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«Parce qu'une
langue est semblable au vent, elle poursuit sa fin mêlée de toutes les saveurs
du monde et meurt vidée d'elle-même jusqu'à son renouvellement.» [Hafid
Aggoune]
« Makrout», «taxage», «pipeauter» «psychoter» «comater», «Indignés», «belgitude», «gloups»... Le petit Robert 2013, dictionnaire de référence de la langue française, s'enrichit comme chaque année de nouveaux mots du langage courant. A tout seigneur, tout honneur, le gâteau Makrout, notre «choucroute» nationale fait son entrée illico-presto dans le dico 2013. Notre «losange des plénitudes savoureuses» est désormais de dimension internationale. Le bateau de Makrout de Hassan Terro est arrivé à bon port. Cette délicatesse au gout renouvelé sans cesse, à chaque dégustation, qu'elle soit ramadhanesque ou jour de liesse. Par cette distinction ce gâteau vient immortaliser définitivement ses lettres mielleuses de noblesse. Ce met délicieux fait incontestablement partie de notre patrimoine gastronomique. Plus encore cette sucrerie est le symbole de nos joies, elle nous a accompagnés et nous accompagne dans les moments les plus intenses de notre existence. Omniprésent, de la circoncision, aux festivités les plus diverses. À la célébration de noces, il est érigé en chef de fil du cortège frugal traditionnel des douceurs sucrées. Servi au premier jour des fêtes de l'Aid, sa consommation est réduite et programmée. Denrée précieuse qui représentera les couleurs de la famille dans le rituel des échanges de plats garnis entre proches et voisins. Le goût du Makrout demeure la clé de voûte du savoir-faire raffiné. Sacré Makrout, ta consécration est méritée car tu nous as balisé tous les points d'ancrage de notre route. Le mot «taxage», québécisme qui signifie racket dans le dico 2013 est tout le contraire du plaisir procuré par notre Makrout. Equivalent de «rachoua» «chkara», «kahoua» ou «tchipa», il nous conduit dans les méandres de la corrupt. Chez nous le taxage est devenu un incontournable rouage de notre entourage. Il s'arrose partout. Cette «transaction» financière est aujourd'hui à la page, c'est notre Agence de Notation1 (dico 2013) monétaire. Elle gère en monnaie sonnante et trébuchante le parcours de notre vie. Le taxage fait partie de notre paysage. Ses dividendes les plus prolifiques se situent là où le brassage pécuniaire est à son plus haut sondage. Nous vivons dans l'Âge d'or du taxage. Les barrières du péage sont à tous les niveaux, de son extrait de naissance à son certificat de décès. A travers ces pratiques déshonorantes, aujourd'hui on ne daigne plus gagner honnêtement sa croûte à la sueur de son front mais plutôt chasser le gros Makrout. On psychote2 (dico2013) déjà sur l'avenir de nos enfants. A force de comater3 (dico2013), au lieu de réagir, on finira par prendre cette malversation pour une dette souveraine4 (dico 2013). Le mot «pipeauter» qui signifie baratiner dans le dico 2013, trouve toute sa latitude dans notre milieu ou son équivalent peut être notre marque de fabrique c'est à dire «psycher». De l'épicier du coin qui vous pipeaute lorsque vous demandez des explications sur la cherté des prix, au pharmacien du quartier qui tente de vous pipeauter pour vous fourrer l'équivalent d'un médicament pas très net. Ou le marchand du Souk qui nous pipeaute pour nous caser sa camelote. C'est à qui pipeaute le plus l'autre. On nous pipeaute à tue-tête sur les bienfaits de son vote pour nous rouler le soir venu dans la farine de sa fraude. On nous pipeaute indéfiniment sur les principes, les lois et les codes pour bien les fouler dans la foulée de sa litanie. A forcer de pipeauter dans ses discours, on finit par croire à ses détours. On pipeaute sur les avantages de sa rente pour découvrir plus tard l'effarant fossé dans sa descente. On nous l'a dit, on a l'art de pipeauter mais aussi de papoter pour transformer une défaite en une victoire contrefaite. En somme les 300 nouveaux mots recensés qui font partie du petit Robert 2013 sont à la fois un décryptage de l'actualité économique, en particulier ceux liés à la crise comme «agence de notation», «dette souveraine», «creusement», «justice sociale» ou «les indignés» et de la révolution numérique qui s'impose avec «cyberdépendance», «billet» (d'un blog), «nuage informatique», «mémoire flash», «Netbook» ou des termes plus obscurs tels que «permalien», «réseautique», «rétrolien» et «DivX». L'écologie et le nucléaire ferment la marche. Les mots de jeun'z comme on les surnomme se taillent la part du lion dans les termes jargonneux. A quand le dico de notre argot populaire, très significatif à bien des égards sur nos comportements sociétaux. Salam . |
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