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Les désordres et
violences qui ont accompagné la célébration du titre de champion de France de
football du Paris Saint-Germain n'ont rien d'étonnant. Tout cela était même
prévisible quand on connaît l'histoire de ce club. Ainsi, il était évident que
les groupes d'« ultras » allaient profiter de l'occasion pour clamer tout le
mal qu'ils pensent de l'évolution récente de cette formation et dénoncer les
relations difficiles qu'elle entretient avec ses supporters les plus
turbulents. Comme cela a été fait dans les années 1980, lors de la lutte contre
le hooliganisme en Grande-Bretagne, le PSG a décidé de « pacifier » ses
tribunes et d'en interdire l'accès aux fauteurs de troubles. Une transformation
qui a été entamée avant son rachat par les Qataris et que ces derniers ont
renforcée. Or, depuis plusieurs mois, les ultras critiquent avec virulence le
glissement « bling-bling » du club, exigent le retour de leurs tribunes
réservées et s'indignent vis-à-vis de ce qu'ils considèrent comme une remise en
cause de l'identité historique de leur équipe avec, par exemple, la
modification du logo ou des slogans du PSG. Cela sans oublier la disparition de
la date de sa création sur les blasons et autres fanions officiels. Les «
festivités » du Trocadéro, lundi 13 mai, leur ont donc offert une opportunité
en or de se faire entendre et il ne fait nul doute que ces radicaux
recommenceront à la prochaine occasion.
Bien entendu, il n'y avait pas que les ultras, une partie de ces derniers ayant même nié être à l'origine des violences et des destructions tout autour du Trocadéro et de la Tour Eiffel. L'événement a aussi attiré de nombreuses bandes venues des banlieues ou des cités populaires de la capitale. Bagarres entre groupes rivaux, agressions contre des touristes, saccages de cafés et de commerces, affrontements avec la police, voitures brûlées : nous avons eu droit à un remake de nombre de dérapages passés qu'il s'agisse des attaques contre les cortèges de lycéens qui dénonçaient un projet de réforme du gouvernement Villepin (le CPE) ou des règlements de compte à la Gare du nord. C'est d'ailleurs devenu une habitude. Qui dit évènement à Paris dit grands risques de violences contre les personnes et les infrastructures surtout s'il est festif. C'est ce que ne cesse de répéter le personnel urgentiste et hospitalier de la ville. Qu'il s'agisse du réveillon du 31 décembre, de la fête de la musique ou des bals du 14 juillet, à chaque fois les blessés sont nombreux et les forces de l'ordre sont sur les dents et obligées de courser des bandes aussi mobiles que déterminées à en découdre. Désormais, on voit même la police intervenir en amont, c'est-à-dire dans les gares de banlieues, pour empêcher les jeunes concernés de fondre sur Paris. Dans ces colonnes, il a souvent été question du syndrome du jeune à capuche. Ce qui s'est passé lundi dernier ne va pas changer les choses même s'il faut rappeler que, de tout temps, la banlieue a été accusée de vouloir mettre Paris à feu et à sang. Car, avant le jeune à capuche, on parlait, en mal, des « apaches », des « rouges » et des « blousons noirs » et tout ce beau monde était rarement bronzé? Il reste que le comportement d'une partie de la jeunesse des banlieues, en clair des Noirs et des Maghrébins, va servir à stigmatiser toutes les minorités visibles. On l'a bien senti dans les discours et analyses qui ont suivi les débordements. Bien sûr, la droite a eu beau jeu de mettre en avant la responsabilité de la Préfecture de police ainsi que celle du ministre de l'Intérieur. La gauche, elle, a essayé de mettre sur le grill la direction du club et donc les Qataris accusés d'avoir voulu mettre en scène une carte postale avec leur équipe et la tour Eiffel en arrière-plan. Mais la petite musique qui s'est imposée au fil des heures concernait la banlieue et ses populations dites à problèmes. Dans ce genre de circonstances, il est toujours difficile de garder son calme mais aussi de rester lucide. On sent bien que l'amalgame est fait et que, pour nombre de commentateurs c'est l'occasion idéale pour mettre tous les Maghrébins et les Noirs (qu'ils soient Antillais ou sub-sahariens) en accusation. Et une telle mauvaise foi et un tel opportunisme provoquent des crispations lesquelles empêchent toute réflexion commune et apaisée pour que la société française fasse échec à ces excès. Par ailleurs, pendant les affrontements, des abrutis, car comment les nommer autrement, ont grimpé sur des échafaudages et quelques-uns d'entre eux ont déployé un drapeau algérien. On sait que ce genre d'exhibition n'est pas rare. On l'a vu le soir de l'élection de François Hollande (ou de Jacques Chirac en 2002?). On le voit lors de n'importe quel grand match de football européen comme, mardi soir, pendant la rencontre entre Arsenal et Wigan. L'on pourrait même y consacrer un long montage avec quelques scènes surprenantes comme ce drapeau algérien déployé lors d'une rencontre de hockey-sur-glace en Amérique du nord ou pendant un tournoi de Golfe en Australie. « Les Algériens? partout » : comme le proclame une adaptation algérienne du tube planétaire Gangnam Style, le message est clair et peut faire sourire. Par contre, ce drapeau déployé sur un échafaudage et cadré par toutes les caméras alors que se déroulaient les saccages au pied du Trocadéro, était une manifestation de bêtise. A quoi cela rimait-t-il si ce n'est à mettre les Algériens dans la gêne et à conforter l'idée qu'ils sont responsables de ce genre de débordements ? C'est une manière de clamer son attachement au pays, disent celles et ceux qui défendent ce genre d'acte ou qui, pour être plus précis, refusent de le critiquer publiquement car, selon eux, cela contribuerait à renforcer le racisme et l'islamophobie ambiants. Or, en réalité, ce qui fait plaisir à Marine et ses compères, c'est bien ce genre de provocation, cette manière de dire à la société française : « on est ici et on vous em? ». Que cette jeunesse d'origine algérienne se sente des liens forts avec le pays de ses pères n'a rien de scandaleux. Mais, qu'elle révulse une partie de la population française en exhibant le drapeau algérien en toutes circonstances, surtout les plus pénibles, n'est pas acceptable. |
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