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Comme il fallait s'y attendre, les réactions occidentales à
la crise qui a éclaté entre la Turquie et la Syrie provoquée par l'incident de
l'avion turc abattu vendredi dernier par les défenses aériennes syriennes sont
unanimement en faveur du premier pays. Elles jugent toutes l'incident «
inacceptable » et en font porter la responsabilité aux autorités syriennes
accusées « d'absence de respect pour les lois internationales, la vie humaine,
la paix et la sécurité ». Pour sa part, la secrétaire d'Etat américaine Hillary
Clinton a précisé que les Etats-Unis vont travailler avec Ankara à une réponse
appropriée à cet acte qu'elle a qualifié « d'éhonté ».
Evidemment, ces prises de position ne sont pas faites pour faire retomber la tension entre les deux Etats concernés, et il faut s'attendre à des développements graves dans la crise qui les oppose. La perspective est clairement envisagée par les autorités turques et leur Premier ministre R.T. Erdogan a prononcé hier un discours qui ne laisse planer aucun doute sur la détermination à «punir» le régime de Damas «coupable de défier la puissance turque». L'on assiste en fait de la part des autorités turques à un véritable matraquage «patriotique» sur l'incident visant à préparer la population au déclenchement imminent d'un conflit armé avec le voisin syrien. Les réactions occidentales toutes à charge contre la Syrie, l'exploitation de l'incident par Ankara montrent à l'évidence que celui-ci a été prémédité pour donner corps à un « casus belli » dont l'exploitation rendrait légitime une intervention armée étrangère contre le régime de Damas. Ce qui ne pouvait s'envisager autrement. En engageant une opération de ce genre, les Turcs espèrent qu'elle ne sera pas dénoncée en tant qu'agression, mais admise en tant que riposte à un acte de provocation « inacceptable » commis par un régime par ailleurs mis au banc de l'infamie par la communauté internationale pour les violences criminelles qu'il exerce contre la population syrienne. Il ne faut pas s'attendre à ce que l'OTAN interpellée par la Turquie cherche à calmer l'ardeur guerrière qui enfle en Turquie. Leurs buts coïncident consistant à vouloir accélérer l'effondrement du régime syrien. Ce que ne peut faire l'opposition armée syrienne à elle seule. Sauf qu'une intervention ouverte de la Turquie ne sera pas une « promenade armée » comme pourraient le penser des stratèges atlantistes et turcs. D'ailleurs, l'incident de l'avion abattu démontre que l'armée syrienne a les capacités de répondre aux coups. En prenant l'initiative d'une opération militaire contre la Syrie, la Turquie offrira au régime de Damas l'argument justificatif à la thèse qui est la sienne sur la crise à laquelle il est confronté. A savoir que la Syrie est victime d'un complot international visant à détruire son Etat coupable de s'opposer à une recomposition régionale allant dans le sens des intérêts géopolitiques et économiques de l'Occident et d'Israël. Dans l'affaire du bateau turc dont l'arraisonnement en pleines eaux internationales par la marine israélienne avait occasionné la mort de neuf citoyens turcs, Erdogan et son gouvernement ont prouvé qu'ils savent être pragmatiques et faire dans la retenue sans abdiquer sur l'essentiel : faire valoir le respect dû à l'Etat turc. Dans l'incident de l'avion avec la Syrie, ils semblent bien être tentés par l'aventure, encouragés et poussés par des puissances qui les ont fermement dissuadés d'agir ainsi dans le premier cas. Si Ankara persiste à vouloir engager le fer avec le régime syrien au prétexte de l'incident de l'avion, les Turcs ne feront au final que tirer les « marrons du feu » au profit des puissances occidentales qui les y encouragent. |
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