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Instabilité politique en France. Etat et perspectives

par Abdelhak Benelhadj

Depuis la surprenante dissolution de l'Assemblée Nationale en juillet, la France connaît une vie politique en crise historique.

Après avoir longtemps tergiversé, prenant prétexte les Jeux Olympiques organisés à Paris, E. Macron a fini par se résoudre à choisir en septembre un Premier ministre parmi un groupe qui compte moins de 6% de députés. Fatalement, la situation devait finir par un échec et M. Barnier a été censuré.[1]

Le président et le monde politique français retournent aux conditions initiales. Une des solutions envisagées, comptant sur leurs rivalités internes, passait par l'introduction d'une faille entre les membres du Nouveau Front Populaire (NFP) et envisager alors de recomposer avec le «bloc central» un gouvernement réunissant un «axe républicain» qui isole à la fois le Rassemblement National (RN) et La France Insoumise (LFI). Sous forte pression interne et externe, la direction du PS et son Premier secrétaire, O. Faure, se sont sentis obligés de demander audience au président de la république qui les a reçus le vendredi 06 décembre, pour tenter de trouver une sortie à un blocage politique dont l'Elysée est seul responsable.

La délégation du PS, sans doute pour éviter l'isolement, a convaincu le président d'envoyer une invitation aux autres membres du NFP.

Ce qui fut fait.

Si le PC et les Verts ont accepté et rencontré le président le lundi 09 décembre, les Insoumis ont refusé expliquant qu'ils n'ont rien à négocier avec un président qui ne cherche qu'à se maintenir au pouvoir et à conforter la politique qu'il a toujours menée, alors qu'il a, ainsi que ses représentants à l'Assemblée Nationale, perdu les élections européennes et législatives.

A la sortie de l'Elysée, la déclaration des représentants du PC est embrouillée et confuse insistant sur la nécessité du dialogue tout en évitant de préciser les termes de ce dialogue.

Les Verts, au contraire sont très clairs et demeurent pour l'essentiel sur la ligne défendue par le NFP.

A la suite de quoi, l'Elysée propose une réunion générale mardi 10 décembre à tous les responsables des partis représentés à l'Assemblée à l'exclusion du RN et de LFI. Il faut noter que ces deux formations politiques ne sont pas absentes aux débats pour les mêmes raisons.

Comme on l'a noté plus haut, LFI a refusé de se rendre à l'Elysée, alors que le RN n'a pas eu l'occasion de refuser pour la simple raison qu'il n'a pas été invité. Nuance que les médias préfèrent ne pas souligner.

Le «mouton à cinq pattes»

Lundi 09 décembre, le PS envoie une lettre à l'Elysée témoignant d'un revirement dans sa position. Dans cette lettre, le PS semble rétropédaler et rappelle les termes du contrat conclu avec les électeurs et leurs partenaires du NFP.

PS, Verts et le PC reviendraient peu à peu à leurs conditions initiales : pas de gouvernement sans un Premier ministre de gauche, abolition de la réforme des retraites, hausse de la fiscalité sur les revenus et les patrimoines des plus aisés... comme «lignes rouges» à ne pas transgresser.

Avec une alternative très difficile à suivre : une éventuelle non-participation à un gouvernement dirigé par un premier ministre de droite que les socialistes ne censureraient pas sous réserve que les décisions prises soient conformes au programme défendu par le NFP. Ce qui est évidemment impossible.

Ce qui revient à continuer à être dans l'opposition à un gouvernement sans le censurer.

On s'épargnera les «nuances» et les déclarations contorsionnées des membres des différents partis concernés qui révèlent leur malaise.

Cela ressemble beaucoup à la position de Marine Le Pen et de son parti : être à la fois «pour» et «contre», dehors et dedans et espérer tirer parti des avantages des deux positions.

Comprenne qui pourra. On sait ce que ce genre de tactique a coûté au RN.

J.-L. Mélenchon fait un pari incertain et périlleux : «Je vis avec l'idée qu'ils ne le feront pas (de construire une coalition avec le centre ou la droite) et que dans un jour ou deux, un peu penauds, ils vont revenir.» (AFP, lundi 09/12/2024)

En sorte que la réunion prévue mardi 10 décembre, si l'on tient compte des positions du «bloc central», macroniste et LR, semble être partie pour échouer. Les questions à son entrée demeurent les mêmes qu'à sa sortie.

C'est d'autant plus préoccupant que ce n'est pas l'Elysée qui devrait réunir les partis, mais l'Assemblée Nationale. Il expose sa fonction au moment où tous ses efforts sont réunis pour l'en préserver et entretient une confusion dommageable (ce n'est pas la première) entre exécutif et législatif.[2]

Lorsque O. Faure à l'issue de sa réunion avec le président déclare : «Si E. Macron renonce au 49.3, nous ne censurons pas», on se demande ce que pèse réellement cet engagement, son groupe à l'Assemblée et ce qu'il en restera s'il s'avisait de couper ses ponts avec ses partenaires du NFP.

Dans ce jeu de dupes, le président n'a qu'un objectif : rester à son poste jusqu'à son terme, c'est-à-dire jusqu'en 2027, et administrer les affaires de la nation via l'entremise d'un gouvernement qui ne devra pas être censuré.

Par ce «contrat de méthode», E. Macron offrirait la garantie de ne pas dissoudre en juillet prochain et de faire voter un nouveau code électoral établissant la proportionnelle pour enlever à LFI toute possibilité de menacer les autres partis de gauche qui souscriraient à l'accord qu'il leur soumet. Incidemment, cela conviendrait aussi au RN qui le réclamait depuis longtemps pour faire valoir sa «réelle» influence étouffée par le régime majoritaire.

Le seul problème est qu'il n'y a pas que les élections législatives à intégrer dans les calculs. D'autres élections à venir vont subir l'impact de ces tractations, du reste très instables sur la durée. Les différents partis qui entreraient dans ce processus restent tout compte fait minoritaires et le pacte qui leur a permis d'accéder au statut d'interlocuteurs privilégiés à l'Elysée aura alors partiellement ou totalement disparu.

De plus, il n'est absolument pas certain que le «contrat» (de non-censure) signé par les chefs de parti soit ipso facto suivi par tous leurs députés y compris ceux des partis du centre et de la droite.

Cela, sans compter la réaction des électeurs et de la «rue», toujours imprévisible.

Il est illusoire d'espérer concilier entre politiques un écart économique, social et même urbain, qui se creuse tous les jours davantage, entre leurs électeurs. Les partis donnent parfois l'impression d'être en lévitation au-dessus du vide...

L'asymétrie des deux «extrêmes» et le substrat économique et social

Si on laisse de côté les expressions électorales et qu'on observe la causalité sous-jacente qui les explique, on comprendrait mieux l'état du paysage politique, les dynamiques électorales, et même les incohérences apparentes des partis.

Les catégories sociales populaires ont les mêmes intérêts, vivent les mêmes contraintes, mais sont éclatées politiquement, surtout entre PC, LFI et RN. Chaque parti se retrouve comme il peut face à des dilemmes quelques fois ingérables. Examinons ce point :

La désindustrialisation des entreprises industrielles européennes (en l'occurrence françaises) a visé trois objectifs principaux :

1.- Une chute des coûts salariaux

2.- Une désyndicalisation rapide des travailleurs passés de l'industrie au secteur tertiaire, moins bien payés et sans repères dans des structures plus petites,

3.- Un déclin électoral progressif du Parti communiste depuis la fin de la dernière guerre mondiale. Ce parti ouvrier a perdu ses députés parce qu'il a d'abord perdu ses électeurs et n'a plus d'idéologie à vendre à la société.

Le PC a perdu ses ouvriers. Il a aussi perdu ses intellectuels, ses poètes, ses artistes, ses universitaires et une articulation cohérente entre les mondes de l'industrie et de l'université.

LFI en a récupéré une part importante parce qu'il propose un projet dynamique adapté au monde dans lequel vivent ses électeurs. Il s'agit en particulier de sa composante «damnés de la terre» immigrée qui peuple les banlieues abandonnées par les «souchistes», un peu comme à la moitié du XIXème siècle, les «faubourg» étaient dominés par les Saint-simoniens dont l'association attaquée en justice, au début des années 1830, a été dissoute, en partie parce qu'ils se sont fourvoyés à créer une religion (très progressiste) plutôt qu'un parti politique.

C'est probablement pourquoi le PC entretient une sourde animosité à l'égard de son partenaire du NFP identiquement soucieux d'égalité et d'équité.

* Le Rassemblement National a toujours été un parti attrape-tout profitant des mécontentements et des suffrages venus d'horizons sociaux et économiques divers, du patronat aux employés tertiarisés passablement xénophobes.

Son principal problème est qu'il fait le grand écart entre catégories sociales dont les intérêts ne coïncident pas et ne convergent pas.[3]

La dernière censure votée (par le RN et le NFP) contre M. Barnier l'a montré de manière pédagogique.

Si les électeurs du NFP ont salué dans l'ensemble ce mauvais tour fait à Macron, ce ne fut pas le cas de tous les électeurs du RN dont une part – environ un tiers - (des patrons, commerçants, artisans, retraités...) a été scandalisés par ce vote. Les sondages ont rapporté une baisse très nette de popularité du parti de M. Le Pen. Les alliés LR et ex-Républicains du RN ne l'ont pas apprécié non plus. Certains membres du Rassemblement sans doute pas non plus.

Mais ce n'est pas le cas de la grande majorité populaire de ce parti, qui l'a salué. Résultat ; le RN est coincé et isolé. De plus, la censure à laquelle il a pris part le met en conflit avec ses très proches voisins LR avec lesquels il partage bien des axes politiques.[4]

Un sondage récent sur les intentions présidentielles démontre cela de manière pédagogique.[5]

Au premier tour, M. Le Pen arrive largement en tête des suffrages, confortée par ceux qui ont soutenu la décision du RN de censurer le gouvernement Barnier. Mais c'est au second que se constatent les dégâts de son vote, là où, ayant fait le plein de voix au premier tour, elle perd toute possibilité d'élargir l'espace de son audience. Le résultat du grand écart lepéniste : ce qu'elle gagne auprès de l'électorat populaire convaincu que la majorité de leurs problèmes viennent des étrangers africains et maghrébins, elle le perd auprès de l'électorat de droite qui la prive d'une éventuelle victoire finale.

Les enjeux

Contrairement à la fable, partout colportée, E. Macron n'est pas un caractériel névrotique qui «se cramponne à son siège». Certes, il verse comme beaucoup de chefs d'Etat dans un égotisme auquel peu résistent. C'est encore plus facile et tentant quand on est oint par une Constitution quasi-monarchique.

La dissolution de l'Assemblée Nationale en juillet dernier n'est pas la cause de la crise politique dans laquelle se débat la France, menaçant sa stabilité financière, aggravant l'état de son économie et affectant son «prestige international».

Elle l'a révélée.

Au plus, la seule et principale erreur de E. Macron, outre la dissolution, est de ne pas avoir cherché dès le mois de juillet, à conclure sérieusement un contrat de cohabitation, une sorte de modus vivendi avec le NFP, préservant à la fois les intérêts qui lui ont permis d'être là où il est et l'expression du vote des Français. Il a préféré louvoyer pour tenter d'annuler le suffrage qui l'a désavoué et pour maintenir un cap comme s'il ne s'était rien passé. L'explication de son attitude est simple et accessible à une raison élémentaire.

Rentes et partage des revenus. Qui vote pour qui et pourquoi ?

Ci-dessous, un exemple emblématique qui explique à la fois les raisons pour lesquelles le président a perdu ses élections et pourquoi il ne renonce pas à ses pouvoirs.

La décentralisation engagée depuis Mitterrand, sous prétexte de rapprocher la décision de là où elle se justifie et s'applique, a dessaisi les préfets de la politique du logement pour la confier aux autorités locales élues qui se trouvent aussitôt pris dans des jeux politiques locaux qui pèsent sur leurs décisions. Il s'en est suivi une progressive discrimination urbaine à l'avantage de la propriété individuelle et au détriment de la construction de logements sociaux.

Le logement pèse très lourds dans le budget des ménages et surtout des ménages à très faibles revenus, quand ils arrivent à trouver un logement...

En 2023, le nombre de ménages en attente d'un logement social a atteint 2,6 millions, soit une hausse de 7,5% sur un an, tandis que le nombre d'agréments est «à son pire niveau depuis 2005». «On n'a jamais aussi peu produit de logement social et on n'a jamais eu autant de demandeurs», constate Emmanuelle Cosse, présidente de l'USH, la confédération des bailleurs sociaux. (AFP, jeudi 25 Janvier 2024). En 2022, 26,7% des dépenses des Français sont consacrées au logement (17,9% en 1976, 9.5% en 1960). Soit deux fois plus que pour la nourriture (13,5%). Or, la moitié des logements locatifs dans le parc privé en France appartiennent à 3% des familles en France, multipropriétaires rentiers consommateurs de valeur ajoutée produite par d'autres et ne participent que très marginalement à l'investissement et à l'innovation.

Un mythe récurrent à l'usage des nigauds : la neutralité politique du capital

Le FMI, la Banque Mondiale, la BCE, les Fonds de pension, les agences de notation... sont loin d'être ce qu'ils prétendent être, des espaces «neutres», techniques, «apolitiques» qui arbitrent la vie économique internationale.

Ils ne sont pas seulement là pour conseiller des «investisseurs» dans l'affectation de leurs ressources dans l'économie réelle, anticipant l'état future des innovations et de la géoéconomie mondiale, sur la base d'une approche professionnelle, distanciée et objective uniquement fondée sur l'évaluation des bilans des entreprises et des gouvernants.

Nous avons affaire là à une économie globale complètement financiarisée et numérisée, avec des prédateurs impitoyables, des agioteurs qui ne créent pas de richesses, mais seulement soucieux de dégager des Plus-values en déplaçant, le plus souvent à très grande vitesse des sommes considérables. L'inflation sur les biens réels s'est déplacée depuis au moins les années Reagan, sur les produits financiers entre les places de plus en plus connectées.

C'est ce qui explique à la fois le gonflement totalement artificiel des capitalisations boursières et l'explosion des fortunes personnelles.[6]

C'est à cela que la dette souveraine de la France doit (à la surprise des observateurs) de ne «subir» qu'un taux d'intérêt relativement faible (moins de 3%) et un spread franco-allemand qui oscille en 70 et 85 points de base.

Cette «compréhension», cette aménité des marchés est surprenante. Bien des pays dans des situations similaires n'en ont pas bénéficiés. A quelles circonstances la gestion calamiteuse des affaires politiques de E. Macron doit-il d'en bénéficier ?

C'est dans ce monde que vit E. Macron et ses députés, avec une mission : garantir sans états d'âme la permanence de cet état de fait.

Ce sont ces contraintes qui permettent de comprendre les hésitations et les maladresses apparentes des décideurs et des partis politiques affairés et divisés par des questions économiques, budgétaires, sociales et financières. D'autres sujets, soustraits aux regards, soigneusement écartés permettent de mieux comprendre ces altercations insolubles. [7]

De la guerre et de la paix

Ainsi en est-il des relations internationales et même de l'Europe, complètement écartées des débats. Il en est de même de la défense. Un peu comme si ces questions faisaient l'objet d'un consensus alors qu'il suffirait de s'en approcher pour voir que ce n'est pas le cas, bien au contraire. Alors qu'elles sont au cœur de ce qui divise les politiques français.

Le seul parti qui en parle est le Rassemblement National. Mais aussitôt pour les limiter à la sécurité, à la démographie, à l'économie sociale et aux «valeurs» nationales dangereusement menacées par une «immigration incontrôlée».

Pourtant, il s'agit là de sujets pour ainsi dire «explosifs».

Sous forte pression de Washington, l'Union Européenne s'est impliquée dans un conflit militaire très dangereux et surtout très coûteux. La facture se monte en centaine de milliards de dollars et d'euros.

Depuis, février 2022, sous prétexte que leur liberté et leur sécurité étaient menacées, les pays européens ont fait des choix qui ont entraîné une hausse vertigineuse des dépenses militaires prélevées sur les ressources collectives au moment même où les budgets nationaux étaient très contraints, à la fois par une baisse excessive des prélèvements obligatoires (sur le capital) et par une hausse des dépenses notamment liées à la pandémie, au vieillissement des populations et à une baisse de la croissance économique.

Ces choix qui coûtent à la qualité de la protection sociale, de l'éducation, de la santé, des équipements publics, du logement (cf. plus haut)... ont été faits à l'insu des populations sans être soumis à un débat ouvert et à une délibération en connaissance de causes et de... conséquences.

Exemple : une concurrence féroce est faite à l'agriculture européenne à cause du conflit ukrainien. En 2016, un accord de libre-échange limité a été conclu avec l'Ukraine. En 2022, pour aider ce pays, les quotas affectant le poulet ukrainien de 7% augmentent de 40%. Le poulet ukrainien est emballé en Pologne ou aux Pays-Bas. Il perd alors les références de son origine et prend celles de l'UE.

Les importations de sucre ukrainien dans l'Union européenne passent de 20 000 tonnes à 700 000 tonnes ou plus en 2024. La Confédération générale des planteurs de betteraves (CGB) lançait déjà une alerte et craignait une déstabilisation du marché européen. (La France Agricole, mardi 28 novembre 2023).

Il en est de même des céréales. L'Ukraine prétend que les bombardements russes empêchent d'exporter vers les pays pauvres du tiers-monde, alors qu'ils se dirigent par chemin de fer, par route et via le Danube plutôt vers les marchés européens plus lucratifs.[8]

C'est pourquoi les liens de causalité entre ce conflit, les décisions qu'il a nécessitées et les crises qui se multiplient en Europe ont été mises sous le boisseau et continuent d'être ignorés par les débats politiques en cours. Les problèmes économiques et sociaux sont subis, mais à aucun moment n'en est désignée leur origine et leur cause.

L'instabilité politique qui affecte les exécutifs européens ignore publiquement une part importante des raisons qui l'expliquent.

A la veille de la crise ukrainienne, la chancelière A. Merkel cède sa place à O. Scholz qui annonce pour février 2025 des élections législatives anticipées, après avoir démis de ses fonctions son ministre des finances et brisé la coalition qui dirigeait l'Allemagne.

Le 21 juillet 2022, devant la Chambre des représentants au complet, le président du Conseil des ministres, Mario Draghi, annonçait sa démission dans une Italie structurellement instable. De nombreux gouvernements ont été désavoués par les votes ou sont fragilisés : au Royaume Uni, en Pologne, en Slovénie, aux Pays-Bas... mais aussi en Roumanie, en Moldavie, en Géorgie et en... France aujourd'hui.

Alternative : entre Charybde et Scylla

La démission du président provoquerait de dangereux mouvements sur les marchés financiers dont n'importe quel chef d'Etat à la hauteur de sa charge chercherait en à préserver son pays et la fortune de ceux qui le soutiennent.

Des questions se posent alors. Pour éviter un collapsus macronien ;

- C'est peu probable, mais le grand capital français accepterait-il de mettre la main à la poche pour sauver une poule aux œufs d'or qui ne lui a jamais cessé de rapporter ? On peut délocaliser des entreprises industrielles, mais il est inconcevable de délocaliser la France et sa «douceur angevine» à laquelle tient toute l'Europe et les grandes fortunes occidentales. S'il est possible d'endiguer l'appétit des «sans-culottes» et que le gouvernail demeure entre des mains de confiance, tout est possible si quelques chutes de table devaient calmer l'ogre populaire...

- Bruxelles (et les marchés...), dans ces conditions, consentirait-il à laisser la France jouir d'un «quoi qu'il en coûte» qui coûterait malgré tout, mais moins qu'un collapsus hexagonal catastrophique pour l'unité européenne et occidentale. Il suffirait de regarder une carte géopolitique du «Vieux continent» et d'en tester l'hypothèse : si on enlève la France, il n'y a plus d'Europe.

Rien que pour éviter cela, même un banquier pingre et ladre qui «raserait les verres»[9] n'en prendrait pas le risque.

Notes :

1. Abdelhak BENELHADJ : «La France sous ‘Coup d'Etat permanent'».

Le Quotidien d'Oran, 12 sept. 2024

2. La réduction en 2000 du mandat présidentiel, de sept à cinq ans, a contribué à la confusion des fonctions du président et de son premier ministre. Les moins oublieux se souviennent du président-chef d'orchestre N. Sarkozy.

3. L'histoire a connu semblable évolution. En Israël le gouvernement Netanyahu (dans la continuité de ceux qui ont contribué à l'assassinat de Y. Rabin) a réussi à entraîner son opinion publique dans une dérive passionnelle, irrationnelle, raciste et criminelle contraire à ses intérêts en l'isolant d'une population palestinienne disposée à partager territoire, histoire, langue, culture et économie, et en créant un gouffre avec les pays de la région pour lesquels Israël est désormais un pays dangereusement, radicalement et, surtout, irréversiblement étranger.

4. L'ancien ministre de l'intérieur, B. Retailleau, tient des propos que le RN pourrait revendiquer. C'est cette proximité qui a inspiré E. Ciotti qui a fait le choix de rejoindre et de fusionner avec le parti de M. Le Pen.

5. Ifop-Fiducial pour Le Figaro Magazine et Sud Radio publié mercredi 11 décembre 2024.

6. E. Musk est devenu en 2024 l'homme le plus riche du monde avec une fortune estimée à 348 Md$ (plus de 10 fois le PIB du Sénégal, 2020). En l'espace d'un an, elle a augmenté de près de 130 Md$ (3 fois le PIB de la Tunisie, 2023). La fortune des cinq hommes les plus riches du monde est passée entre 2020 et 2023 de 405 milliards de dollars à 869 Md$, et celle des milliardaires a augmenté de 3 300 Md$, déplorait Oxfam (AFP, lundi 15 janvier 2024). Selon la banque suisse UBS, la richesse totale des milliardaires dans le monde a augmenté de 121% en 10 ans, passant de 6 300 Md$ à 14 000 milliards entre 2015 et 2024 (Les Echos, jeudi 05 décembre 2024). Est-ce bien raisonnable ?

7. Inversement, l'instabilité politique menace l'économie de graves dommages Lire «Instabilité politique, quelles conséquences sur les marchés?» Christian Saint-Etienne, Le Cercle des économistes, Lundi 09 décembre 2024.

8. Cf. Abdelhak Benelhadj : «La guerre du blé». Le Quotidien d'Oran, 28 juillet 2022.

9. Vieil aphorisme alsacien. Idiotisme intraduisible en français.