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Le printemps algérien !

par Abdellatif Bousenane *

La presse nationale nous alerte tous les jours du danger et des risques grondants qui viennent de nos frontières, notamment celles du Sud-Est. Mais, ces risques, menacent-ils vraiment l'intégrité et la sécurité nationale ?

Cela nous amène à s'interroger sur l'impact réel du « printemps arabe» sur notre pays.

Après plus de 3 années passées sur l'événement le plus marquant de cette dernière décennie sur la scène arabe, l'Algérie semble de plus en plus résistante aux vents et marées des révoltes et coups d'états. Mieux encore, elle est devenue un acteur majeur et un pivot dans les médiations et les règlements de conflits dans la région. Notre pays est très sollicité, effectivement, par les pays occidentales comme les pays arabes et africains pour participer aux efforts consentis afin de trouver des solutions avenantes aux conflits qui nous entour. Le conflit malien, la crise politique tunisienne, le chaos libyen, la crise diplomatique entre le Qatar et l'Arabie Saoudite?etc. Ce qui est à mon sens un indicateur significatif sur la solidité de notre état et ce en quoi nous devons tous se réjouir et en être fiers.

Dire que ces révoltes dans les pays arabes sont très favorables pour l'Algérie parait invraisemblable voir incompressibles pour beaucoup de gens. Néanmoins, si on observe bien les relations internationales et les rapports de forces qui ont étaient en défaveur de notre pays depuis la chut du mur de Berlin et le début de l'unilatéralisme, on peut noter que les régimes arabes les plus touchés par cet événement à savoir la Tunisie, l'Egypte et la Libye sont des régimes qui entretenaient des relations pas très amicales avec l'Algérie. Puis, une deuxième remarque, la Tunisie et l'Egypte avaient deux régimes très soumis aux puissances dominantes. Ils étaient des allies indiscutablement apprécies, ils facilitent d'une manière impressionnante l'application de leurs agendas géostratégiques. A son tour, El Kadhafi entretenait des liens plus au moins ambigu avec l'occident, cependant au moment où il décida de rentrer dans le rang et commença à visiter les grandes capitales occidentales, on a décidé de l'éliminé physiquement ! Mystère ! Il faut souligner tout de même que la Libye est le seul pays du " printemps arabe " qui a été attaqué par des missiles, des avions et probablement même avec des armes interdites ! Le régime syrien, quant à lui, n'est pas encore tombé !

À l'exception des deux modèles tunisien et égyptien qui se ressemblent beaucoup. On est devant des cas très différents sur plusieurs critères.

Dans ce contexte là, l'Algérie été parmi les pays très rare qui a conservé tant bien que mal sa souveraineté et son indépendance dans la prise des positions sur la scène internationale. Une bonne partie des capitales arabes acceptaient facilement des bases militaires occidentales sur leurs soles alors que pour l'Algérie c'est toujours Niet. On peut citer aussi sa solitude sur l'épineux dossier du Sahara Occidentale. Ses positions fermes sur les territoires arabes occupées par Israël. Ses positions originales et équilibrées, justement, sur la question du fameux " printemps arabe ". On raconte même, que pendant les réunions à huis clos de la ligue arabe, les positions parfois radicales et fermes de notre diplomatie, se transmet à temps réel aux capitales occidentales ce qui lui a posée des grandes difficultés avec deux grands continents, l'Amérique du nord et l'Europe. Par conséquent, un petit état du tiers monde, ne peut pas lutter tout seul pour préserver ses intérêts ou pour défendre la justice dans le monde, il faut compter sur des voisins, des frères et des amis fidèles qui partagent les mêmes principes. Ainsi donc, je peux affirmer sans aucune hésitation que la dissolution des régimes arabes très soumis à la puissance unilatérale sur les plans économique, géopolitique et même culturel, va crescendo avec l'intérêt direct de notre jeune état nation.

Pour ce qui concerne, le volet militaires de notre question, je pense que les crises graves sur nos frontières du sud notamment avec la Libye et le Mali, vont renforcer davantage la philosophie et la vision de l'Algérie concernant la problématique du terrorisme international. Ces problèmes vont donner plus de crédibilité aux discours inchangé de la diplomatie algérienne qui dit grosso modo qu'il faut répondre au terrorisme avec fermeté mais aussi avec sagesse pour trouver des solutions socio-économiques et politiques à ce fléau qui se nourrit en fait de la misère et de la désespérance. Dans cette perspective, cette situation va permettre à notre armée de se renforcer et d'être beaucoup plus opérationnelle, malgré le cout financier, et de consolider la trame nationale entre les populations et leur armée qui ne peut être que bénéfique également à la cohésion sociale. Certes, le risque zéro n'existe pas. Car plusieurs voix s'élèvent pour nous mêler aux bourbiers libyen ou/et malien. Toutefois, si on arrive à éviter la tentation de s'y impliquer ce serai la meilleur option possible a mon avis de garder la tradition coriace jusque là de l'armée algérienne qui refuse tout ingérence à l'extérieur de nos frontières. L'histoire lui a donnée raison, elle nous a bien montré le grand danger de ces bourbiers. L'Irak, l'Afghanistan et le Vietnam pour un temps plus ancien.

Par ailleurs, sur le front intérieur les populations ont bien compris que ces révoltes ne représentent pas la solution miracle à leurs problèmes. Mais au contraire, quand le printemps tourne au cauchemar et un hiver trop dur dans les pays du soleil notamment en Lybie, Syrie et en Egypte, les gens " ordinaires " deviennent beaucoup plus septiques quant à cette piste révolutionnaire. Peut être ils ont compris que faire tomber un régime n'est pas forcement l'élément principale de leur salut. Ceci n'est qu'une conjecture trop idéaliste ? Faire changer un régime politique par un autre peut-il permettre à ces peuples pauvres dit du tiers monde de se développés ? Le rôle d'un régime politique dans le développement d'un pays est il centrale ou périphérique ? Des questionnements dont on n'a pas l'espace nécessaire pour les développés aujourd'hui, néanmoins il est très intéressant de s'y attarder une prochaine fois. Ceci étant dit, se libérer des régimes totalitaires, qui emprisonnent et torturent les gens pour leurs idées, qui ferment toute possibilité au dialogue et à la liberté de paroles d'une manière arbitraire et qui s'enrichissent d'une manière scandaleuse sur les dos de millions de pauvres comme le cas des ex-régimes égyptien et tunisien, ceci est complètement légitime voir préconisé.

A partir de tous ces éléments, l'état algérien tire, curieusement, des gains sur plusieurs registres de ce " printemps " ou " hiver " ! Y compris des bénéfices économiques ; quoi qu'il est grossier de parler de gains au moment où plusieurs millions de gens soufrent de cette situation là ; mais la vie est ainsi faite, le malheur des uns fait le bonheur des autres. Or le registre politique est le plus important car la stabilité et la paix ce sont des valeurs inestimables.

* Docteur en sociologie politique