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Qui d’entre nous n’a jamais eu mal au niveau de son dos, et quelque fois son cou, à tel point que la bonne vieille formule de « Mal du siècle » connue depuis le début de nos études médicales, lui est toujours attribuée à ce jour par les différentes générations de médecins, tellement cette douleur a touché environ 80% des personnes d’une société tous âges confondus, au moins une fois dans leur vie et environ plus de 20% des adultes en souffrent de manière chronique ! Les causes sont nombreuses et parmi les plus incriminées nous retrouvons le rythme effréné qui nous est imposé dans les activités quotidiennes, notre mode de vie de plus en plus modernisé nous poussant à être de plus en plus sédentaire tel que travailler assis durant toute la journée devant un ordinateur, un bureau, rester dans un véhicule pendant de nombreuses heures ou sur des longs trajets, absence d’activités sportives régulières « d’entretien » de son organisme, manutentionner et soulever des charger lourdes, mauvaise exécution des mouvements et postures inadéquates , grossesse, changements hormonaux surtout chez les femmes, obésité, etc. qui ne sont nullement les alliés de notre colonne vertébrale, au contraire ! La douleur de la colonne est souvent associée à une irradiation soit le long du membre supérieur ou inférieur qui est le témoin de l’atteinte nerveuse. Nous débuterons notre étude par l’irradiation au niveau des membres inférieurs, la « sciatique » qui est en fait une douleur ressentie, généralement, au niveau de l’ensemble du membre inférieur allant de la fesse, la cuisse, le mollet et souvent jusqu’aux orteils ; quand elle est associée à une douleur lombaire ( lumbago ou lombalgie) elle est dénommée « lombosciatique » et est en rapport soit avec une compression, soit une irritation ( par une hernie discale ou de l’arthrose et parfois les deux simultanément) du nerf sciatique, au niveau de son émergence au niveau de la colonne vertébrale, qui, il faut le rappeler, est le plus long et le plus gros nerf de notre organisme. Dans près de 90% des cas, elle est due à une hernie discale lombaire au niveau des vertèbres L4, L5 ou S1, vertèbres qui supportent les pressions les plus importantes de notre colonne vertébrale, et qui consiste en un glissement, en partie ou en totalité, du disque intervertébral, hors de ses limites anatomiques normales, dans le canal rachidien pour venir en contact avec l’une des racines nerveuses formant le nerf sciatique ; les autres causes peuvent être l’arthrose vertébrale, le spondylolisthésis (glissement d’une vertèbre sur l’autre), le canal lombaire étroit, un traumatisme isolé ou microtraumatismes répétés (accidents sportifs, domestiques ou autres), une maladie inflammatoire (spondylarthrite ankylosante, polyarthrite rhumatoïde), une infection (spondylodiscite) ou une tumeur du nerf (Neurinome) ou osseuse. Archives personnelles Quoi qu’il en soit, il s’agit d’une douleur très souvent intense, invalidante, associée à des troubles de la sensibilité (diminution de la sensibilité, fourmillements), des troubles de la force musculaire avec faiblesse (début de paralysie) et des troubles des fonctions sphinctériennes (défaut de contrôle des urines ou de la défécation). Dans 08% des cas, la hernie discale est cervicale et son mécanisme identique, mais la douleur concerne le cou, les épaules et le long des bras et des avant-bras réalisant un tableau de ce que nous appelons une « névralgie cervico-brachiale », qui pourrait être assimilée à une « sciatique des membres supérieurs » ! Rappel anatomique : La colonne vertébrale est une importante structure osseuse de notre squelette qui relie le crâne au bassin ; elle est composée de 24 vertèbres libres (07 cervicales, 12 dorsales et 05 lombaires) et 09 vertèbres soudées entre elles (05 au niveau du Sacrum et 04 du Coccyx). Son rôle essentiel est comparable à celui d’un pilier qui doit supporter les pressions de l’ensemble des organes existants au niveau du thorax, de l’abdomen et du crâne et aussi de nous donner l’aspect vertical qui caractérise l’être humain ainsi que de participer à la continuation du système nerveux en dehors du crâne. Chaque vertèbre est constituée d’un corps vertébral, en avant, et, de ce que nous appelons, un arc postérieur, en arrière, formant un trou au centre dénommé « trou rachidien » ; l’empilement des 24 vertèbres et de leur trou respectif, l’une sur l’autre va donner naissance à un canal, le canal rachidien dans lequel va se loger la moelle épinière, qui se termine au niveau des vertèbres lombaires L1-L2 et les nerfs qui se continuent plus bas jusqu’au Sacrum pour former la queue de cheval ! Entre chaque vertèbre, il y a un disque qui va donner toute la souplesse nécessaire à notre colonne vertébrale et permettre d’amortir tous les chocs que nous pourrons rencontrer dans notre vie quotidienne ; d’autres structures légèrement en arrière et latéralement, les apophyses articulaires postérieures viennent compléter cette « biomécanique » et enrichir cette souplesse, sans oublier l’ensemble de la musculature péri-vertébrale présente sur toute sa hauteur à la manière d’un haubanage comme le système de fixation par câbles que nous retrouvons autour des mats des bateaux à voile notamment. Entre chaque vertèbre et de part et d’autre émergent les nerfs, l’un à droite et l’autre à gauche à travers des trous, les trous de conjugaison qui ressemblent à des « tunnels » délimités par le disque, les apophyses articulaires et les pédicules. Ces nerfs, ou racines nerveuses, que nous pouvons assimiler à de véritables « câbles électriques », assurent la sensibilité et la motricité de territoires bien définis et bien systématisés. Avec le vieillissement naturel, le disque va se déshydrater (s’assécher), perdre sa souplesse, se fissurer et s’écraser progressivement et par voie de conséquence perdre son rôle d’amortisseur et donner naissance à ce que nous appelons la discopathie laquelle sera à l’origine des douleurs chroniques soit lombaires, soit cervicales nécessitant très souvent une prise en charge médicale au long court et imposant souvent aux patients de consulter auprès de nombreux confrères généralistes, rhumatologues, orthopédistes, neurophysiologistes, rééducateurs et neurochirurgiens. Traitement : En dehors des situations d’urgence, c’est-à-dire quand il s’agit : - d’une douleur hyperalgique rendant le malade quasi grabataire, ne pouvant ni se lever, ni marcher et ne répondant pas du tout aux différents traitements médicamenteux même aux morphinomimétiques, - d’une sciatique paralysante avec déficit neurologique, - de la présence de troubles sphinctériens (soit rétention ou incontinence urinaire et/ou anale, impuissance…), une intervention neurochirurgicale urgente est indiquée, je tiens à rappeler que 80 à 85% des patients porteurs d’une hernie discale ne nécessitent pas d’intervention chirurgicale ! En dehors de ces situations, il s’agit d’une affection mécanique, certes responsable d’une douleur neurologique souvent insupportable, dans laquelle le traitement médical, comprenant, entre autres, une part importante qui incombe, et impose, aux patients de se prendre en charge en adoptant une hygiène de vie saine et stricte sans efforts physiques ni station debout prolongée, permet de guérir la douleur en 04 à 06 semaines, suivie, une fois l’accalmie obtenue, de la pratique d’une activité sportive d’entretien, adaptée et régulière telle que la natation, ou autre sport qui permettra le renforcement de la musculature lombaire et abdominale et par voie de conséquence aboutir à une perte de poids en brûlant les graisses le plus naturellement que possible !! Bien entendu, des médicaments anti-inflammatoires seront prescrits, des infiltrations aussi par certains collègues, une physiothérapie comprenant un traitement local au niveau de la partie de la colonne vertébrale concernée (infrarouge, massages superficiels, etc.). Des cures thermales seront bénéfiques pour certains patients. Au terme de ce véritable « programme thérapeutique » et une fois la « crise douloureuse » passée, généralement la hernie se résorbe, la compression du nerf disparaît, et la guérison est obtenue. Néanmoins, dans certains cas une douleur légère, supportable, épisodique peut persister au-delà des 06 à 08 mois, parfois un peu plus ; elle peut être handicapante au sens social du terme et responsable d’une baisse du rendement professionnel, et souvent avoir un retentissement psychologique négatif au moyen et long terme ! Et étant donné qu’il s’agit d’une douleur difficilement quantifiable objectivement, alors à ce moment-là, et en dernier recours, une intervention sera proposée par le neurochirurgien qui exposera les différentes techniques chirurgicales existantes, procédera à un consentement éclairé du patient. Chirurgie Le principe de base de cette chirurgie est de libérer le nerf comprimé, qui n’a pas pu l’être par les moyens médicaux, en procédant à l’ablation du fragment discal hernié conflictuel quelque fois associé à des processus ostéophytiques retrouvés dans les discopathies chroniques, réalisant une compression disco-ostéophytique ! Les différentes techniques chirurgicales ont nettement évolué depuis ces 30 dernières années vers les nouvelles techniques de moins en moins agressives comme ce fut le cas pour la gynécologie, au tout début, suivie de la chirurgie digestive, coelioscopie suivie par la cœliochirurgie, la neurochirurgie, de son côté et du fait de sa spécificité particulière, a aussi développé des méthodes opératoires dites « moins invasives », à tel point que le terme de chirurgie mini-invasive, ou mini-invasive surgery (MIS) a enrichi le vocabulaire technique des chirurgiens et que la chirurgie du rachis a connu un essor important et est devenue un domaine d’expertise particulier en s’imposant comme une méthode de référence apportant au patient un confort post-opératoire jusque-là inconnu. Trois types de techniques sont proposés : - la technique « conventionnelle », que nous appelons « abord interlamaire », bien codifiée et nécessitant une incision de 05 cm, a nettement été améliorée par les neurochirurgiens ces dernières années en procédant à des améliorations techniques visant à diminuer les manipulations musculaires, ligamentaires et osseuses ; elle dure 40 à 60 minutes et impose une hospitalisation moyenne de 02 jours. C’est la plus utilisée car la mieux maîtrisée par l’ensemble de la communauté neurochirurgicale. Le pourcentage de réussite est de 95% et les patients, après une période de convalescence de 30 jours et une prise en charge par médecin rééducateur durant le second mois post-opératoire, peuvent reprendre une activité professionnelle et même sportive à partir du 3ème mois ! - la microchirurgie, quant à elle, se pratique avec l’aide d’un microscope opératoire qui est un équipement sophistiqué, onéreux dont certains ne peuvent pas se permettre de l’acquérir. - la chirurgie endoscopique, qui est devenue le « gold standard » nécessite un équipement spécifique ainsi qu’une maîtrise parfaite. Statistiquement, il faut savoir qu’il n’existe aucune différence significative entre ces techniques, les résultats sur la disparition de la douleur étant comparables entre elles ; aucune technique n’est supérieure à l’autre ; néanmoins ces techniques moins agressives diminuent nettement la durée d’hospitalisation (01 jour) et les douleurs post-opératoires par rapport aux techniques traditionnelles ! Conclusion : Dans ce bref exposé, nous avons décidé d’aborder le sujet d’une pathologie assez fréquente comportant des impacts socio-économiques importants qu’est la hernie discale ainsi que sa prise en charge qui est essentiellement médicale dans plus de 80% des cas, et que sa chirurgie, bien codifiée et bien maîtrisée en Algérie, permet d’obtenir 95% de taux de réussite avec des reprises, encadrées, des activités professionnelles et même sportives tout à fait normales ! *Professeur. Retraité - (Ex-Médecin-chef de service Neurochirurgie -CHUO- Oran |