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La persistance de l'esprit colonial dans les relations franco-africaines

par Mustapha Aggoun

Il semble que l'esprit colonialiste, qui a marqué des siècles d'histoire, continue de sévir dans les relations entre la France et l'Afrique. Malgré la décolonisation apparente et les discours officiels prônant l'égalité entre nations, la France peine à abandonner son rôle autoproclamé de force politique dominante sur le continent africain. Ce comportement, hérité de son passé impérial, se manifeste par des ingérences directes ou indirectes dans les affaires internes des États africains et par un soutien tacite à des groupes ou individus qui servent ses intérêts stratégiques, notamment lorsqu'il s'agit de fragiliser les nations qui osent résister à son influence.

En Afrique, et particulièrement en Algérie, des exemples récents illustrent cette attitude persistante. La France offre un espace d'expression à des figures controversées qui mènent une propagande ouverte contre l'Algérie, sous le prétexte fallacieux de la démocratie et de la liberté d'expression. Parmi ces figures, Boualem Sansal, un écrivain algérien notoirement critiqué pour ses positions anti-algériennes, incarne cette instrumentalisation. Non seulement Sansal a honoré le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), une organisation connue pour son soutien inconditionnel à des politiques israéliennes contestées, mais il a également proféré des discours empreints de haine, mettant en cause l'intégrité territoriale et la souveraineté de l'Algérie.

Cette même France, paradoxalement, se permet d'expulser d'autres individus en invoquant des motifs de sécurité ou des divergences idéologiques, sans même consulter les autorités des pays d'origine de ces personnes. Ce deux poids, deux mesures révèle une posture profondément ancrée dans une mentalité néocoloniale : protéger et promouvoir ceux qui servent ses intérêts tout en rejetant ceux qui s'opposent à ses orientations politiques.

La France semble pratiquer une politique ambivalente envers l'Afrique : d'un côté, elle accueille et défend les Africains qui adoptent son discours, s'imprègnent de sa culture et, parfois, vendent leur plume au service d'une vision biaisée des réalités africaines. De l'autre, elle critique ouvertement et tente de déstabiliser les nations africaines qui défendent leur souveraineté et leur indépendance.

L'histoire elle-même est là pour rappeler les humiliations infligées par la France à l'Afrique. De la traite négrière aux massacres coloniaux, des pillages des ressources aux manipulations politiques postindépendance, les relations franco-africaines ont été marquées par une volonté constante d'oppression et de domination. Aujourd'hui encore, cette tendance se manifeste par des tentatives d'interférence dans les processus politiques africains et par le soutien à des forces séparatistes ou des individus qui prônent la division.

Le contexte africain a considérablement évolué. De plus en plus de pays africains, à l'image de l'Algérie, revendiquent leur souveraineté et refusent de se plier aux injonctions d'une puissance étrangère. La montée en puissance de nouveaux partenaires économiques et politiques, comme la Chine, la Russie ou les pays du Golfe, offre aux nations africaines des alternatives à l'influence française.

L'Algérie s'est imposée comme un acteur clé dans la défense des intérêts africains, en promouvant des politiques de coopération sud-sud et en s'opposant fermement à toute tentative de fragmentation du continent. Le rôle de l'Algérie dans le soutien aux mouvements de libération africaine, depuis la guerre d'indépendance jusqu'à aujourd'hui, est une preuve de sa détermination à défendre la dignité et la liberté des peuples du Sud.

Le déclin de l'influence française en Afrique est désormais palpable. Plusieurs nations africaines dénoncent ouvertement les accords déséquilibrés qui maintiennent leur dépendance économique et politique vis-à-vis de l'ancienne métropole. Les récentes expulsions d'ambassadeurs français par certains pays africains, la montée des sentiments anti-français, ainsi que la remise en question des bases militaires françaises sur le continent, témoignent d'un rejet croissant de cette tutelle postcoloniale.

Ce rejet ne concerne pas seulement la France, mais l'ensemble des pratiques néocoloniales qui visent à exploiter les richesses africaines tout en maintenant les populations locales dans la pauvreté et l'instabilité.

Face à ce contexte, il est impératif que la France revoie profondément sa politique africaine. Elle doit cesser de se considérer comme une tutrice et accepter l'Afrique comme un partenaire égal, doté de ses propres aspirations, de sa propre vision et de son propre destin. La continuité d'une politique néocoloniale ne fera qu'aggraver les tensions et éloigner davantage la France de ses anciennes colonies.

L'histoire africaine est une leçon de résilience face à l'oppression. Les nations du continent, et notamment l'Algérie, rappellent à la France et au monde entier que l'époque des dominations unilatérales est révolue. L'Afrique avance, avec ou sans ceux qui s'acharnent à la maintenir en arrière.