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2014, faut-il encore le rappeler, est une année électorale majeure, avec
tout ce que cela sous-entend comme enjeux politiques et leurs corollaires
économiques et sociaux.
Pour ce faire, douze candidats à la candidature présidentielle sont, pour le moment, dans les starting-blocks, en attendant l'officialisation, pour un certain nombre d'entre eux, six selon quelques indiscrétions, par le conseil constitutionnel dont les membres sont rentrés, dernièrement, en conclave. Quelques-uns d'entre ces candidats n'ont pas attendu la permission pour s'exprimer, non pas pour exposer leur vision du futur de notre pays, en termes de projets de société et/ou économique et social, cohérent, crédible et mobilisateur, mais pour prendre à témoin l'opinion et avertir " qu'ils ne se laisseront pas conter ", si d'aventure " ils ne seront pas élus présidents ", pour les premiers, ou pour les seconds, " si leur candidat favori n'est pas intronisé ". En cette pré-campagne qui se joue déjà sur les plateaux des chaines privées satellitaires, c'est une guerre psychologique qui nous est servie, par les candidats à la candidature ou leurs représentants ; en voici, d'ailleurs, un florilège non exhaustif : Ali Benflis qui " ne compte pas se laisser faire a-t-il dit ; je prends l'engagement devant Dieu et devant vous à ne ménager aucun effort, à n'économiser aucune énergie pour que la volonté souveraine du peuple algérien soit respectée et que les tenants de la fraude et du déni du droit à la citoyenneté subissent une cuisante défaite " Rachid Tlemçani, chercheur à la faculté des sciences politiques de l'université d'Alger, qui dans un entretien publié récemment dans El Watan, prédit le pire à l'occasion du scrutin du 17 avril 2004 et n'exclut pas " un dérapage du style d'octobre 88 " ; parmi les scénarios possibles, cet intellectuel pronostique : 1. Un statuquo. 2. Un consensus autour des éléments du F.I.S, du FFS et de Mouloud Hamrouche, un deal sous la direction de l'armée, soit en résumé une réédition de Sant' Eugedio. 3. Un scénario à l'Egyptienne avec intervention de l'armée. Mouloud Hamrouche, après avoir commis une première déclaration des plus abscons, s'ouvre à la presse nationale une deuxième fois, " pour s'en remettre à l'armée ". Le Général Yala n'est pas en reste, lui qui est passé de candidat à la candidature à boycotteur, " fervent partisan de l'interruption du processus électoral ". " Les islamistes, tête de file des boycotteurs, qui appellent à une transition politique au lieu et place des élections présidentielles. Et beaucoup d'autres experts (*) du style " bahet-acadimy ", " kateb-sohofi ", ou encore " mouhalel-siyassi ", qui en viennent à écumer les plateaux de télévisions et de radios, y compris étrangers, pour nous casser les oreilles avec les redondances du style : "( ?) nous nous trouvons au milieu d'une zone instable, une zone des tempêtes avec des pays en rébellion (?), (?) et de continuer à polémiquer stérilement sur la candidature d'Abdelaziz Bouteflika (?) " Dans ce camp-ci, on annonce la " fin de tout " sans proposer, pour l'instant, le moindre plan alternatif autre que celui de l'échec des équipes en place et le pays avec. En face, dans le camp d'Abdelaziz Bouteflika, ce n'est pas réjouissant non plus, si l'on compile toutes les déclarations des Bensalah et Saâdani, pour n'évoquer que ces derniers : " Le premier n'a-t-il pas déclaré aux opposants au quatrième mandat d'Abdelaziz Bouteflika, qu'ils soient dans son propre camp ou ailleurs " que leur heure a sonnée ", déclaration faite juste après l'annonce officielle de la candidature du président aux élections prochaines. " Le deuxième en a tellement dit que finalement il serait vain de tout rappeler ici, notamment la crise qui a failli ébranler les institutions du pays suite à la polémique causée par ses propos. Même le Premier Ministre s'en est mêlé en agitant l'épouvantail de la peur : " (?) des aventuriers tentent de porter atteinte à la stabilité de l'Algérie (?) " Complétons cette litanie par " les éléments de langage ", redondants, répétés à l'envi par Louisa Hanoune et ses troupes " sur le péril éminent de l'invasion étrangère ", pour planter le décor électoral tel que voulu par nos " déclinologues ", qui ont même été rejoints, dans cette curée, par des ex-diplomates, qui, hier seulement, défendaient les couleurs du président de la République (et aussi leurs acquis) comme Halim Bennatallah (qui s'en souvient ?). Dans une lettre qu'il aurait adressée à Sellal, sous la signature d'un " simple citoyen ", il " tire la sonnette d'alarme ", pour poser, en gros, la question suivante : " pensez-vous que le président pourra tenir le rythme d'enfer que lui imposera sa charge dans le volet diplomatique !" Tous ces déclinologues, domiciliés principalement dans les états majors des Partis, vous l'aurez constaté par vous-mêmes, ne parlent pas de programmes ; ça ne les intéresse pas, ce n'est pas dans leur feuille de route. Ce qu'ils évoquent et ceux à quoi ils rêvent secrètement, est un cataclysme national : eux ou le déluge, qu'ils soient dans ce camp-ci ou dans ce camp-là ; en fait ce qu'ils défendent, c'est une anti-Algérie. Que faire contre tous ceux qui nous pourrissent la vie à longueur de journée ; tout va à l'eau selon eux, à les entendre rien ne va : travail, santé, économie, éducation, équipe nationale de football, politique, élections? A les écouter, on n'a plus qu'a s'allonger et se tirer une balle dans la tête. Ils répètent à l'envi, que les résultats des politiques menées à ce jour, seraient au mieux inexistants, au pire désastreux. Elles sont déjà mauvaises par nature et le pays ainsi géré serait voué, toujours selon eux, à l'avilissement et au déclin. Pour ces déclinologues la condamnation est ferme et définitive ; leur slogan " no futur ", leurs visées : entraver la création et l'innovation d'où qu'elles viennent ! Quand ils commencent à te parler, tu pars avec un grand soupir, sans rien dire, en plein milieu de leur discours. Quand tu les entends pérorer à la télévision, En-Nahar, pour prendre cet exemple, tu n'es pas à l'abri "d'un juron ou une insulte " proférés en direct, heureusement vite étouffés par le " bip sonore " du réalisateur qui a, ainsi, épargné aux oreilles chastes des familles, d'entendre ce qui est politiquement incorrect (l'auteur de cette performance n'est autre qu'un jeune représentant d'un mouvement qui tient, en ce moment, le haut du pavé et qui, convié par l'animateur pour conclure son intervention, n'a trouvé de mieux que sortir cette " réplique ", heureusement vite étouffée). Combien sont-ils ceux qui croient que notre pays va mal, qu'il est en déclin ? C'est une idée bien ancrée, apparemment, chez ceux qui sont contre le quatrième mandat et qui les estiment à plusieurs millions, alors que pour ceux d'en face, ils ne seraient qu'une petite poignée d'agitateurs, Amara Benyounes dixit ! Sont-ils nés chez nous ces déclinologues, est-ce vraiment une spécialité algérienne que la déclinologie ? Non bien évidemment, même si les déclinologues prospèrent davantage dans notre pays, à l'aune des élections présidentielles. En fait, c'est Dominique De Villepin, ancien ministre des affaires étrangères et Premier Ministre Français qui le premier, en 2006, a popularisé le terme de " déclinologues" en lui donnant le sens péjoratif de personnes voyant tout en noir " : " Je vois surgir une nouvelle population dans notre pays, de nouveaux experts : les " déclinologues ". De grâce, il y a vingt siècles d'histoire dans notre pays pour nous rappeler qui nous sommes et où nous allons. Alors, ce n'est pas en levant le doigt pour savoir dans quel sens va le vent que nous devons chercher à comprendre quel est le destin de la France ". Ceci pour la définition de ce néologisme qui fait florès chez nous et qui nous réserve, non pas une campagne présidentielle mais une campagne plutôt " pestilentielle ", parce que le palmarès des dérives est, d'ores et déjà, lancé, n'est ce pas monsieur le Secrétaire Général du MPA, auteur du fameux " Inn'aal bou li mayhabnach " ? C'est une aberration que d'excuser, ou de passer sous silence cette " supposée grave dérive ", en comparaison à une autre, anti démocratique et non moins grave- consistant à empêcher le président en exercice de se représenter à l'élection- ? Ainsi le sentiment d'impunité de nos politiciens ou de nos démocrates ne fera que se poursuivre, sans vergogne. Si les coups virtuels contre les adversaires politiques se voulaient à chaque élection, " de bonne guerre ", cette pré-campagne présidentielle- à moins que la campagne n'ait finalement déjà démarrée-, nous baigne, effectivement, dans un défilé de scandales (Khalifa-Sonatrach) et révélations en tous genres, limite " presse people et ses déboires ", n'épargnant ni la famille du candidat et usant parfois de menaces et d'invectives. Cela se fait, en tous les cas, au détriment de la politique, au sens noble du débat d'idées et des réels problèmes rencontrés par les citoyens. Bien évidemment, en l'absence d'une charte de bonne conduite et surtout de programmes politiques ficelés, les tribuns, d'un côté comme de l'autre, vont se donner à cœur joie et ne manqueront pas de régaler l'assistance, à l'occasion de leurs meetings à venir. Alors à qui mieux mieux, les missi dominici qui sillonneront le pays ne s'en priveront pas, car en plus de leurs bons mots, ils ne manqueront pas de " brûler tout ce qu'ils avaient adoré la veille et le pays avec, si par malheur les électeurs ne font pas le choix de leur candidat ". Pour l'instant, dans les principaux camps, chacun affûte ses armes. Dans le camp de Benflis, par exemple, on a commencé par prendre la résolution d'éviter l'injure et l'invective. Dans l'autre camp, on admet, à demi-mots que tout n'a pas été réglé dans le pays, mais que les réformes engagées ne tarderont pas à produire les résultats escomptés. Il y a de quoi s'interroger, à ce moment là, sur le sentiment profond des électeurs, sur leur confiance réelle en la politique menée, finalement, pas les politiciens? et sur leurs intentions de vote au vu du déballage qui leur est promis. Mais, en l'absence d'instituts de sondages, on ne peut, pour l'instant, prendre la mesure de ce segment d'électeurs qui serait tenté peut-être, au mieux voter blanc, au pire s'abstenir. Sinon, au-delà des idées d'un programme politique, économique et social qui correspond, plus ou moins, quelles qualités intrinsèques attendent les électeurs d'une personnalité politique, a fortiori, candidat à la présidence de la République ? Sommes-nous, ainsi, résignés à accepter le manque de clairvoyance, l'ignorance de la chose politique, le défaitisme, la désertion et la culture du soupçon, dont font montre certains candidats à la candidature ? Sommes-nous vraiment acculés et coincés dans les cordes de cet hiver de " dépressisme " ? Le problème réside-t-il dans ces solutions interventionnistes qu'on cherche, vraiment, à vendre aux électeurs ? Acheter ce type de projets tels que proposés par ces politiciens, participe-t-il du bon sens ou de l'aventurisme ? Un climat de plus en plus détestable commence à s'installer en cette pré-campagne, à se demander s'il y a une éthique en politique ? A tous ces questionnements, il n'y a, pour le moment, qu'une réponse qui vaille : comme pour tout marché, celui de la démocratie politique est, en définitive, déterminé par le consommateur, en l'occurrence l'électeur? et en l'état, les politiciens, en bons producteurs, ne font que servir les plats les plus vendeurs auprès de la masse! Ils continueront ainsi, longtemps peut-être, à radoter, à s'accuser mutuellement, à camper dans leur position, sans jamais se demander s'ils sentent vraiment le pouls d'une société qui, en définitive, évolue plus vite que leurs idées. Ceci étant dit, il faut savoir que les déclinologues se recrutent, également, dans le monde des médias qui pour la plupart choisissent la facilité, le prêt-à-penser, le prémâché pour pratiquer des genres entre politique, clownerie et café du commerce. Coupables ces médias, oui, peut-être, au sens ou il n'est plus possible de faire la différence entre " journaliste-militant " et " militant-journaliste " ? Entendons-nous bien, cette affirmation vaut pour tous les médias, publics ou privés, soient-ils ! Les premiers sont accusés de ne plus remplir leurs missions d'information, de prospective et d'investigation avec toute la neutralité voulue ; selon leurs détracteurs, ils ne font qu'inviter les mêmes experts-militants, incapables d'animer un débat intellectuel et à fortiori, contradictoire. La critique vaut aussi pour le secteur privé qui ne sait plus faire la part des choses, en ouvrant ses journaux et ses plateaux de télévision à des personnalités politiques qui n'ont rien à dire au-delà de la critique négative, au mépris de l'équilibre des débats. Il s'agit, particulièrement, de ces chefs de petits partis politiques, qui n'ont pour objectif que " de chauffer à blanc " l'opinion nationale avec leurs vociférations, alors qu'ils gagneraient à se regrouper, en perspective d'autres échéances électorales à venir, au risque de disparaitre, comme l'a suggéré Daho Ould Kablia, dans une de ses si rares analyses. Et, l'équation à résoudre avant le 17 avril 2014 est peut-être celle-ci : faut-il continuer, citoyens que nous sommes, à broyer du noir, se désintéresser de la chose politique, s'abstenir de voter, ou s'inscrire en faux, contre tous ces déclinologues et leurs tentations de résignation, fatalisme et scepticisme devenues, trop souvent, la règle en matière de politique ? Faut-il, maintenant, tenter de réhabiliter l'action politique et démontrer que le réalisme conjugué à l'optimisme, ne s'opposent en rien à l'ambition d'offrir à notre pays, une perspective et l'avenir qu'il mérite ? Aux politiciens de tout bord de s'entendre, alors, sur le modus vivendi de ce challenge et qu'ils se le tiennent pour dit, l'urgence aujourd'hui, c'est de trouver des substituts au pétrole qui semble amorcer une descente, peut-être inexorable. Quant aux électeurs, ils doivent faire la part des choses, loin des manipulations politiciennes d'où qu'elles viennent. Ils doivent croire en la politique, croire qu'elle peut, si on en fait bon usage, changer les choses, pacifiquement, loin du brouhaha qui nous est servi au quotidien. Le faux semblant, le mensonge, la menace du " printemps arabe " ou le sentiment de peur, en général, qu'on veut inoculer à l'électeur, cela fait illusion un temps, mais L'Algérie à laquelle tout le monde aspire, c'est une Algérie solide, sereine et riche de ses différences y compris politiques, forte à l'échelle nationale comme internationale, sûre de ses atouts et de son potentiel civil et militaire. Alors, barakat messieurs les déclinologues, vous nous avez assez cassés les pieds comme cela ! Nous avons marre de vous voir et de vous entendre chanter au déclin du pays qui ne vous survivrait pas. Alors, permettez-nous de vous affubler du terme de " déclinologues ", jusqu'à ce que vous changiez de braquet et de discours. Renvoi : voir mon précédent article intitulé " Faites-les taire, monsieur le Ministre " in Le quotidien d'Oran du jeudi 31 janvier 2013. |
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