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132 délégations
du monde entier, dont une quarantaine de chefs d'Etat, lors de l'intronisation
du nouveau pape. Politique et religion ne sont jamais si séparées que l'on
croit. St- François d'Assise auquel s'identifie le nouveau pape s'était élevé,
au temps des croisades, contre l'Ordre de la curie romaine et appelé à la
fraternité avec les musulmans. Faut-il voir un signe de bon augure du nouveau
pape ?
Si l'élection du nouveau pape, l'argentin Jose Mario Bergoglio le 13 mars dernier concerne, directement, les chrétiens catholiques du monde, elle a aussi des conséquences majeures sur le reste du monde, en cela compris les peuples d'autres confessions religieuses, particulièrement celles musulmane et du judaïsme. En ces temps de mondialisation, de réveil de certains nationalismes, de repli identitaire et confessionnel, de crise économique, sociale et de violences au nom de schismes religieux, la parole et les «actes» du nouveau pape joueront un rôle de première ordre dans l'évolution des relations tant au sein des peuples chrétiens (dialogue œcuménique) qu'entre ces derniers et les autres confessions religieuses (dialogue interreligieux.) On aura beau ignorer le poids des religions dans la vie des sociétés modernes au nom de la laïcité, il n'empêche qu'elles soient présentes dans l'intimité de chacun de nous qu'il soit pratiquant ou non, athée ou agnostique. «Le XXème siècle sera spirituel ou ne le sera pas» avait prédit André Malraux. Et dans la spiritualité au sens large du terme, le dogme religieux prédomine chez les peuples. Malin celui ou celle qui nous démontrerait la pertinence ou non de la «prophétie» de Malraux. Les conquêtes au nom de la liberté individuelle et celles des peuples n'ont jamais autant progressé que lors des dernières décennies du XXème siècle et le début du siècle nouveau et, paradoxalement, jamais les crispations religieuses et les replis identitaires n'ont été aussi tranchés qu'en ce début de XXIème siècle. Jamais la Liberté n'a été confrontée avec autant de violences à l'Ordre religieux. L'Occident qui a fait sa «révolution» en inscrivant dans ses lois celles de la laïcité, en séparant les sphères religieuses et politiques n'en a pas encore fini, définitivement, avec les risques de confusion des deux sphères et le risque d'un retour de comportements liberticides. Politique et religion ne sont jamais si loin l'une de l'autre. Il n'y a qu'a voir le nombre de chefs d'Etat (près d'une quarantaine) et celui des délégations officielles représentant les Etats (132) pour juger de la proximité du politique et du religieux dans le monde. La présence pratiquement du monde entier à l'intronisation du nouveau pape, François, traduit s'il le faut, le niveau des attentes du monde chrétien ou non sur bien des plans dont celles de son apport à la paix, à la justice, à la lutte contre la pauvreté etc. Sur ces plans, la personnalité du nouveau pape peut nous renseigner, quelque peu, sur ses «actes» durant son pontificat. A l'inverse de son prédécesseur, Benoit XVI, marqué par une rigidité dogmatique sur les questions des libertés individuelles et une méconnaissance de l'intériorité de l'islam qu'il a qualifié de «religion de violence», le pape François apparaît comme un homme ouvert au dialogue sans exclusive, simple et surtout fin intellectuel. Et pour cause, il provient des jésuites connus pour la qualité de leur formation : 10 d'études supérieures avec des examens et épreuves d'un haut niveau sont nécessaires pour être ordonné prêtre jésuite. Puis, il y a le choix de son nom papal : François, en référence à Saint François d'Assise, prêtre de la fin du 12ème, début du 13ème siècle (décédé en 1226), fondateur de l'Ordre franciscain. St- François, issu d'une famille de seigneurs a adopté une vie de pauvreté, de prière, au service des pauvres et d'appel à la magnificence de l'unité de la création divine. Il aura à cœur, en pleine croisade (guerre sainte des chrétiens pour conquérir la Palestine et Jérusalem) d'appeler à la paix et à la fraternité entre chrétiens et musulmans. Alors que le pape Innocent III lançait la cinquième croisade, François d'Assise s'élève contre les violences et décide de se rendre chez le sultan d'Egypte, El ?Malik Kâmil, pour convaincre le chef musulman de la nécessité d'ouvrir un dialogue fraternel entre chrétiens et musulmans dans le respect des convictions respectives. Il luttait pour que musulmans, chrétiens et juifs partagent leurs souverainetés sur Jérusalem et fassent la paix (confer «le Soleil se lève sur Assise» d'Eloi Leclerc-1999). Le prêtre affirmait : «Dieu suffit», pour faire admettre la diversité des croyances religieuses, singulièrement celles en guerre de l'époque : christianisme et islam. Il eut cette prophétie d'une brûlante actualité : «Manifestement, l'homme s'est approprié le bien que le Seigneur accomplissait par lui ; il en a fait son affaire personnel, sa propriété.» (idem) Enfin, Saint François refusait le faste et l'Ordre parce qu'il pensait, à juste titre, que cela pouvait conduire à la corruption, à l'injustice : «Il sera toujours difficile de concilier le souffle messianique de la fraternité et les exigences d'un Ordre», disait-il, en référence au règne de la curie Romaine (le Vatican). En choisissant de porter le nom de «François», le nouveau pape donne-t-il un signe au sens qu'il va donner à son pontificat ? C'est-à-dire celui de la recherche de la paix dans le monde, de la tolérance et du respect de toutes les croyances spirituelles ? Et puis, disons-le, de travailler à promouvoir un dialogue respectueux avec l'islam ? Il serait hypocrite de nier l'existence des tensions qui existent aujourd'hui entre le monde musulman et celui chrétien et judaïque. Par la faute de l'interprétation de l'islam par une minorité d'illuminés qui sèment le désordre et la violence (terrorisme), le monde chrétien, sous les manipulations de partis politiques d'extrême droite, regarde les musulmans avec méfiance et défiance parfois. Voilà donc tout le défi qui attend le nouveau pape François : rétablir le dialogue, le respect, la confiance et la fraternité entre les confessions religieuses dominantes que sont le christianisme, l'islam et le judaïsme. Le peu ou beaucoup qu'il fera aidera à la paix, là où les conflits existent et permettra, par conséquent, à sortir les plus faibles (qui subissent la guerre) de l'état de misère dans lequel ils vivent. Il aura alors mérité, pleinement, de porter le nom de Saint François d'Assise, le défenseur des pauvres. Comme quoi, la religion n'est jamais loin de la politique. C'est juste une question d'équilibre et d'intelligence. Bureau de Bruxelles : |
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