Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

La poste se met à l'arabe

par Ahmed Farrah

La décision d'Algérie Poste d'arabiser les écritures grand public a fait réagir la blogosphère algérienne sur les réseaux sociaux. Les internautes sont largement partagés sur cette mesure qui paraît une belle victoire pour les inconditionnels du conservatisme, mais pas pour d'autres qui la voient populiste et déviant les regards des vraies attentes comme la qualité des prestations de service qui reste en deçà de ce qui est attendu d'un pays comme l'Algérie traînant loin derrière les grands. La radicalité de telles décisions ne fait que lever le voile sur la polarisation de la société algérienne et sur le repli des uns et le rejet des autres. Les pays qui se développent sont ceux qui s'ouvrent sur le monde et réussissent à être attractifs pour les étrangers tout en sachant garder leurs élites. Le vrai problème du pays n'est ni le français, ni l'arabe, ni l'amazighe, mais plutôt le sous-développement mental qui plombe les esprits et bafoue le mérite. Au lieu d'arabiser ce qui l'est déjà, il fallait partir en guerre contre la crasse mentale et physique qui a fait disparaître de nos villes et villages le jeune facteur à vélo ou à pieds, bien rasé et parfumé, casquette couvrant la tête, sacoche sous la cape noire en hiver, chemisette et cravate en été et costume pendant la demi-saison, n'oubliant jamais le bonjour et le sourire toujours aux lèvres.

Il y a à peine 50 ans, la population chinoise était des plus démunie et affamée dans le monde. La Chine est maintenant la deuxième puissance économique du monde grâce à la clairvoyance d'un grand dirigeant, Deng Xiaoping, qui avait su balayer tout ce qui pouvait être idéologiquement un frein au développement de son pays. Son réalisme a donné ses fruits puisque c'est à partir de sa politique que la Chine s'est réveillée, émancipée et fait trembler le monde. Aujourd'hui, ce géant mondial maîtrise les technologies de pointe et va à la conquête spatiale. Sa langue, le mandarin -la plus parlée dans le monde avant l'anglais- est utilisée dans ses universités, parmi les plus performantes de la planète, desquelles sortent des génies ayant réalisé pour leur pays sa souveraineté numérique. Ce pays vend au monde entier ses serveurs et ses équipements d'internet et de télécommunication et possède son propre moteur de recherche, ses propres réseaux sociaux et ses antivirus? Désormais le Chinois n'a pas besoins d'utiliser Google, Facebook, Twitter, Youtube? il a ce qui lui faut et dans sa langue.

Voilà un bel exemple prouvant que la langue n'est finalement qu'un outil au service du développement, mais si un peuple a l'esprit cadenassé, allongé sur le dos, les yeux fixés au ciel, l'intestin relié au puits de pétrole, même s'il parlait toutes les langues du monde cela ne l'avancerait pas plus loin que le bout de son nez.