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Où est le problème ? C'est ce que se demandaient de
nombreux Algériens qui pressentent confusément que l'attaque d'In Amenas ne
fait qu'annoncer une période de turbulences et de hauts risques. La zone
sahélienne est travaillée, bien entendu, par des djihadistes criminels, des
trafiquants en tout genre, un problème targui irrésolu et, ce serait faire
preuve d'angélisme de l'ignorer, un fort grenouillage de services et des
barbouzes.
Il serait vain de chercher noise aux voisins parce que leurs nationaux ont constitué la «multinationale» qui a attaqué le site gazier de Tiguentourine. Des Algériens en font également partie et ont même un rôle dirigeant. Cette coopérative terroriste internationale commande logiquement une coopération entre les Etats de la région. Mais il ne faut pas croire que cette coopération est automatique. Les tentatives de travail concerté - comme le Cemoc par exemple - n'ont pas vraiment fonctionné en raison de la faiblesse structurelle des relations entre les pays concernés. La tentative de créer une dynamique autonome de gestion des risques par les pays de la région n'a pas résisté aux puissantes interférences étrangères. L'Algérie qui a défendu cette approche au nom d'un refus des interventions extérieures n'a pas eu une diplomatie à la hauteur de l'intention et des buts proclamés. La succession des crises de la Libye au Mali pose clairement la question de la capacité de l'Algérie à peser sur le cours des choses. On a observé avec une distance un peu inquiète les changements en Tunisie, on s'est retrouvé démuni et même sur la défensive dans la crise libyenne. Et sur le Mali, les idées pertinentes sur l'impératif d'une solution politique inclusive entre Maliens - et donc avec les Touaregs - se sont retrouvées dépassées par l'accélération de la situation. Ceux qui avaient d'autres options que la solution politique n'allaient pas donner du temps à l'Algérie. Les djihadistes ont facilement donné l'argument pour l'intervention militaire française. L'attaque terroriste contre In Amenas a servi d'argument pour des appels à une intervention de l'armée algérienne au Mali. L'option a été fermée par la réponse apportée par le Premier ministre algérien. Au grand soulagement de ceux qui considéraient que l'envoi de troupes algériennes hors des frontières est un piège tendu au pays. Il reste cependant à prendre des contre-performances et des échecs tant au plan de la diplomatie que du sécuritaire. Les derniers événements créent, au-delà du réflexe contre les critiques extérieures au sujet de la gestion de la prise d'otages, un sentiment de désarroi. Certains retombent, trop facilement, dans l'auto-flagellation et relookent la vieille idée raciste que les Algériens seraient incapables par nature. Ce serait donc une affaire de «gène» et non pas d'histoire. D'autres en profitent pour charger le président ou l'encenser. Comme si un homme pouvait être plus important que le système qu'il représente. Et bien entendu, on en arrive au fin des fins, on nous suggère qu'il faut abandonner les lubies démocratiques - on ne serait pas «prêt» et ce serait «dangereux» - alors que la montée des périls nécessite, justement, plus de démocratie. On est dans un «système» où le personnel est chargé de certains rôles sans avoir d'obligation de résultats et encore moins de reddition de comptes. Ce système est le problème, il n'est pas la solution. Seule une vie politique démocratique digne de ce nom avec des institutions fortes peut donner de la vigueur à l'Etat. L'Algérie n'a pas besoin de connaître de nouvelles diversions, elle a besoin de s'attaquer résolument au handicap, devenu dangereux, constitué par un mode de gouvernance trop spécifique et très inefficient. |
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