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La chronique de
Nicolas Baverez, éditorialiste du quotidien «Le Figaro» rappelle cette évidence
répétée et ressassée, chez-nous, jusqu'à satiété, depuis les années 80, à
savoir que la chute de la valeur du pétrole entraîne dans son sillage des pays
qui ont construit un modèle économique fondé sur la rente pétrolière. «Le
pétrole, dit-il, a perdu 75% de sa valeur, soit un transfert de 3% du PIB
mondial des pays producteurs vers les consommateurs».
Cela veut dire que ce mouvement reste favorable à la croissance en faisant très schématiquement, 6 milliards de gagnants pour 1,2 milliards de perdants. À l'exception des États-Unis qui bénéficient de la vitalité de leur économie et de leur société, ou de la Norvège, adossée aux 730 milliards d'euros de placements de son fonds souverain, la plupart des grands pays producteurs et l'Algérie bien sûr, se sont enfermés dans une situation insoutenable. Ils se sont embourbés dans une économie de rente, ayant généré une culture de la corruption avec, plus particulièrement chez-nous, la facilité d'achat de la paix sociale par des transferts de subventions, financés par les recettes gazières et pétrolières. Si les prix du pétrole ont perdu, énormément, de leur valeur depuis la mi-2014 et que la chute s'accentue, c'est parce que l'OPEP a décidé de maintenir sa production inchangée, malgré la surabondance d'offre. Cette offre excessive est due notamment, au retour du pétrole iranien sur le marché, suite à la levée des sanctions occidentales. Malgré cette surproduction qui fait baisser les prix, l'OPEP n'a pas annoncé de réduction. Bien au contraire, l'objectif fixé de 30 millions, est passé à 32 millions de barils par jour. Cette action vise à faire baisser les cours, afin dit-on, de contrer le gaz de schiste américain et faire face à cette concurrence. Ces voix alarmistes qui s'agitent telles des marionnettes ! Le décor est ainsi planté, pour dire que nous sommes effectivement bien dans la difficulté, et peut-être pour longtemps, faut-il le craindre, ne plaise à Dieu ! Tout dépendra du rapport de force engagé ! Mais pour autant, sommes-nous dans le besoin d'entendre des voix alarmistes - utilisées en caisses de résonance, par les médias français - en rajouter à notre « sinistrose » ambiante qui angoissent et stressent des centaines de milliers de pères et mères de famille, inquiets dès à présent, par rapport à la cherté de la vie qui ira, certainement crescendo, et par rapport aux perspectives d'avenir pour leur progéniture ? C'est ainsi que juste pour la publicité autour de son roman de fiction, écrit dans le style du politiquement correct, c'est-à-dire ce que veulent entendre les faiseurs d'opinions des médias français, notre compatriote Boualem Sansal, accrédité par « Le Figaro » du titre pompeux de grand écrivain - ce à quoi l'authentique écrivain Mohamed Dib, auteur de la trilogie n'a pas eu droit -, et en « Nostradamus des temps modernes », nous prédit le chaos et un scénario à la syrienne, impacté, bien évidemment, comme attendu, d'une fuite massive d'Algériens vers l'Europe ! C'en est trop, cette façon d'évoquer avec légèreté les choses qui fâchent, parce qu'ayant un rapport direct à notre honneur et à notre dignité d'une société fragilisée par les difficultés de la vie quotidienne, mais aussi, par les nombreux maux qui la gangrènent ! Il est vrai que cette culture de la « sinistrose » plaît à ceux qui l'invitent, lui et ses semblables, déjà assez nombreux, sur leurs plateaux de « Télé » ! Cette façon d'écrire a, par contre, chez-nous, l'effet d'un « poison insidieux » qui porte atteinte au moral de toute une nation qui broie du noir, en attendant des jours meilleurs, pour peu qu'elle ait été entachée d'un soupçon d'honnêteté ! Procéder de la sorte, équivaut à laisser des traces négatives, auprès d'une société qui peine à se mobiliser, même s'il ne s'agit- là que d'une fiction. Ce qui n'est pas anodin, c'est que « Le péril algérien » même juste fantasmé, est aussi, une manière de faire peur aux Européens et faire gagner des voix aux partis de tendance « nationale-populiste ». Cela peut induire un accru d'animosité à l'égard de nos compatriotes, en France, tout particulièrement, alors que nous dira l'auteur : « mais ce n'est là qu'un roman » ! Quand on n'est pas une force de propositions de nature à contribution à la sortie de crise de son pays, pour peu que vous le considérez comme tel, on doit avoir, au moins, la décence de se taire ! Ceci étant dit d'une manière générale, et c'est valable pour toutes les composantes de notre société ! Sinon, nous sommes en droit de vous poser cette question : « de quel côté êtes-vous » ? L'Algérie a besoin, aujourd'hui, de savoir : « qui est qui », pour aller de l'avant ? C'est si important pour la mesure de ses forces ! Alors que Dieu nous préserve de ce scénario diabolique que vous nous avez concocté, dans le délire de votre imaginaire, à partir de l'Hexagone ! Notre pays a trop souffert durant la décennie noire, pour avoir à vivre, à nouveau, une situation aussi dramatique, sinon plus ! C'est là une sous-estimation des capacités intrinsèques et de l'intelligence de tout un peuple, pour peu que la « cancrocratie » soit déménagée, pour laisser place à une élite faite de femmes et d'hommes compétents, marqués du sceau de l'honnêteté, de la probité et du devoir. Cette ressource humaine est disponible, et l'heure n'est pas aux pleureuses d'une peine qui n'est pas la leur, ni aux propos « attristés » des « sous-traitants » des médias français, que notre sort attriste ! Voyez-vous çà ! Nous vous aurions pris au sérieux si vous aviez dit tout simplement : « Si nous en sommes là, c'est que nous n'avons pas su prendre de la hauteur pour voir loin » ! Alors ! Comme disent ces proverbes chinois qui s'appliquent parfaitement à nous, « celui qui ne sait pas où il va, va forcément à côté, car il n'est de vent favorable qu'à celui qui sait où aller » ! Ils nous disent aussi : « Toutes les fleurs de l'avenir sont dans les semences d'aujourd'hui » et « Avec le temps et la patience, la feuille du mûrier devient de la soie » ! Mais qu'avons-nous fait pour que cela soit ainsi ? Certainement rien ou tout au moins, pas grande chose, mais c'est là l'affaire de tout un peuple ! Voilà ce que j'avais dit, avec la douceur empruntée à la sagesse de la philosophie morale et politique de Confucius, dans mon article « y aura-t-il un réveil possible pour la cigale Algérie », publié dans ?Le Quotidien d'Oran', en date du jeudi 14 mai 2015. Si j'ai emprunté cette voie de la philosophie chinoise, c'est parce que je considère qu'il n'y a point de gloire à vouloir tirer profit intellectuel de la détresse attendue ou supposée d'un peuple ! C'est la faute de l'état providence ! C'est vrai que, par le passé et particulièrement depuis l'année 2000, nous avons vécu, au-dessus de nos moyens, parce que nos dirigeants ont emprunté la voie facile, celle de l'achat de la paix sociale, non pas la redynamisation, du secteur productif, mais par des subventions, tous azimuts. La « cigale Algérie » habituée à « chanter » et à « festoyer » sans faire outre mesure économie de sa dépense publique, semant à tout vent, les dividendes de sa rente pétrolière et gazière, a abusé de ses réserves et a tout donné à un peuple dont on voulait faire, cette « chose malléable » à défaut d'être remis sérieusement au travail, afin de ne rien devoir à l'État providence ! Si nous sommes, aujourd'hui, dans la situation de ce troupeau égaré, c'est que l'expérience a montré, que quelqu'un, à qui on a tout donné dès son enfance, échoue le plus souvent, parce qu'il est convaincu que tout est acquis par la facilité. Nos concitoyens ont vite fait de comprendre qu'il faut juste montrer ses muscles, non pas pour travailler, mais pour obtenir par la force, la chose désirée ! Par contre, celui à qui on a transmis le goût du travail laborieux, à qui on a expliqué que oui, il faut trimer pour réussir, celui-là s'en sortira et bien, tout en restant dans la légalité, sans transgresser les règles, les usages de courtoisie, de bienséance et par conséquent, de civilité ! Réussir dans la vie, c'est, donc, être conscient de cette chose importante que chacun de nous se doit de développer, à savoir : que toute réussite passe par la croyance en soi, sans avoir besoin d'emprunter la voie de la rapine, du détournement de la chose publique, du passe-droit, de la corruption et de toutes ses tares qui nous valent d'être classés dans le haut du tableau des États nuisibles pour leurs peuples ! Tout laisse croire que l'image de l'Algérien paresseux est une pure construction forgée par des esprits malins, suite à leur incapacité à le faire travailler, sans attendre de lui qu'il leur soit reconnaissant ! On a voulu en faire un être soumis et dépendant de l'État providence, comme est le drogué de son dealer ! Cette farce n'a que trop duré ! Finie l'ère de la gestion des affaires publiques par la malice, par la pénurie des denrées alimentaires, les chaînes devant les stations d'essence, la mercuriale des fruits et légumes et par la peur ! Le monde a changé et c'est l'intelligence, la probité, la moralité et la compétence qui priment sur les effets de foule et des meutes, qui sitôt sifflées accourent de la kasma d'à côté ! C'est dans ces valeurs universelles que s'inscrivent nos compatriotes qui ont montré qu'ils n'ont rien de paresseux, lorsque, mis dans cet environnement d'Outre-mer, qui favorise le travail et la créativité ! Ils sont des milliers à le démontrer chaque jour ! Alors qu'appréciés, ailleurs, ils sont craints chez-eux ! Quelle dommage que l'Algérie ne puisse compter sur cette ressource humaine qui devrait s'ajouter à celle qui la sert au quotidien, pour la porter vers des horizons du savoir et du progrès ! « L'Algérie pays émergent » à moyen terme n'est pas un canular ! Il faut juste faire en sorte que notre dynamique de développement puisse s'inscrire, en permanence, dans ce triptyque : « un pays, un peuple, un projet » porté par des femmes et des hommes intelligents qui ont foi en leurs capacités intrinsèques ! Appel aux forces de proposition ! Alors ! Trêve de plaisanteries, la parole devrait revenir aujourd'hui, aux acteurs avertis qui se distinguent du chœur habituel de celles et de ceux qui se cantonnent dans l'observation clinique et le constat, très souvent, désabusé, en laissant croire que la situation est sans issue. Il s'agit, en fait, d'optimiser l'utilisation des capacités intrinsèques, pour espérer faire tourner le pays, à plein régime. Il faut, donc, travailler dans le sens de cet objectif majeur, c'est-à-dire, dans le courant d'une nation déterminée à inscrire sa marche dans la voie du progrès et de la prospérité partagée, en tant que condition à l'émergence, d'une société solidaire et réconciliée avec elle-même. C'est là, tout simplement, une affaire de mobilisation, sans exclusive, de toutes les forces vives de la nation, de management, d'ingénierie territoriale et de gouvernance appropriés. Que celles et ceux qui ont quelque chose de sérieux à proposer, le fassent ! Pour ma part, je voudrais, au titre de ma contribution, mettre dans la corbeille de la « mariée » Algérie, quelques idées essentielles pour traiter de trois questions, au demeurant déjà évoquées dans des écrits précédents. Sécurité alimentaire : Au titre de cette préoccupation majeure, évoquée dans mon article « Du gaspillage de pain au minimum vital non garanti!» - cf. ?Le Quotidien d'Oran' du jeudi 11 juin 2015 -, il faut se le dire, honnêtement et sans subterfuge, un pays qui n'est pas en mesure d'assurer le couscous et le pain à sa population, sans concours extérieur, en céréales et viandes en provenance de France, du Canada, de l'Ukraine, du Brésil et de l'Argentine, est réellement en danger et sa survie relève, bien sûr, du domaine de l'aléatoire, le secteur agricole étant devenu, par la force des choses, une simple « centrale d'achat » de denrées alimentaires et d'intrants agricoles. Dans le domaine de la céréaliculture, l'on devrait être capable de réaliser de meilleures performances, à partir de l'irrigation d'appoint, durant la période de stress hydrique (mars-avril). Cela est possible grâce à l'effort colossal déployé en matière de réalisation d'infrastructures hydrauliques et de transfert envisagé, à partir de la nappe albienne, vers les Hauts-Plateaux. Il est possible d'apporter, dès le court terme, un appoint d'eau aux espaces céréaliers du Sersou, du Titteri, du Hodna, du Constantinois et de Guelma, tout en cherchant sa généralisation progressive à d'autres terroirs. Conjuguée à la maîtrise des différents itinéraires techniques, l'irrigation équivalente à 200 mm de pluie, devrait améliorer considérablement, les rendements et réduire notre dépendance en céréales. De même, porter le niveau des pertes aux champs lors des moissons, à 10% au lieu de 25%, équivaut à une économie de 3 à 4 millions de quintaux. Ce n'est là qu'une affaire de réglage de moissonneuses batteuses, de technicité, et donc de formation. De même, la résorption de la jachère évaluée à plus de 3 millions d'hectares, est, aussi, de nature à réduire notre dépendance, en légumes secs et à accroître nos capacités fourragères, en vue de la promotion de l'élevage bovin et de la production laitière. C'est là le minimum de ce qui est possible de faire, au moment où les autres sont déjà dans l'ère de l'agriculture en mode « Startup » ! Réduire le gaspillage du pain : Ce qu'il faut retenir, c'est que ni notre couscous, ni notre pain ne sont, totalement, assurés par la production nationale en blé dur et viande pour l'un, et en blé tendre pour l'autre. C'est là, une préoccupation majeure qu'il convient de placer au premier rang des risques qui menacent, durablement, notre entité nationale. Outre cette incapacité à assurer, par nous-mêmes, ce minimum vital, en dehors des légumes, nous gaspillons quotidiennement, environ 7 millions de baguettes de pain par jour - estimations du ministère du Commerce -, soit plus de 5 millions de quintaux de blé tendre par an, autrement dit, 6% de nos besoins estimés à 80 millions de quintaux. La raison principale de ce gaspillage coûteux et insupportable pour nous, tient au fait que nos boulangers ne détiennent pas le savoir-faire nécessaire à la fabrication d'un pain de qualité, pouvant se conserver, au-delà d'une journée. Cela veut dire que même si la subvention du pain est considérée, par certains, comme un acquis social, elle prend, de toute évidence, la signification d'une « prime au gaspillage », tant que sera négligée la formation de ce corps de métiers, à hauteur des standards internationaux. Faire des économies de matériaux de construction : Sitôt cédés, les logements font l'objet de réaménagements par leurs acquéreurs qui cherchent, tout naturellement, à les personnaliser. On commence par changer les portes et fenêtres, à abattre les murs de cloisons pour espérer agrandir le séjour ou la cuisine, en intégrant la loggia. On refait, ensuite, le parterre et le revêtement mural de la cuisine par la dalle de sol et la faïence du choix de la maîtresse de ces lieux. On finit par la peinture, après avoir dérangé ses voisins avec lesquels on rentre, dès le départ en conflit, tout au long de la durée des travaux qui peuvent s'étaler sur une période d'une année à deux. Cela nous donne, l'équivalent de 10 à 15% de matériaux ayant servi, à la construction, jetés par les fenêtres, le plus souvent sur des espaces verts, fraîchement, réceptionnés et de nombreuses journées d'absentéisme au travail, avec en sus, un surcoût construction qui grève le budget des ménages, lesquels finissent par s'endetter. Le résultat de ces dégâts équivaut à un gaspillage de 100 à 150.000 logements, sur un programme déjà réceptionné de 1.300.000 logements. Tout cela, est de la faute de ces commis de l'État qui ne font pas, correctement, leur travail de suivi des chantiers, parce que très souvent soudoyés par les promoteurs. Alors oui, il y a là matière à faire des économies substantielles, d'autant plus que l'on devrait rendre obligatoire, pour ce qui concerne les programmes étatiques, l'utilisation de matériaux locaux, pour favoriser la relance de l'emploi. Ces exemples sont là pour dire, que le chantier de reconstruction de la « maison Algérie », n'a de chance d'aboutir que s'il est accompagné d'une conscience collective, où chacun de nous devra apporter sa pierre à cet édifice qui doit nous rassembler et nous unir, en tant que nation convoitée et menacée, dans ses frontières originelles ! Notre devoir est donc, d'assumer, pleinement, notre destin du « vivre ensemble », en prenant option pour la construction d'un pays conforme aux seuls intérêts des générations futures et totalement inscrit dans les principes de l'égalité des chances et dans les préoccupations de son siècle ! Si tout cela est entrepris de bonne foi, l'on pourra dire, alors, qu'outre sa stabilité retrouvée, l'Algérie aura gagné en maturité, ce qui la prédisposera à s'inscrire, durablement, dans la voie du progrès et de la prospérité. Tel est mon vœu et telle est ma conviction ! * Professeur |
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