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L'Algérie a des
hydrocarbures pour encore un demi-siècle au moins. C'est Youcef Yousfi qui le
dit. A la veille de la présidentielle, c'est une invitation à ne pas trop s'en
faire.
Au moment où les douanes algériennes confirmaient l'évolution alarmante du commerce extérieur du pays en 2013, le ministre de l'Energie, Youcef Yousfi, se livrait à un contre-exercice périlleux. Il voulait rassurer les Algériens, et leur assurer que le pays a du pétrole, donc de l'argent, pour au moins un demi-siècle. Inutile donc de s'inquiéter. Le pays a de la ressource, grâce à son sous-sol, et la stagnation économique actuelle n'aura pas d'impact. Ce ne sera qu'un épisode secondaire dans l'histoire du pays. Etait-ce un hasard du calendrier ? Toujours est-il que M. Yousfi a montré un optimisme remarquable le jour même où étaient publiés des chiffres confirmant les carences de l'économie algérienne. Certes, la balance commerciale a encore dégagé un excédent de onze milliards de dollars en 2013, mais la balance des paiements sera certainement déficitaire, pour la première fois depuis une décennie, sous l'effet conjugué de la baisse des exportations et de la hausse des importations. Les importations ont atteint 54.85 milliards de dollars, contre en 50.37 milliards en 2012, alors que les exportations baissaient à 65 milliards, contre en 70 milliards en 2012. Avec une balance des services déficitaire de douze milliards de dollars, l'Algérie aura donc dépensé, en devises, plus que ce qu'elle a gagné. Ceci justifie-t-il de sonner la mobilisation générale? Non, si on se fie aux ressources du pays. Oui, si on prend en compte le fait que l'Algérie demeure incapable de lancer un processus de développement pour aller à une économie performante, non dépendante des hydrocarbures. Pour l'heure, l'Algérie peut, grâce à ses réserves de change, qui frôlent les 190 milliards de dollars, se permettre un déficit de la balance des paiements de vingt milliards de dollars pour une période de dix ans. Il n'y a pas de risque que le pays se retrouve en cessation de paiement dans l'immédiat. En outre, le bilan 2013 est particulièrement calamiteux à cause des effets de Tiguentourine, qui a privé l'Algérie de 18% de sa production de gaz et de douze pour cent de ses exportations. La production de Tiguentourine devrait reprendre sous peu, pour améliorer le solde production dès cette année. M. Youcef Yousfi a fait des promesses en ce sens à plusieurs reprises, mais cela finira bien par arriver un jour. Et c'est précisément ce qui est inquiétant, car M. Yousfi a un discours concomitant : on a des hydrocarbures pour un demi-siècle ; donc, le discours alarmant de certains cercles est caduc, laisse-t-il entendre. Conclusion implicite : on peut continuer comme ça, à pomper du pétrole et à le vendre pour survivre durant plusieurs décennies. M. Yousfi enfonce le clou quand il annonce le lancement d'un appel d'offres pour de nouveaux périmètres, promettant des découvertes importantes. Et il ouvre, par la même occasion, la porte à l'exploitation d'hydrocarbures non conventionnels. Avec ce nouveau créneau, c'est un véritable eldorado qu'il promet, si on en croit les estimations très optimistes des réserves que recèlerait le sous-sol algérien. Ce cercle vicieux de l'économie algérienne est connu. Il est là, et le pays a appris à vivre avec. Il a ses détracteurs, ceux qui en profitent et ceux qui le confortent, tout en affirmant vouloir en sortir. Comme M. Yousfi, qui promet un immense plan de développement des énergies renouvelables, mais ne fait rien pour le concrétiser. L'Algérie consommera 40% d'énergie renouvelable d'ici 2030, et en produira 20.000 mégawatts, a dit M. Yousfi. Qui se souviendra de cette promesse en 2030 ? Youcef Grar, expert en TIC, vient de rappeler que le gouvernement avait lancé en grande pompe le fameux programme Ousratic en 2005, et promis que six millions de foyers seraient connectés à l'ADSL en 2010. En 2014, il n'y en qu'un million et demi. On ne se souvient même pas de qui était ministre à cette époque, et personne ne lui tient rigueur de ce ratage. M. Yousfi peut donc, à son tour, dire ce qu'il veut, le système politique algérien ne contraint aucun haut responsable à rendre à des comptes. |
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