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L'Algérie
est devenue aux yeux des Occidentaux une énigme politique au point où aucun
média n'arrive à y porter une analyse sérieuse, un regard considéré. Seuls les
scandales de corruption ou l'état de santé du président ont droit à quelques
filets dans les médias.
Doucement, discrètement l'Algérie glisse en marge de l'actualité dans les médias européens. Sans bruit, elle s'installe dans le confort d'un pays sans souci majeur, excepté les apparitions occasionnelles, brusques et soudaines de quelques personnages du sérail du pouvoir qui relèvent souvent de l'anecdote politique qui amuse le monde des médias et celui, missions obligent, des chancelleries occidentales et étrangères domiciliées sur le sol européen. Quand il n'intrigue pas, notre pays devient ennuyeux. Pas par manque d'énergie et d'ambition, mais par le poids de la répétition des événements, les mêmes jusqu'à satiété: santé du président de la république stressante pour nous et les autres, scandales de corruption jusqu'à une échelle étatique, classement au bas des tableaux internationaux du savoir et de la connaissance, addiction maladive aux seules hydrocarbures comme richesse nationale, confusion des croyances sacrées et de la superstition, recul des libertés démocratiques, tant d'événements et de maux qui façonnent en grande partie le débat politique national répercuté par des médias nationaux malgré eux et qui alimentent l'opinion publique et les débats dans les cafés, bars et hammams. Comme si autant de «spasmes» politiques nationaux ne suffisent pas, des gourous autoproclamés gardiens du temple Algérie avertissent de la menace de la «main de l'étranger»: nous avons donc tant d'ennemis qui nous en veulent. Pourquoi? Qui? Avons- nous dérangé, menacé, agressé quelqu'un quelque part ? Le pétrole disent certains. Mais pourquoi nos ennemis supposés se risqueraient-ils jusque chez nous pour en profiter? Ils le font sur le marché international en balisant son prix selon les yoyos des places boursières et les humeurs des grands trusts et multinationales qui activent dans le domaine. Pourquoi se félicite-t-on lorsque notre compagnie pétrolière Sonatrach décroche des marchés de prospection ou de partenariat en Jordanie, en Mauritanie ou ailleurs et crions au loup lorsque Total ou B.P prospectent chez nous? Et la France avec qui le divorce ne semble pas être consommé totalement et avec laquelle un bon nombre de ceux qui monopolisent les rennes du pouvoir entretiennent encore un concubinage éclaboussé souvent par des scandales retentissant chez nous et qui évacuent toute autre préoccupation ou urgence nationale. Il n'est plus question que d'appartements dans les quartiers chics de la capitale française, de progéniture de la nomenklatura dans les grandes écoles et universités, de comptes bancaires cachés à Genève, à Washington, au Panama ou ailleurs. Sujets d'intérêt national par la force des choses et la soif de justice, sujets de faits divers sans gros intérêts en Europe et ailleurs. Doucement, inlassablement la chasse aux sorcières est la multiplication des scandales de corruption sont devenues, malgré nous, notre sport politique et médiatique national. Quelle aubaine pour les tuteurs autoproclamés du pays qui ajoutent un brin d'herbe pour épicer ces agapes nationales jusqu'à l'étourdissement national: le FLN de Saadani contre le RND de Ouyahyia. Le TAJ de Ghoul avec les deux et Louisa Hanoun , le FFS et le RCD contre tous. D'autres partis ne savent même pas où ils sont et ce qu'ils veulent. Et toute cette bagarre dans le même Parlement dont la majorité des Algériens s'amuse et traite de mille noms d'oiseaux. Talaie El Houriat de Benflis s'installe dans une attitude fixe, hanté par le»Système» plus que par le jeu des personnages de la comédie du pouvoir. Le peuple écoute, regarde, lit la presse et retourne chez lui et à ses préoccupations quotidiennes, répétitives elles aussi: travail quand il en a un, prix de la nourriture, écoles pour les enfants et pour les jeunes dossiers pour un logement social, participatif, promotionnel, coopératif... les formules pullulent. Les chômeurs jeunes et jusqu'aux quadragénaires tentent des prêts bancaires Ansej et juste au dessus les quinquagénaires savourent déjà la quiétude de la retraite. Tant d'acquis et le peuple cherche encore un sens à la vie et à sa vie. Ya un problème. Les européens nous observent à de rares occasions avec une curiosité non cachée et parlent de nous lorsqu'ils nous arrive de marquer l'actualité par un événement particulier: passer le 1er tour de la coupe du monde de football en rivalisant avec les meilleures équipes du tournoi, une mobilisation exemplaire lors des élections à tous les niveaux que nous nous empressons de dénoncer, un président de la république grandement malade régulièrement évacué vers des hôpitaux étrangers, une levée de boucliers contre un prix littéraire attribué par la France pour un écrivain algérien...Puis rien, l'Algérie disparait de l'actualité européenne et internationale. Nous nous retrouvons entre nous à ruminer sur les mêmes sujets à satiété: Khellil et la justice, Khellil et les zaouias, la maladie du président, Ouyahia, Saadani, Ghoul, les tentatives d'alliance de l'opposition, la liberté de la presse et l'angoissante menace étrangère. Pertinente ou pas, nécessaire ou pas, vraie ou fausse notre actualité nationale est prise dans ce vertige que rien ne semble arrêter. Cela donne le tournis à tout le monde. Responsables politiques, gouvernants, journalistes politiques, universitaires engagés et autres acteurs de la vie sociale s'interrogent comment sortir le pays de ce vertige national sans y parvenir. Inlassablement , chaque jour et chaque semaine un nouveau scandale de corruption, une affaire d'abus de bien sociaux, une phrase violente d'un responsable politique contre un autre, une émeute quelque part pour réclamer des routes ou de l'eau courante, des harragas interceptés en haute mer, un revendication, un grève, un fait divers exceptionnel nous rattrapent, plombent l'actualité, désaxent le sens de la politique du pays et brouillent encore plus notre vision de la route qui nous attend , route combien ardue et difficile ! Qu'il est loin le temps du rêve collectif, des révolutions agraire et industrielle, de la performance de l'école algérienne et du prestige de ses universités, de l'Algérie au centre de l'actualité mondiale, respectée, admirée, jalousée jusqu'à être surnommée la «Mecque des révolutions» ( Amilcar Cabral)! Qu'il est loin cet algérien passant les frontières étrangères sous le regard respectueux des douaniers. Et ironie du sort, sans un prix du pétrole beaucoup moins appréciable qu'aujourd'hui et avec moins de volume de production. Ce pays si jeune avec peu de moyens forçait l'admiration parce qu'il avait un sens et comptait sur ses propres forces. Il faisait régulièrement les «Unes» des médias étrangers avec admiration. Aujourd'hui, notre pays ne les intéresse que par les scandales et les prémonitions funestes que nous alimentons nous mêmes, comme cette présente chronique. Malgré nous, hélas. |
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