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Le problème du service public n'est pas une exclusivité du ministère de
l'intérieur ni son amélioration une action attributive, dont il est le seul à
en être responsable. Il est un cas national d'autorité publique. Il dépasse le
gouvernement pour être un fait de nation.
Le service public n'est pas dissociable de l'exercice de l'autorité publique. L'Etat, nonobstant la mise en orbite d'un département ministériel dédié à cela, n'est pas prêt à se désengorger d'un certain centralisme suffocant. Le responsable local à qui incombe le traitement de cas citoyens demeure le plus souvent désarmé, quand la bureaucratie ne semble pas lui ronger la moelle. Le service public introduit dans la nouvelle configuration gouvernementale comme institution aura certainement beaucoup de peine à déminer le terrain. Pour son amélioration il ne suffit pas de jeter son désarroi sur les pièces d'identité, mais regarder un peu vers ceux qui les produisent. Sans égalité, transparence et objectivité l'on ne peut parler de service public. L'on aura beau des discours, des organes mais rien n'ira vers le sens d'une efficacité si jamais l'on se calera dans ce domaine. La situation actuelle sans audit fait démontrer en net relief un constat d'une totale désolation. Cela reste du d'une part à l'échec ou faiblesse de toutes les reformes annoncées à une administration classique qu'étrangle une bureaucratie institutionnalisée et d'autre part à un personnel sous-formé dont l'absence de motivation est déterminante mais surtout à l'excès de prudence qui provoque l'exigence d'une multitude de documents. Que peuvent ces responsables en charge du service public lorsque l'arsenal juridique est expressément rendu touffu ? Exercer l'autorité est un acte ardu L'exercice de l'autorité provoque indéniablement, dans sa définition ; plusieurs concepts. Les uns ne peuvent concevoir cette autorité sans qu'il y est son corollaire de responsabilité, les autres voient en la responsabilité une charge qui soutient seulement l'autorité. Un ancien cadre de la nation, Wali de surcroît au fait entièrement des réalités dans lesquelles s'exerce le pouvoir avait affirmé « chacun peut prétendre au titre de l'autorité » pour dire ensuite « chacun se voit responsable, non parce qu'il souhaite assumer toutes les conséquences de ses actes mais pour le plaisir de s'asseoir sur le strapontin et voir ses voisins de plus haut » pour conclure qu' « en définitive tout le monde est donc responsable »(1). Cette post-profession de foi d'un « responsable » qui détenait une « autorité » est la conséquence du long usage du pouvoir que confèrent certains postes hiérarchiques. Dans la théorie générale du pouvoir en tant que force et capacité d'action positive ou négative, rien n'est absolu et tout est donc que relatif. Un pouvoir ainsi défini peut ne pas entraîner de responsabilités pour son titulaire en termes de charges et de prise en charge des effets qui découlent de son exercice. Par contre chez une autre personne investie d'un « pouvoir » de faire ou de ne pas faire, de laisser faire ou non, suppose à son corps défendant, et en vertu de textes clairs ; l'obligation d'assumer, de supporter et de répondre individuellement et par corps et âme ; toutes les situations fatales des actes faits ou non faits. C'est cette autorité qui n'est nullement assortie de la responsabilité que tout « le monde » cherche et recherche comme prophétisait Nietzsche en disant « ils veulent tous le pouvoir, tous rêvent d'approcher le trône, même dans la vase ». Ainsi le pouvoir ne se confine pas mais pas du tout dans un vocabulaire hautement sphérique ni soit l'apanage d'appareils institutionnels de la haute hiérarchie ou du sommet de l'Etat. Il est un rêve éternel de l'homme qui se croit éternel. Feu Boumediene voulait que la responsabilité soit une charge et non un titre honorifique. Feu Ferhat Abbas avertissait « qu'en régime présidentiel, quelles que soient les bonnes intentions du président le danger d'un pouvoir personnel reste présent »(2). S'évertuer à se creuser les méninges pour établir un semblant de « cahier des charges » ou un « truc d'éthique » pour tout « responsable » deviendrait un comportement tellement important qu'il risque de dépasser de loin l'objectif qu'il s'assigne. Autrement dit, le pouvoir limite le pouvoir, selon la graduation de l'échelle des valeurs, des grades, des institutions, des corps et des conjonctures. La loi semble stipuler que toute personne est présumée responsable civilement ou pénalement du fait de ses activités, celles d'autrui ou des choses sur lesquels elle exerce ou a un pouvoir d'animation ou de contrôle Une responsabilité oui, une autre non La responsabilité doit être, dans sa dimension de faire peur et encore crainte ; comme un récit fantastique et non fantasmatique l'égard de tout prétendant « au trône ». Malgré ce désir ardent vis-à-vis de la convoitise des « postes » et pas tous ; les éventuels candidats ne se bousculent plus au portillon. Ministre, oui. Sénateur ou élu à tout échelon, oui. Directeur de tel machin administratif, fiscal ou para-sécuritaire, on verra. Pour la simple et unique raison que ; les premiers cités ont du pouvoir sur l'agissement des seconds. Ceux-là, certes ont aussi le véritable pouvoir de décision en pleines attributions, mais encourent et endossent tout ce qui deviendrait hélas, malheureux, injuste, illégal et autres tares. Peut importe en finalité de savoir justement qui exerce pratiquement le pouvoir. Des mythes et des réalités ont sillonné les éléments de réponse à cette interrogation. Des insinuations et probabilités ont été par ailleurs avancées à propos des anciens et des nouveaux, de l'armée et des civils, des uns et des autres. A une question tendant à assimiler le pouvoir à l'armée, le général Khaled Nezzar ancien ministre de la défense rétorquait : « les militaires n'exerçaient pas le pouvoir si ce n'est à travers quelques uns choisis pour certaines fonctions » Comme lors des élections générales de 1991, un cadre de l'Etat et du FLN plusieurs fois ministre disait à un jeune, brillant et fervent militant du même parti, désirant se porter candidat aux dites législatives ; que son « jeune âge » constitue un handicap à l'exercice du pouvoir et à la prise de responsabilité. Ce jeune ne trouvait rien à dire que « monsieur le ministre quel âge aviez vous lorsque vous avez pris les armes dans le cadre de la révolution ? Quel âge portaient en 1954 Benboulaid, Amirouche et tant d'autres Monsieur le Ministre ? Je ne pourrais connaître la réponse de monsieur le ministre. Mutisme et hilarité. 10 ans plus tard ce jeune homme aurait eu à exercer comme cadre de la nation après avoir jouit d'un mandat de députation, pour se retrouver 10 ans plus tard à la retraite. Par contre cet ex-ministre est à ce jour en poste politique dans le redressement partisan. Dieu et démon L'un des paradoxes apparent et abrutissant du fonctionnement du pouvoir c'est de voir, à quelques fraiches années de service quelqu'un partir au premier jour d'un congé spécial, à la retraite aux lieux et places de quelqu'un qui a plus de cinquante ans d'ancienneté ; partir à huit heures « travailler ». Son âge se chiffrerait à deux mille ans. L'autre paradoxe sous-jacent c'est la facilité de déterrer les morts et de redonner l'âme politique aux momies, non sans effort de tenter de momifier, sous les larmes des pleureuses ; ceux qui crient au sacrilège et ceux qui demeurant aphones ; ne poussent pas des hourra !. Si la responsabilité est un engagement moral, l'exercice du pouvoir doit se confiner dans un contrat aussi moral et dont les dispositions ne sont que conscience, confiance et aisance spirituelle. La loi à elle seule ne suffit pas à contrecarrer les déviations ou les dépassements de prérogatives. Fut-elle préventive et punitive. De la privation de liberté l'on se libère. De l'amende l'on s'acquitte. Mais du remord, du chagrin et de l'admonestation intérieure, l'on s'enferme davantage. Les chroniques du passé nous ont narrés que l'épée et les édits ont tracé dans le sang et dans les cachots les contours du pouvoir. Les rois faisaient et font croire à la plèbe qu'ils étaient et sont toujours les dépositaires terrestres du pouvoir divin. Les présidents ; ceux de la volonté des masses. Les dirigeants et leaders, le comble du savoir et de la compétence. Les généraux ; les stratèges et vainqueurs de célèbres batailles. Il n'y a pas de pouvoir que celui de faire du bien ou du mal. Dieu et le démon. Que peut encourir un sénateur si des émeutes, des inondations ou une liste décriée d'attribution de logements venaient à se faire dans sa ville ? Rien, bien au contraire parfois il monnaie son intercession, donnant l'illusion au responsable qu'il va faire quelque chose. Des privilèges il en use, de l'endossement d'une quelque responsabilité il s'en lave les mains. D'où l'impérieuse nécessité de l'élaboration d'une charte élus/administrés, telle que préconisée par le ministère de l'intérieur. L'élu doit être responsabilisé dans la moralisation de la société civile. Service public de public L'amélioration du service public ne doit pas souffrir de contingences ou de politiques conjoncturelles. Dans ses bonnes intentions essentielles, elle aspire à lever toutes les ambigüités faisant obstacles à l'acte de gestion quotidien. Partant, elle tenterait aussi d'aplanir les paradoxes qui minent le paysage, tant administratif que généralement public. Les relations sociales, les intercessions civiles, les pratiques autoritaires et le respect des responsabilités doivent également s'inscrire dans le grand registre des actions à mener. Ils se doivent de s'assainir. La contradiction polymorphe se confirme de jour en jour, s'accumule malheureusement pour devenir d'année en année des objections claires, mais acceptables. L'oubli de promesses faites aux masses relève d'une stratégie diabolique. Le satanisme chez nous se veut fatalisme dans la mesure où c'est la victime qui s'excuse par devant son bourreau, le créancier qui cède par devant son débiteur et ironie de vote c'est l'électeur qui flagorne l'élu national. Même devant des guichets libres et sans encombrement, chacun de nous dès son entrée dans une mairie commence par scruter l'horizon à la recherche d'une connaissance. Le service ainsi rendu devient une « mziya » et non un service public. Qu'est ce qu'aurait à perdre l'initiateur de l'amélioration du service de donner la parole aux usagers et leur dire d'abord que rien n'est à imposer en dehors de la loi ? L'on a vu des entreprises publiques ou privées, hôpitaux, universités, operateurs de télécommunication, demander pour plus de sureté un flot documentaire inimaginable. Le responsable tendant toujours à se prémunir de toute éventualité fâcheuse, tient Et si des actions préliminaires venaient à être à initier par l'adaptation à l'organisation interne du ministère délégué la reforme du service public, de mise en place organique d'une direction générale de développement ? Celle-ci se chargerait des applications informatiques interactives au profit des administrations et du suivi et contrôle du circuit documentaire (amont et aval d'un document). Il va sans dire que seules les nouvelles technologies de l'information et de la communication sont aptes pour dépersonnaliser l'acte du service public. La création d'un site « Service-public.dz », site web officiel de l'administration algérienne aura beaucoup d'avantages pour les deux parties. Citoyens/administration. Il aura à proposer à l'usager un accès aux informations le concernant, sans pour autant le mettre devant un guichet ou un préposé grincheux ou vice-versa. La machine ne doit pas cependant être conforme aux gènes de l'homme mais à l'esprit de la réglementation. Pourvu que celle-ci soit saine, précise, objective et générale. Etre responsable, sans pouvoirs On a vu des fonctionnaires incapables de vous absoudre d'un document exigible, pourtant peu convaincant à leur yeux. Seul un ouf serti d'un hélas arrive à exprimer sans mots ce sentiment grégaire d'impuissance. Ils ne sont pas tous courageux pour faire ce que leur dictent le bon sens et l'orientation générale du pouvoir factuel. Le poids de tant de pratique, d'autant de méfiance face à l'administré ont fait que l'administrateur déchiffre mal l'esprit du législateur. Et c'est, se dit-il tant mieux, car il lui rejette la responsabilité et tient là un argument de taille. Le législateur ou le rédacteur ministériel par contre, en riposte à certains comportements malfaisants, essaye d'alourdir, de compliquer ses dispositions pour tordre le cou à toute flexibilité ou transparence. Croyant mettre des garde-fous, il tue dans l'œuf l'innovation. L'investissement fait frémir les parvenus mais fait trembler les compétences innocentes Les walis entre autres, s'ils arrivent à présider les commissions, ils ne pourront dans tous les cas dénouer les complexités des rambardes juridiques. Certains arrivent à octroyer des milliards aux clubs sportifs, générer des milliards pour les autres, mais ne peuvent remettre un titre honorifique au meilleur contribuable de leur contrée, ni baptiser une école au nom d'un émérite enseignant ou encore gracier de l'amende un simple contrevenant à la circulation routière. Les tabous et les procédures castrent les plus coriaces des initiateurs de telles aventures galantes. Etre responsable sans ce pouvoir qui aurait à garantir plus de fluidité et d'efficacité, tiendrait son raisonnement de ce soupçon congénital qu'affiche le pouvoir central vis-à-vis du pouvoir local. Ainsi il ne peut y avoir de bon service public sans être toutefois bien accompagné par une marge de manœuvre initiative, préalablement codifiée, laissée aux bons soins de l'autorité locale. Sinon à quoi riment ces inspections générales et ces concepts du contrôle à posteriori ? Déléguer et superviser, n'est-ce pas là le principe cardinal de la déconcentration ? (1) « Un cadre au foyer » p. 84 /85. Ed. Casbah 2000. Belaribi Kadri (2) « Ferhat Abbas une autre Algérie » p.371 Ed. casbah 1995. Benjamin Stora/Zakya Daoud |
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