaires comme la Turquie, la Chine et la Russie. Jamais, dans l'histoire de la Cinquième République, on n'avait observé une telle union des lobbies, de l'extrême droite française et de la droite dure dans une convergence d'intérêts si manifeste. Cela peut être comparé à un alignement des planètes, un phénomène exceptionnel et rare. Aujourd'hui, toutes les dynamiques, qu'elles soient internes à la France ou issues du Moyen-Orient, semblent se conjuguer pour tenter de soumettre l'Algérie et compromettre sa position sur la scène internationale et la déstabiliser. Dans tous les cas, les Algériens ne sont pas dupes de ces manœuvres. La résistance, profondément enracinée dans leur identité, reste un pilier de leur résilience. Ces crises, bien qu'elles puissent ébranler, offrent également aux Algériens une opportunité de consolider le Front national et de renforcer une prise de conscience collective face aux enjeux de l'avenir. Elles pourraient ainsi favoriser l'émergence d'une société civile plus lucide et proactive, capable de contribuer activement à la construction d'un avenir solide pour le pays. *L'École des Hautes Études des Sciences Sociales de Paris EHESS |
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