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![]() ![]() ![]() ![]() La survie
nécessite non seulement que l'on soit capable de réagir à son environnement
mais aussi, et surtout, d'en anticiper les turbulences. L'anticipation, c'est
donc, apprend-on aux étudiants, l'art non seulement de prévoir des évènements à
venir mais aussi de s'y préparer.
Certes, la théorie qui sert à paraître intelligent existe, et il existe aussi des cas que l'on ressort au besoin pour de belles démonstrations, mais depuis le temps qu'ils pen-chent sur la question, les spécialistes de la stratégie ne sont pas encore arrivés à en saisir les contours et, encore moins, à en maîtriser le processus. Comment s'opère le processus de l'anticipation et comment donne-t-il lieu au comportement adéquat ? Pour prendre un exemple concret, intéressons-nous à notre scène politique nationale. Une scène qui, de l'avis même des observateurs les plus avertis, est d'une opacité à toutes épreuves. Si obscure qu'elle ressemble à du marc. Mais dans ce marc un peu particulier de notre scène politique, il y en a qui, non seulement arrivent à voir devant eux mais, mieux encore, ils ont le pouvoir de voir bien loin et bien à l'avance. C'est ce qu'on appelle justement anticiper. L'anticipation : une qualité génétique Mardi passé le FLN et le TAJ ont tenu une réunion de travail pour soutenir la candidature du Président Bouteflika à un quatrième mandat. Or, ce dernier n'a encore rien décliné de ses intentions. Nous sommes donc dans une situation d'anticipation des intentions. En effet, la réunion tenue au siège de Hydra découle d'une anticipation quant aux intentions du Président de la République. Comment est-ce possible ? A cela nous pouvons apporter plusieurs hypothèses. La première c'est que si un parti qui vient à peine de naître a la capacité de lire dans le marc de la scène politique mieux que les autres, c'est qu'il est naturellement doté du pouvoir d'anticiper. Une sorte de qualité génétique à laquelle même le plus vieux parti en place ne peut pas résister et qu'il ne peut pas bouder. La preuve, TAJ a bien été l'heureux invité du FLN et la rencontre a été suivie d'une belle conférence de presse. Ensemble, ces deux partis, et sous l'effet de la synergie, ont pu arriver à tirer vers eux le futur, y lire les évènements et puis le relâcher. Conclusion : appelez cela alliance, appelez là comme vous voulez, disait Saaidani tout heureux, nous nous sommes rencontrés pour soutenir la candidature du Président. La deuxième hypothèse c'est que lorsqu'un vieux parti récupère ses anciens éléments, il retrouve automatiquement ses anciens réflexes de parti unique. Or, un parti unique ça anticipe, ça devine, ça prophétise même du moment que c'est lui qui prévoit les choses, les planifie, les réalise, contrôle son travail, évalue son contrôle et se distribue les bons points. A l'ère de la démocratie, la chère démocratie, il est un peu compliqué de tout vouloir faire seul et puis, n'est-ce pas qu'il faut éviter d'éveiller quelques soupçons malveillants, alors on s'associe à d'autres partis, de préférence à peine nés pour garder la commande en cas où (qui sait ?). Or un vieux parti qui retrouve ses anciens éléments, lorsqu'il s'associe avec un parti à peine né, décroche indiscutablement la capacité d'anticiper. Conclusion : notre rencontre, soutenait Saaidani, a pour but de nous entendre sur le soutien à apporter au Président de la République pour un quatrième mandat. Mais il n'y a pas que les vieux partis qui anticipent. Même les tout petits et « les-à-peine-nés » peuvent le faire. Avec ou sans les anciens. Et c'est là notre troisième hypothèse, lorsqu'un parti nait à quelques mois de la fin d'un mandat présidentiel et lorsque, sans avoir même eu le temps de participer à aucune élection, il se retrouve avec des députés et des sénateurs, alors ce parti-là porte dans les gènes une forte capacité à anticiper. Conclusion : depuis que TAJ est né, son chef, Amar Ghoul n'a cessé de déclarer à qui veut l'entendre qu'il est prêt à soutenir un quatrième mandat du Président. Lorsqu'on rappelle que TAJ est né un 31 juillet 2012 (depuis 13 mois environs) on est forcé de conclure que ce parti à une bien bonne capacité anticipative. De toute façon, un simple regard sur les performances de ce parti renseigne bien sur ses capacités. En effet, démissionnaire du MSP un 16 juillet, Ghoul a pu créer son parti le 31 juillet et tenir son congrès le 20 septembre. Et tout cela de la même année 2012. Comme s'il allait sur une ? autoroute ! Et c'est là notre quatrième hypothèse : lorsqu'un parti vous semble avoir été créé trop vite, aussi bien par rapport à la norme que par rapport à l'entendement, ce parti-là doit incontestablement détenir des pouvoirs d'anticipations extraordinaires. En effet, depuis qu'il a quitté le MSP, Ghoul n'a cessé de rappeler que son parti est rassembleur. Qu'il est prêt à faire des alliances pour soutenir un quatrième mandat du Président de la République. Conclusion : il a suffi que le FLN se retrouve un chef pour qu'une alliance soit aussitôt scellée avec TAJ avant même que l'on ait eu le temps de l'apprendre. Belkhadem et Ouyahia, victimes d'anticipation ? Mais comme l'anticipation est un des dons les mieux répartis sur notre scène politique, elle appartient aussi à d'autres partis que FLN et TAJ. C'est ainsi que le MPA de Amara Benyounès peut lui aussi se vanter que son chef figure parmi cette élite « anticipationniste » jusqu'au bout des ongles. Depuis quand est-ce que Benyounes se dit-il prêt à soutenir un quatrième mandat ? C'est vrai qu'il a un peu douté quand même vers la fin en se mettant à chanter « si Bouteflika ne se représente pas alors » mais, en gros, il a su lire dans les cartes du lendemain et il a, surtout, su croire en sa chance. Et c'est là que nous émettons notre cinquième hypothèse : lorsqu'un parti part de zéro pour se voir propulser aux premiers rôles, c'est là une preuve de sa capacité à anticiper les mandats et les candidatures. Conclusion : d'ici peu de temps le MDA annoncera avoir rejoint le FLN et TAJ. Voilà pour ce qui est de l'essentiel de l'anticipation des partis politiques chez nous. Ce qu'il y a lieu de souligner c'est que l'anticipation « boulitique », puisque c'est ainsi qu'il faut l'appeler, peut avoir lieu aussi bien du côté du pouvoir que de celui de l'opposition, ou du moins ce qui est supposé être comme tel, car tous ces partis dont nous parlons et qui soutiennent un quatrième mandat sont, à part le FLN, des partis de l'opposition donc supposés s'opposer au pouvoir. Et c'est là notre sixième hypothèse : lorsqu'un parti d'opposition a trop vite appris à ne pas s'opposer c'est qu'il détient un sens inouï de l'anticipation.Les prochains jours nous confirmeront sans doute toutes cela avec le ralliement d'autres partis à la toute nouvelle alliance, celle qui remplace la fameuse FLN-RND-MSP. Ah, juste la dernière pour la route, une septième hypothèse selon laquelle lorsque des chefs de grands partis sont éjectés l'un après l'autre à quelques mois des élections présidentielles, c'est qu'il y a une anticipation qui traverse la voie. Les redresseurs du FLN, ceux du RND et tous les redresseurs du monde, c'est connu, ont des capacités extraordinaires d'anticipation des évènements majeurs. Conclusion : ils ont agi pour le quatrième mandat du Président de la République, de longs mois à l'avance. A regarder toutes ces prouesse sur le plan de l'anticipation, on a parfois envie d'appeler les spécialistes de la stratégie à nous rendre visite pour apprendre de chez nous comment on vit par l'anticipation et comment, d'un autre côté, on entretient l'anticipation. |
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