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Le curriculum ou le programme de l'enseignement /apprentissage dans nos écoles

par Ladjel Kherzat *

Le suivi de notre éducation depuis, voilà sensiblement 1970, l'école algérienne ne cesse de chuter de plus en plus pour être appelée par les uns «école sinistrée», par d'autres «fa'odha mentale»et par une troisième catégorie, «une école en déperdition»... Pourquoi, tant d'infamie à notre malheureuse école ? Or, nous savons que nos étudiants les mieux lotis et qui soient partis vers d'autres lieux se sont révélés de «meilleurs étalons» Pourquoi donc cette déconfiture attribuée à notre école, est -elle due aux programmes mal choisis ou est-elle due à d'autres éléments pédagogiques ou humains ? -(Le programme ou le curriculum (anglo-saxon)-

Dans l'histoire de la pédagogie ce mot " Curriculum " était lié au concept de " cursus de formation " suivi par un apprenant dans une institution d'enseignement. Ce concept " Curriculum " est un concept utilisé par la tradition anglo-saxon comme l'équivalent en français " programme d'études ". Cependant le paradigme " programme d'études " sous l'évolution du concept anglo-saxon " Curriculum " n'a pu se maintenir et a laissé place à ce dernier. Ce concept est utilisé universellement dans le cadre de la globalisation par la théorie pédagogique et par la sociologie de l'éducation. Cecilia Braslavsky parlait déjà en 1980 du " risque d'une épistémologie envahissante ". Elle expliquait que ce concept pourrait envahir toute l'éducation et prendre "la dimension du processus éducatif "

Rappelons que ce concept de curriculum rappelle le contrat existant entre les sociétés. Il faut encore noter le curriculum définit les questions suivantes : Pourquoi ?, Quoi ?, Quand ?, Où ?, comment ? et Avec qui apprendre ? Au tout début, de sa création, tout le monde pensait qu'il s'agissait d'un concept venant de certains experts tels que Benjamin Bloom, et Hilda Taba. Depuis et les travaux de Stenhouse, de nombreux chercheurs en éducation considèrent que le curriculum a deux dimension : il est à la fois politique et technique, car celui-ci lie, en fait, les buts de l'éducation et la réalité quotidienne de nos institutions, écoles, lycées, et universités. En somme, le curriculum renferme deux composantes, la première étant politique où la lutte idéologique sévit dans nos sociétés pour donner vie à l éducation. Comme ce sens est aussi donné par la culture du pays.

En général, le curriculum est un processus matériel qui est adopté par les autorités politico-éducatives. Or ces autorités sont des spécialistes ou des chercheurs ayant passé le reste de leur vie dans la recherche. En général, ce sont des sociologues, des psychologues, des linguistiques, des anthropologues?.. etc., sans compter des politiciens qui connaissent parfaitement la société et surtout le projet de société. Le curriculum éducatif est construit en fonction d'un statut de société et selon la chose culturelle que cette société voudrait atteindre, dans l'avenir.

Le statut de société et le curriculum :

Le statut de société permet à l'enfant d'évoluer en fonction des principes que la société lui offre et le construit en fonction des principes moraux que celle-ci voudrait qu'il le devienne. Dans une telle formation, selon le principe social, l'enfant n'aurait d'yeux que pour cette société et deviendrait quelqu'un qui accepterait le mode vie de cette société. Il sera capable de vivre en communauté avec les siens. C'est pourquoi, le curriculum de l'enseignement devrait être effectué par les spécialistes comme énumérés plus haut. En effet, les linguistes se chargeront du côté langue, les psychologues se chargeront de la réception et l'acceptation de la langue, les sociologues se chargeront de l'étude de la société, les enseignants, eux se chargeront de l'application de ce curriculum, ??etc.

C'est pourquoi, nous revendiquons les spécialistes pour que le curriculum de l'enseignement puisse durer dans le temps et dans l'espace, tout en remplissant ses fonctions évolutives quant à la formation de l'être humain.

C'est avec ses gens qui ont le doigté et la vision lointaine de ce que le politique voudrait avoir dans un proche avenir comme type d'Algérien, c'est - à -dire, découvrir au lointain une société capable d'être gérée comme il faut et protégée convenablement où il fait bon vivre. Nous sommes à la veille de reprendre entièrement les curricula de notre chère école, ne faudrait pas faire appel aux spécialistes tels que les linguistes, les psychologues, les anthropologues, les sociologues ??et les fins politiciens pour parvenir à la création d'un curriculum capable d'assurer une longévité à notre école doublée d'une efficacité digne des grandes nations. En effet, "le curriculum est la conception, l'organisation et la programmation des activités d'enseignement / apprentissage selon un parcours éducatif " désigné par la société. Depuis 1970, nous n'avons cessé de prévoir les différents changements aux programmes éducatifs dans l'espoir de les améliorer et leur donner une efficacité qui leur permettrait d'obtenir une longévité dépassant la vingtaine d'année. Mais hélas, ce travail est devenu un véritable "bricolage", non celui de scientifiques, mais un bricolage d'application effectué par des profanes.

(Donc, cessons de faire du bricolage, en invitant les enseignants et les syndicats pour réaliser un curriculum, juste capable de faire de nos enfants non des citoyens capables de réfléchir à la hauteur et à la mesure des autres pays avancés, mais des gens capables de demander de l'aide à d'autres personnes, en absence d'une réflexion réelle). L'intervention des enseignants serait, certes, souhaitable, mais uniquement dans un but spécifique, à savoir : chercher le moyen pédagogique pour pouvoir faciliter l'assimilation aux apprenants. Les enseignants pourraient certes combler certaines lacunes ou inventer des systèmes facilitateurs à l'apprenant, mais ne faudrait -il pas les acculer à remplacer les spécialistes à qui est le seul responsable devant la société. Les enseignants et leur syndicat ne peuvent se faire l'écho d'un projet d'école reflétant un projet de société, assurant à cette dernière la possibilité d'être à l'écoute de toutes les voix disséminées au travers d'elle.

Donc, qui doit préparer le curriculum et comment ? En général, c'est aux spécialistes de se référer à " un profil de sortie abstrait du candidat à la fin de sa scolarité ou selon un profil abstrait de nostalgique ", répondant à un passé des concepteurs. Les concepteurs peuvent aussi comme le signale Xavier ROEGIERS, le confier à un groupe d'experts associé parfois à des enseignants pour vérifier l'acceptation par des apprenants.

L'entrée du curriculum peut se faire par le biais des contenus, c'est-à-dire que la matière à enseigner est structurée selon les savoirs ou des concepts à acquérir doivent être organisés du simple vers le complexe, du facile au compliqué.

La seconde entrée se fera par le principe d'objectif, inspirée par la (P.P.O), alimentée par les travaux de Bloom. Dans cette entrée, nous verrons les différents types d'objectifs allant des visées générales, spécifiques et opérationnelles. Il est évident que ce travail a parfois été la source de morcellement de l'activité scolaire au regard des objectifs morcelés.

La troisième entrée dite par compétence ou intégration est peut-être, actuellement en Algérie, la seule préconisée dans nos établissements. Elle mobilise un ensemble de ressources : savoirs, des savoir-faire et des savoir-être pour la résolution de problème. En effet, ce phénomène oblige l'apprenant à la réflexion et l'oblige à la production d'actes communicatifs. Cette troisième entrée se réclame essentiellement appartenir à la théorie constructiviste en situant les savoirs dans la logique de l'expérimentation et du vécu de l'apprenant.

Nous remarquons qu'une telle activité relève de certains spécialistes et non des moindres pour être accomplie par des enseignants. Les enseignants sont, certes, des praticiens qui peuvent apporter leurs contributions sans plus. Tout compte fait ne doit -on pas penser qu'il est aberrant qu'un enseignant devant appliquer ces curricula soit celui qui les conçoit. Il nous semble que seuls les spécialistes sont en mesure de les concevoir et nous devons laisser à l'enseignant la possibilité de les appliquer, chose qui relève de ses prérogatives. Enfin, la politique éducative doit être cernée de telle sorte que l'école puisse former des gens capables de vivre en communauté sans distinction de race, ni de religion. C'est pourquoi, il est donc nécessaire de s'éloigner du bricolage que nous avons déjà eu et qui n'a apporté à notre chère école que des critiques souvent acerbes et inconvenantes. Aux premiers dires de son excellence Madame La Ministre, il semblerait qu'elle voudrait accomplir un travail durable et qui mènerait nos enfants vers une formation solide, capable de rivaliser avec les étudiants des pays les plus avancés dans le monde. Nous lui souhaitons donc du vrai courage pour parvenir aux résultats escomptés.

* Enseignant de langue Française, ex- inspecteur de l'éducation