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L'usurpation d'identité est un délit passible des
tribunaux, mais il existe deux autres formes d'usurpation d'identité
non-prohibées par la loi. (Les deux premières, même si elles sont de natures
très distinctes, fourvoient l'individu dans le mensonge et la tricherie au
sujet de lui-même, alors que la troisième le libère et le prolonge au-delà de
ses limites.) La première forme d'usurpation d'identité, la plus commune, est celle
qui consiste à se faire passer pour un autre afin d'en tirer un avantage
quelconque auquel on n'a pas droit. Pour illustrer cette forme d'escroquerie à
l'identité, on peut citer, par exemple, ces loustics qui, sur les réseaux
sociaux, se font un malin plaisir à créer des profils malveillants pour tromper
ou arnaquer leurs interlocuteurs un peu trop crédules.
La deuxième forme d'usurpation d'identité, tout aussi dangereuse que la première, réside dans le fait de prétendre être bien meilleur que ce que l'on est réellement et s'attribuer des qualités, des vertus et des mérites dont personne n'a jamais entendu parler et dont on est le seul à témoigner. Chacun de nous a rencontré, au moins une fois dans sa vie, ce type d'hurluberlus qui se prennent pour Tarzan, Moh-La-Science ou la religion personnifiée. On peut alors parler, dans ces cas-là, de mythomanie mais aussi d'êtres humains qui sont dupes sur eux-mêmes et qui refusent de se regarder en face, avec leurs qualités mais aussi leurs défauts. La troisième forme d'usurpation d'identité, la plus belle qui puisse exister, c'est celle qu'autorise la littérature (ou la lecture) et elle permet de vivre mille vies et revêtir mille visages différents à travers les personnages des livres que l'on écrit (ou qu'on lit). C'est dans ce sens-là, entre autres, qu'on peut interpréter la fameuse formule du poète Arthur Rimbaud, «Je est un autre». |
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