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La pratique du
lobbying s'institutionnalise depuis des dizaines d'années dans le sillon des
institutions. L'Algérie est devenue un centre lobbying.
Alors que cette pratique s'impose dans les sociétés y compris dans les démocraties occidentales, ses avantages et la façon dont elle est menée demeurent très flous. Des voix se font entendre pour en révéler les limites, et s'y opposent en contrant l'influence des grands groupes d'intérêts privés par une prise de conscience citoyenne et une pratique de contre-lobbying citoyen qui vise à mettre en avant les intérêts communs à la société dans les débats politiques. Le lobby est un terme anglais apparu dans les années 1830 et utilisé dans un cadre strictement politique, signifiant littéralement vestibule ou couloir. Il désignait les couloirs de la Chambre des Communes britanniques, où les membres des groupes de pression pouvaient venir discuter avec les membres de Parlement. Le lobby désigne un réseau de personnes qui s'est constitué pour défendre les intérêts d'une certaine partie de la population auprès des instances de pouvoir et influencer les preneurs de décision. C'est le plus souvent un groupe d'influence à but lucratif qui représente des intérêts privés. Cette influence ou pression politique n'est pas nouvelle, en revanche, elle a subi de fortes mutations en se développant et en s'institutionnalisant. L'Algérie n'est pas exempte de ce phénomène. En pratique politique, Ce sont des sociétés secrètes qui agissent dans l'ombre, ou viennent soudoyer les personnalités politiques au moment des prises de décisions. Les lobbies sont admis en politique même s'ilsn'ont le droit de siéger, et le droit de s'exprimer. Ils utilisent divers moyens comme le démarchage, la médiatisation, la participation à des concertations, les contacts avec les personnalités politiques, le financement de campagne politique etc. Ces groupes sont définis comme une entité organisée qui cherche à influencer les pouvoirs publics et les processus politiques dans un sens favorable à leurs intérêts en participant ou non à la compétition électorale. Les lobbies sont donc des représentants d'intérêts privés qui ne se soumettent pas au système de la démocratie électorale. Ils peuvent donc intervenir directement auprès des représentants politiques et des sphères de pouvoir sans rendre de comptes à la population. Tous les avis vont dans le même sens que ce n'est pas un bon moyen pour faire connaître les intérêts de la population mais une intervention , sans fin, des grands pouvoirs économiques pour influencer les décisions politiques en leur faveur et que cette situation favorise nécessairement les grandes entreprises privées par rapport aux groupes minoritaires ou aux associations. C'est d'autant plus vrai dans un système économique fondé sur un écart grandissant dans la distribution des richesses. Il n'y a donc pas de légitimité d'une prise de décision influencée par un petit nombre de personnes dans leurs propres intérêts sans consultation préalable du reste des citoyens. Les instances publiques doivent, en toute logique, être indépendantes pour que la démocratie fonctionne, c'est-à-dire, ne pas dépendre d'un groupe social ou économique particulier, ne pas reposer sur lui, ni ne lui être favorable parce qu'il a de bons arguments ou qu'il influence les décisions politiques de toutes autres manières. Les lobbies qui défendent des intérêts privés n'ont pas pour objectif de penser la meilleure décision politique possible pour la population en générale, mais seulement pour un groupe restreint d'individus, et cette interférence peut aller à l'encontre de ce qui serait le meilleur pour le reste de la population. Les exemples ne manquent plus pour exposer le danger du lobbying sur la nation et ses intérêts supérieurs. La place des lobbies dans le processus décisionnel démocratique est difficile à déterminer ou même à chiffrer, les lobbies procédant par différentes méthodes et à différentes étapes du processus décisionnel démocratique : élaboration de listes électorales, vote et interprétation des lois. Cependant, vu leurs nombres et la multiplication des scandales de conflits d'intérêts, on peut considérer qu'ils ont un impact considérable sur la prise de décision des lois qui régissent nos vies. Cet impact peut prendre différentes formes allant de l'annulation pure et simple d'un projet de loi, à un retardement ou une modification de ce dernier, en passant par un argumentaire qui vient peser dans la prise de décision même s'il n'obtient pas gain de cause. Qui gouverne ? Les groupes d'intérêts ou l'état institution ? Au cœur de crise politique ou économique, notre incapacité collective à répondre à cette question élémentaire, parait très difficile. Premièrement, la décision politique et les choix économiques dépendent largement de l'apport des lobbyistes dans la phase préparatoire à la prise de décision, notamment parce que les règlements sont souvent très techniques et qu'il n'existe pas d'expertise indépendante disponible. Deuxièmement, une proche collaboration avec les lobbyistes permet également de faire des propositions qui sont déjà approuvées par de puissants intérêts économiques. En dernier ressort, ce sont les décideurs politiques qui échouent à contenir l'influence du monde des affaires qui sont responsables de cette situation. Le problème va même plus loin : un nombre conséquent de parlementaires pensent que leur tâche consiste à faciliter les relations entre le monde des affaires et les institutions étatiques. Toutes les grandes entreprises ont compris depuis longtemps que dépenser de l'argent dans le lobbying était un investissement très lucratif : participer à l'élaboration des lois et règlements procure de formidables bénéfices, ce qui explique le boom financier du lobbying. Tout un secteur florissant de faux consultants, s'est développé pour soutenir les entreprises généreuses. Les courtiers font du lobbying, financent des conférences : ainsi s'organise concrètement la mainmise du grand capital sur les instances dirigeantes de l'état. La domination de l'industrie du lobbying est rendue possible par l'absence d'un authentique débat alimenté par un examen réel de la prise de décision d'une part, par l'absence du haut-degré d'engagement civique requis pour la création de contre-pouvoirs dans la société civile d'autre part. Quand le pouvoir de décisionest transféré au monde des affaires, celui-ci s'est tout de suite engouffré dans la brèche et a pris une avance définitive sur la société civile et l'élite qui ne compenseront de toute façon jamais ce déficit de débat public national authentique. Ces groupes d'intérêts se sont institutionnalisées sous plusieurs formes : entreprises géantes, hommes d'affaires et autres. Le pouvoir a besoin d'être reconnu pour s'exercer durablement, sinon il s'épuise dans la corruption et la mauvaise gestion. Qu'est-ce-qui distingue un gouvernement d'une bande de voleurs ? Derrière, il y a toujours l'idée de référence. On ne reconnait le pouvoir que s'il se réfère à un sens auquel tout le monde adhère. La technique juridique confère au pouvoir une raison et l'installe dans une légitimité. Inventé par l'Occident, l'Etat repose sur la croyance en un Être immortel et tout-puissant. Le pouvoir a été placé chez nous sous l'égide de la souveraineté du peuple qui ne meurt jamais et qui se régénère sans cesse. La raison du pouvoir n'est plus dans une instance souveraine transcendant la société, mais dans des règles de fonctionnement inhérentes à celle-ci. La question du pouvoir ne se pose plus alors en termes de gouvernement souverain, mais de gouvernance efficace. |
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