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Partira, partira
pas n'est pas l'enjeu d'un pays. Il est le sien. Son départ ou son maintien
explique la certitude que malaise pour malaise, le mal y est.
Dans son parti, au sein de sa personne, dans le ventre de ses alliés et ses contradicteurs, l'homme n'affiche pas une autonomie personnelle de vouloir à lui seul, de son propre chef se libérer du carcan qui l'enserre. Il renvoie narquoisement ceci, ou à un ordre devant venir d'en haut ou à un verdict du comité central. Faisant de la sorte annihiler la volonté chevaleresque qui devrait caractériser en tant que chef, toute guidance, une fois le contrat de confiance ébréché ou totalement rompu. C'est ainsi que sans oreille attentive ; la longévité incite inexorablement à la naissance des redresseurs. L'obéissance à de simples regards ou à la levée du p'tit doigt quant à elle ; finira par dresser des poils de bêtes. Le mieux de la nature ne se trouve-t-il donc pas dans le meilleur mode de sagesse et de compréhension du jeu politique ? Quand la musique est achevée ça ne sert à rien de continuer à danser. Virevolter ou tourbillonner. Descendre de scène demeure un sursaut salutaire face à l'inévitable tombée de rideau. La vie finira par faire finir tout ce qu'elle a commencé. Le bris qu'avait fait Ouyahia dans la placidité de l'actualité de ce début d'année n'est pas un simple bruitage. Il s'assimile à un rompez-les-rangs pour une caste politique desséchée. La fête est finie. Pour tout le monde. Belkhadem croit se perpétuer dans le hurlement des uns et la neutralité des autres. Le métronome, celui qui évalue les cadences et siffle venue et départ est resté muet. Enfin, trois puis huit de « ses » ministres, de son obédience se sont démarqués de son maintien. Ils le poussent vers la porte au moment où certains de ses amis la lui ouvre. La grogne s'annonce partout. Du dedans et du dehors. Il a été citoyen, éducateur, député, ministre, premier ministre. Il est secrétaire général du parti. L'homme a l'air affable et plein de courtoisie. Une quiétude semble le traverser au moment où il est aléatoirement traversé par des roulis et des typhons. A 27 ans il a connu Boumediene pour être nommé à la présidence comme directeur adjoint des relations internationales. Il avait du talent raconte-on à l'époque. Brillant rédacteur, bel orateur. 5 ans après il est dans la première Assemblée nationale en qualité de député en compagnie de simples patronymes à qui l'avenir allait réserver une grande résonnance. Bensaleh Abdelkader de Tlemcen, Belayat de Sétif, Mahmoud Guenez de Tébessa, Boudjemaa Haichour de Constantine, Layachi Yaker d'Alger et tant d'autres qui s'avéreront plus tard de grosses pointures dans l'unique parti. L'unicité du parti alors n'avait rien apporté comme élément fondateur d'une nation si ce ne fut cette discipline quoique honnie, mais qualifiée d'indispensable pour éviter toute dérive. Le parti unique, et c'est seul mérite ; ne savait que galvaniser les cœurs en leur faisant chanter le nationalisme. Le moindre vent de vouloir dire ou faire des choses en dehors d'un « cadre organisé » s'assimilait de facto à un acte contre-révolutionnaire. La démocratie n'avait qu'une signification occidentale et bourgeoise au moment où, l'appropriation de l'outil de travail, la justice sociale et l'égalitarisme rimaient avec la négation des classes. L'embourgeoisement condamné à plus d'un titre sera une fois la démocratie mise sur scène, un mode apte à appâter les foules et gagner croit-on, l'estime de la populace. Les slogans d'à bas l'impérialisme et la réaction se tairont et les vociférateurs feront la chaîne devant les ambassades des pays qualifiés ainsi. Le parlement en 1977, du temps du jeune loup Belkhadem ne constituait qu'un regroupement de gens réunis pour la galerie tout en faisant office d'une preuve tenant lieu d'un amphithéâtre de libre expression dans le cadre d'une démocratie « responsable et organisée » Fort de 3 mandats électifs à partir de 1977, il briguera la présidence de l'APN à l'âge de 45 ans. À l'époque ; la barbe n'était pas en vogue ni exprimait une quelconque icône ostentatoire d'un courant sous-idéologique. Les seuls barbus que l'on connaissait se distinguaient dans ces années là, par cet élan progressiste et anti impérialiste. Les révolutionnaires. Le petit monde était tout acquis à la barbiche du Che. Donc cet homme n'est pas un atome néophyte venant tourner innocemment dans les sphères du vent et de la tempête. Il s'est aguerri tout au long de ces turbulents changements organiques d'origine politique. Le parti unique dont il est issu s'est atrocement accommodé à l'air du temps qu'avait recommandé un Octobre assaillant. Un parti n'est grand que par la grandeur de ses idées, de ses hommes et enfin de sa dynamique à pouvoir changer et bouger les êtres et les choses. Lorsque la vantardise empêche le bon sens d'unir la saveur du mythe à la réalité de l'erreur ; le projet tardera à venir et le parti vacillera d'une rive à l'autre. Le FLN est devenu le PFLN (Parti et non un Front). Et depuis beaucoup d'encre a coulé à l'instar de l'huile sur le feu et le mensonge sur la promesse. Si la libération du pays avait exigé dans le temps l'utilité nécessaire d'un front unique apte à pouvoir mener vers les rives de l'indépendance l'immense volonté populaire, il en serait un peu autrement après la période postindépendance. Le parti se transformant en un appareil usuel de propagande commençait à se faire sortir de l'option politique qui devrait tendre à réunir davantage les potentialités managériales et gestionnaires. Il faisait plus dans l'inquisition que dans la persuasion politique. L'Etat se confondait dans la rigueur qu'exerçait par fonction non élective le commissaire du parti. L'administration ne trouvait issue que dans l'application de résolutions. Certains de ces Mouhafedhs jurent aujourd'hui par la démocratie ( ?) et l'alternance au pouvoir. A plus de 75 ans ils continuent pour certains à vouloir, en chef redresser les uns les autres. Un poste de sénateur en 2013 vaut-il la même charge qu'un Mouhafedh de 1977 ? La présence structurelle du parti semble donner entre deux échéances électorales l'impression d'une simple existence d'un néant dynamique soit l'illusion de la coquille vide. Les batailles y sont parfois mortelles. Politiquement. Ce grand parti libérateur et rédempteur, artisan du sentiment nationaliste ne serait il plus habité par ces essors rassembleurs et unitaires de la composante patriotique ? Aurait-il subi, à l'instar d'autres corporations le syndrome de l'usure et du vieillissement méthodique et fonctionnel ? Cet anachronisme qui ne devait point sévir au sein des forces vives et centrifuges serait pourtant fait une nature essentielle pour le fonctionnement de tout l'appareil tant central que local. En fait ; le FLN s'est quelque part rajeuni. Dans le profil de l'ancienneté chronologique dans la vie. Soit l'âge. Il a de jeunes et dynamiques militants. Mais juste pour faire face, dans une devanture ; au besoin de l'opinion publique. Le parti qui jusqu'ici remporta la victoire sur un plan et la perdit sur tous les autres se trouvait coincé entre les serres d'un système qui voulut en faire un simple mécanisme de règlement de compte parfois historique. Tous les secrétaires généraux qui se sont mis en orbite avaient été l'instrument prioritaire dans la décantation du pouvoir d'alors. Le parti servait l'humeur politique du jour. Tantôt il prêchait la bonne parole au profit d'un pouvoir, tantôt il faisait dans l'éloge et la déification de personnes. Il était ainsi devenu au regard des foules le réceptacle de l'échec de toute politique. Il jouait le rôle sans avoir en finalité le mot ou l'ultime mot. Dans cette lancée le FLN ne pouvait survivre au court-circuit d'Octobre 1988. Ce dernier en finalité ne lui fut en d'autres termes qu'une aubaine politique pour sa résurrection. Jusqu'aux soupirs languissants de l'agonie organique il lui avait permis en fin de cheminement un certain « ressourcement ». Bien ou mal opérée, cette nouvelle démarche dynamique n'aurait pas réussi totalement du seul fait de l'insistance farouche et sournoise de l'ancienne garde. Manœuvrant à distance, les caciques ne lâchent pas les rennes qui les ont traînés aux zéphyrs de la gloire du jeune Etat. Ils persistent à demeurer et refusent le départ solennel tout en veillant en cas de départ forcé de tout faire pour introduire leur progéniture. L'on semble que l'on se trouve devant une affaire d'héritage sans patrimoine matériel. Belkhadem, durant son règne aux commandes du parti leur a injustement favorisé la mise. Son tord était d'avoir eu à se taire sur les listes familiarisées, clanalisées. A chaque détour de crise, ils le menacent d'aller se joindre à la grogne. Les dernières élections législatives ont été les pires moments de ces tractations, lorsqu'on arrive à placer ses poulains à travers toutes les listes et ce à contre courant de l'opinion publique locale. C'est ainsi que l'on s'aperçoit au fur et à mesure de l'effilement de toutes les élections que les batailles dans le parti n'ont jamais pris l'allure de courants idéologiques contradictoires. C'est la guerre d'un coté et la paix de l'autre. Les conflits opposaient les personnes, les tribus et les familles et non pas les idées ou la nature de projets sociaux. La lutte n'apparaît qu'autour de l'échéance de vote qui fera, croit-on savoir, des hommes publics pour ceux qui n'étaient que de quelconques noms usuels. Les opportunistes, les attentistes et les profiteurs sans idéologie ni conscience et dont l'unique but n'est autre que de continuer à se positionner dans un confort matériel singulier s'agglutinent à chaque rendez-vous à ce glorieux sigle. Alors que dire de ce règne, où après tant d'années d'exercice politique, l'on voit l'argent, l'entreprise, l'industrie, venir dans les listes d'un parti censé populaire ? Supplanté par ses arrières gardes, le FLN n'entend pas se rénover. Il a la peau dure. Il ouvre ses guichets comme une banque. L'on y puise c'est tout. Il ne devait ce respect quelquefois intact et résiduel que par le mythe qu'il tente d'entretenir au moyen de recours itératif et sans cesse rabâché à la légitimité historique. Mais en réalité que lui reste t-il de tout cela ? Il n'est plus le représentant du mouvement national quoique s'essayant de s'inscrire dans une mouvance de démocratie et de modernisme. Ceux qui l'ont fait ne sont plus là. Développant un double discours, il tressaute tel un appareil en manque d'énergie et apporte jusqu'aux fonds du ridicule la preuve de la contradiction et de la chicane. Ils l'ont tout le temps mis à rude épreuve. Pour rien. Que pour des intérêts aigus, restreints et intimement personnels. Depuis sa naissance à ce jour. Du responsable de « l'appareil du parti » aux secrétaires généraux respectifs, la passation de consignes s'est toujours faite dans la brouille, les coups d'état scientifiques ou par la justice nocturne. L'alternance ne s'accomplit que dans le mal à l'autre. Alors de quelle nature va être celle vers qui le vieil homme militant de Tiaret y est acculé ? Le 31 janvier ? Monsieur Belkhadem, contrairement à Ouyahia, ne défraye la chronique que par les frasques dues à la dissidence de ses disciples. Sa personne en tant que quantité intrinsèquement loyale n'a rien à voir avec sa carrure mesquine d'homme d'Etat inachevé. Homme de coulisses, il est gentil, fin argumentateur, semi-bon faiseur d'opinion pas plus. Ouyahia a, quand bien même son profil d'abominé su créer de l'analyse et du commentaire pour ses multiples et diverses décisions. Il en a pris le monsieur (voir quotidien d'Oran du jeudi 10 janvier courant). Il est beaucoup plus répertorié dans le registre du gouvernement et de la gestion des affaires publiques que dans les annales du RND et des rescousses de ses adeptes. Il est né majeur bien avant que son parti naisse tout aussi adulte. L'autre est né dans les couches à unique épaisseur, moelleuses, absorbantes et peu écologique. Il est né mineur dans un parti fondamentalement majoritaire, dominant et omniprésent. Si l'un est un homme politique et d'Etat, le second ; Belkhadem est un grand militant et de longue date. Aucune décision n'apparait comme illustre dans son éphémère passage au gouvernement. Ministre des affaires étrangères en début de mandat présidentiel, il donnait l'air d'un chef de chancellerie. Chef de gouvernement, il faisait coexister le sens et son contraire. C'est ainsi que sur le plan de la symbolique, son nom n'a de phonologie que « FLN ». Qui dit Belkhadem dit parti. Qui dit Ouyahia dit premier ministre. La tranquillité les départage, mais l'acariâtreté les distingue. Ses détracteurs l'accusent de vouloir prétendre, sinon nourrir des ambitions pour une postérité à la magistrature suprême. Mais, à voir ses tendances, ses accointances, sa mine, sa tasse de café, son livre de chevet; l'analyste se brouille à peine d'y croire. Que non. La destinée est une chose, le vœu en est une autre. Tout comme la guerre et la paix. |
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