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Partout ailleurs, lorsqu'il est temps de partir, les gens se lèvent et
s'en vont. Chez nous, cependant, quand il est temps de s'en aller, les gens
cherchent toujours des excuses pour reporter leur départ. Pour rester, même
lorsque cela devient inutile, même lorsque cela devient vraiment ennuyeux.
Depuis 1962 que l'on nous répète inlassablement que le temps est venu de passer le flambeau à la génération montante. Et depuis lors, les générations se succèdent, s'usent et s'effritent les unes après les autres, à l'image de leurs espoirs et de leurs rêves. Elles s'en vont sans qu'aucune passation de consignes ou de mission n'ait eu lieu. Sans qu'elles reçoivent un quelconque flambeau. D'ailleurs existe-il encore ce fameux flambeau que l'on nous a caché dans les tiroirs de l'ambition illégitime et sous les burnous poussiéreux de la prétention déplacée ? Fatigués par l'attente inutile d'un avenir bloqué aux frontières du pays, comme frappé d'une interdiction d'entrer, les jeunes d'aujourd'hui ont détourné le regard de tout ce qui est demain pour le poser sur le présent avec la vague croyance d'y trouver une consolation passagère pour tromper leurs attentes et mentir à leur patience. Sauf que, là non plus, il n'y a rien qui mérite la peine d'être vécu. Sans sens particulier, lorsqu'il existe, leur aujourd'hui ressemble bien à leur triste hier. Sans travail, sans logement, sans même le rêve de fonder un foyer, les jeunes de nos jours constituent bel et bien l'échec le plus cuisant de ceux qui ont gouverné le pays depuis l'indépendance. Devant un tel échec, devant une telle faillite, il est attendu, en principe que le système en place change. Or, pourquoi ne voilà-t-il pas que ceux qui ont été à la source de cet éternel déboire cherchent toujours des raisons de continuer à sévir aux différents postes qu'ils occupent. « Je ne peux pas aller, vous jettent-ils à la figure, par devoir vis-à-vis de ce pays, je dois continuer à servir ! » Tel a été, mot pour mot, sur une des chaines algériennes encore « clandestines » aux yeux de la loi qui ne les reconnait pas, le discours tenu ce mardi soir par un de ces anciens qui continuent à croire qu'ils détiennent la clé de la réussite de l'Algérie, qu'ils sont indispensables, incontournables même pour tout progrès et pour toute avancée de ce pays vers des jours meilleurs. Comme s'ils n'avaient pas été à la tête des institutions depuis toujours sans jamais faire quoi que ce soit ! Ne comprennent-ils vraiment pas qu'ils ont malmené le pays et le peuple depuis toujours ? Ne saisissent-ils pas qu'ils sont les auteurs de la plus étonnante déroute du pays depuis que le monde existe ? Un pays aussi riche que l'Algérie qui ne sait pas nourrir ses habitants, qui ne sait pas quoi faire de sa richesse ? Ne pensent-ils pas qu'il y a là, juste à côté de leur porte, juste sous leur fenêtre, ç deux pas de leur quartier des gens beaucoup plus instruits, beaucoup mieux outillés et hautement plus qualifiés pour gérer les affaires du peuple ? Eux qui n'ont de discours que pour endormir les gens et qui sont incapables d'en changer, sauront-ils comprendre que nous sommes à l'ère de l'information où seule la connaissance est productrice d'avantages concurrentiels durables et que tout le reste est blablas indécents et ennuyeux ? Chaque génération vit son temps et puis s'en va. Au nom de quoi cette génération s'est-elle donc emparée de l'Algérie et au nom de quoi veut-elle la garder pour toujours ? Peut-on vivre indéfiniment ? Il est temps de partir. A cause de l'âge d'abord, des maladies ensuite et, surtout, de l'inefficacité avec laquelle a été conduit le pays à tous les niveaux. Partez, messieurs, partez ! Partez donc pour que des corrompus, comme ceux qui ont pué notre atmosphère, ne poussent plus sur cette terre car la corruption se nourrit de votre incompétence. Partez pour que cesse d'être dilapidé notre pays par les arrivistes, les parvenus, les malades et les éhontés de tous bords parce que ceux-là ne peuvent sévir que par votre incapacité ? Partez pour que cessent les vols de milliards comme nous n'en connaissions pas, pour que cessent les faramineux détournements des biens du peuple ! Partez pour que les mains se retirent du pipeline et pour que soit coupés les tuyaux qui relient les gisements de gaz aux ventres insatiables de certaines sangsues ! Les algériens nés en 1962 sont, pour certains, grands-pères. N'est-ce pas suffisant pour que ceux qui étaient grands-pères à leur naissance s'en aillent ? Même Bouteflika l'a dit, « tab jnanna », il est temps de partir... Retirez-vous ! Des voix s'élèvent ces jours-ci, celles des apôtres d'un quatrième mandat. Ils hissent le drapeau d'une révocabilité insensée et le slogan d'un quelconque droit démocratique de tout un chacun à se présenter? En fait ce ne sont que les soutiens de l'aggiornamento d'un système en faillite qui veulent, par des arguments aussi ridicules qu'insensés, imposer leur point de vue au peuple et au concerné lui-même. Ces spécialistes du ramassage des restes de sur le boulevard de la Républiques ne peuvent exister de par eux même. Ils appellent toujours au soutien des forts du moment, surtout lorsqu'ils croient pouvoir en tirer encore quelques avantages. Lorsque le secrétaire général du FLN, le dernier en date, a été descendu de son piédestal, ceux qui s'étaient mis à l'échauffement sur la touche avaient tous près d'une éternité derrière. Qui avait 80 ans, qui 99 ans et 364 jours, qui ? et qui? Est-ce possible ? Est-ce encore possible en Algérie au moment où le vent des changements, et surtout de la rupture, souffle un peu partout autour de nous ? Est-ce possible qu'aujourd'hui, et alors que les diplômés alimentent le poisson de la méditerranée, des analphabètes, qui ne trainent, pour tout bagage qu'un acte de naissance du siècle passé, puissent encore prétendre pouvoir diriger les institutions algériennes ? Comment peut-on avoir l'audace de croire un seul instant, lorsqu'on a deux mille ans et quatre jours dans ses veines, que l'on pourrait adapter le pays aux perturbations environnementales qui le pressent ? Comment peut-on avoir l'outrecuidante prétention de vouloir comprendre les besoins d'une génération dont on ne sait ni les comportements, ni les idéaux, ni même la manière de se nourrir ? Et puis après tant d'échecs, est-ce possible que certains puissent encore parler ??? Partez? Mais partez donc ! |
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