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Moins de trois ans après la chute du colonel Kadhafi
à la suite d'une intervention occidentale fondée sur un détournement des
résolutions de l'Onu, la Libye n'est plus un Etat et c'est déjà un pays en voie
de dislocation. Milice contre milice, région contre région, l'Est contre
l'Ouest, le Sud contre le Nord, il existe une combinaison de forces centrifuges
qui concourent à ruiner le peu d'Etat qu'il y avait sous Kadhafi et à casser un
pays.
La Libye, suprême paradoxe, termine l'année en importateur de carburants. Le très faible gouvernement d'Ali Zeidan fait de louables efforts pour répondre à la pénurie de carburants qui touche le pays? en important des cargaisons entières. Et en laissant entendre que la pénurie est préfabriquée à des desseins politiques. Ce qui n'a rien d'un scoop dans un pays où les villes sont des milices et non des municipalités et où les armes servent d'argument. Le pays termine l'année 2013 dans un état pitoyable. L'annonce par les milices séparatistes de l'Est libyen d'une levée de l'embargo pour le 15 décembre a été démentie dans les faits. Le chef de la milice qui tient tête au gouvernement, Ibrahim Jodhrane, a des exigences hautes, notamment une attribution à la région de la Cyrénaïque d'une part des revenus pétroliers. Il a en quelque sorte de la suite dans les idées. Après s'être proclamé «chef du BP» de la région de la Cyrénaïque, il a créé un gouvernement local et annoncé la création de banques locales et d'une entreprise pétrolière de la Cyrénaïque. Le chef milicien n'ouvrira pas les terminaux en raison, dit-il, de «la corruption du gouvernement intérimaire qui ne se soucie pas des exigences réelles des Libyens». En fait, il les ouvrira si Tripoli accepte de valider la marche accélérée vers la dislocation du pays. Car la «Cyrénaïque autonome» fera des émules. Et elle en fait déjà. Et il est très clair que l'éclatement de la Libye en plusieurs morceaux ne gênera pas les intérêts extérieurs pour peu qu'on leur assure une relative sécurité. Et c'est bien sur ce terrain que les milices font des offres subliminales ou franchement ouvertes comme pour celles de l'est du pays. Le gouvernement de Tripoli est trop faible pour arrêter cette pente dangereuse. Et dans une logique implacable, c'est une force armée officielle, celle des Brigades des opérations, relevant du Congrès général, qui semble vouloir prendre les choses en main. Par le moyen des armes, le langage dominant en Libye depuis la «libération». La Brigade qui critique l'impuissance du Congrès national général du gouvernement et de l'armée menace de régler le problème posé par la «bande des gardes» - appellation décernée aux miliciens qui prennent littéralement en otages les terminaux pétroliers et les finances du pays - par ses propres moyens. La « bande des gardes» est accusée d'attenter à l'unité du pays et de dilapider ses ressources. Mais le vrai message est envoyé aux gouvernants de Tripoli : la négociation avec les «séparatistes» de Cyrénaïque a trop duré, la Brigade se disant «en mesure de les chasser pour achever les objectifs de la révolution». Une fin 2013 à forte odeur de poudre et de souffre dans la Libye «libérée» par l'Otan. |
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