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La dictature «arabe» est désormais d'une routine
insupportable: on y retrouve toujours et toujours les mêmes rôles. D'abord un
Président venu au Pouvoir par les militaires, maintenu par la fraude électorale
et qui, plus il avance dans l'âge, plus il demande des pourcentages de «oui»
faramineux pour combler les creux de ses caprices. Le dictateur a aussi,
généralement, plus de 75 ans, se présente comme l'héritier d'un Père de la
nation mort depuis longtemps et possède soit un fils aîné promis au pouvoir,
soit une femme qui le détient déjà, soit un frère qui en possède la moitié.
Dans le casting, on retrouve le fameux ministre de l'Intérieur qui dit la même
phrase du Golfe à l'Océan, c'est-à-dire n'importe quoi. Connu pour soutenir
l'insoutenable, on le retrouve à réciter des chiffres qui font rire après
chaque élection, à expliquer que «les manifestants sont des délinquants» ou à
menacer que personne ne peut déstabiliser l'Etat, c'est-à-dire lui et son
maître et leurs quelques alliés. Dans l'ordre, on retrouve aussi un parti
«majoritaire», façon moderne de dire «parti unique». Lequel parti est géré et
possédé et embrassé de force par une équipe qui a généralement l'âge du
Président, répétant des phrases débiles sur la nation et la réforme, l'héritage
et les constances et que le Pouvoir utilise comme un club de domestiques politiques.
Le cadre général est consolidé souvent avec un appareil syndical servile et
voleur d'argent et de cotisations et de faux concurrents à la Présidence et à
usage multiple, tolérés pour les besoins du coloriage avec, en aide de camp,
une armée endoctrinée au culte de la stabilité ou impliquée dans le festin
national.
Le Pouvoir possède aussi quelques journaux du clan, des médias sous la botte et une mainmise sur les marchés stratégiques pour s'assurer la collaboration stratégique des Occidentaux. Dans ce schéma panarabe, le dictateur est, généralement, lui-même ministre de la Défense (on ne vole pas un voleur) et son fils, sa femme ou son frère gèrent les milieux d'affaires et le patronat fragile ou complice du pays. Quand éclatent des émeutes ou naissent des oppositions, le dictateur se tait pour mieux souligner sa souveraineté qui ne daigne pas se pencher sur les petits détails intestinaux du pays, le ministre de l'Intérieur envoie des policiers frapper ou interdire en expliquant qu'il s'agit de délinquants; un communiqué de terroristes d'El Qaïda est rendu public avec démantèlement d'une cellule djihadiste pour bien faire passer le message aux Occidentaux, puis le peuple est divisé en deux: un partie recevra plus de semoule et l'autre plus de coups de matraque. Et cela se passe ainsi du Maroc au Yémen. Et cela dure depuis dix ans, vingt ans, trente ans. Et cela ne change pas même si cela est indécent, risible, assassin ou comique. Même s'il s'agit de la dernière minute du règne. Même si le peuple est à la porte du palais ou maudit le dictateur à chacune de ses apparitions. Car le dictateur, au bout de si longues années, finit par se dire que si un peuple le supporte depuis si longtemps sans rien dire, c'est parce que ce peuple n'existe pas en définitive et que donc rien ne peut arriver selon ce que lui dit son ministre de l'Intérieur. Conclusion ? Une blague circule sur le net, résumant dans le rire acide l'amère réalité: lorsque Dieu envoya l'ange Azraël à Moubarak pour cueillir ce qui lui restait d'âme et que l'ange lui dit «Tu ne fais pas des adieux à ton peuple ?», Moubarak lui répondit «Ah bon ! Le peuple s'en va quelque part ?». La blague est valable pour le reste des 21 de la Ligue. |
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