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L'Algérie et
l'Egypte se ressemblent comme des frères. Inventaire Les Egyptiens sont-ils nos
frères ? Oui, devrait-on répondre, sans hésiter. Ils nous ressemblent tellement
qu'ils sont parfois notre simple reflet dans un miroir. Entre l'Algérie et
l'Egypte, en effet, il y a une différence de forme, de degré, mais pas de
différence de fond. Car, si les deux pays affichent certaines dissemblances
dans leur manière de se présenter au monde, le fonctionnement des deux pays, de
leur économie et de leurs systèmes politiques, est largement similaire. Y
compris dans les crises, dans la manière de les affronter, et dans ce penchant
à vivre dans l'illusion, en refusant de faire face au réel.
Certes, l'Egypte est plus pauvre, avec une population plus importante, et davantage de contraintes. Les problèmes y sont plus aigus, et les perspectives sociales pour de larges catégories sont plus sombres. Pour l'Egypte d'en bas, la vie est difficile, parfois pénible, quand elle n'est pas insupportable. L'Algérie, de son côté, dispose a priori d'une certaine aisance financière, grâce à laquelle elle assure plus de subventions. Elle réussit, par le biais de dépenses gigantesques, à maintenir certaines catégories de la population au-dessus du seuil de la famine. Mais ceci ne fait pas illusion. Car s'il y avait un indice du bonheur, rien ne prouve que le résultat serait en faveur de l'Algérie. Le calcul du taux de suicide pour 1.000 habitants risque d'ailleurs d'être favorable à l'Egypte. En outre, les deux pays affichent la même fragilité et la même dépendance. L'Algérie dépend des hydrocarbures, l'Egypte dépend du Nil. Pour quelques décennies encore, les hydrocarbures offrent un avantage à l'Algérie, qui dispose d'un moyen pour décoller, mais elle n'y est pas arrivée jusque-là. L'Egypte, elle, est une création du Nil. Elle a survécu grâce à lui, mais des incertitudes planent sur l'avenir. Sur un plan statistique, on trouve des convergences étonnantes. Les deux pays ont vu leur population multipliée par quatre en un demi-siècle, et alignent une espérance de vie équivalente, un peu au-dessus de soixante-dix ans. Le PIB national a été presque équivalent pour les deux pays, même si celui de l'Egypte est plus stable, l'Algérie étant dépendante des fluctuations des prix des hydrocarbures. Les deux pays ont aussi connu la même évolution démographique : une explosion entre les années soixante et quatre-vingt, suivie d'une chute importante de la fécondité, qui rapproche les deux pays des normes des pays développés, avec une fécondité supérieure à deux pour l'Egypte, légèrement inférieure pour l'Algérie. C'est cependant sur le terrain politique que les convergences sont les plus frappantes. L'Algérie et l'Egypte ont tous les deux vécu, dans la même période historique, des révolutions populaires, qui ont débouché sur des succès politiques, économiques et sociaux importants, avant de glisser lentement vers l'impasse. C'est une période où les pouvoirs autoritaires bénéficiaient d'une popularité réelle, mais factice, car elle n'était pas appuyée sur un fonctionnement institutionnel. Tous deux ont alors hérité de pouvoirs aux ressemblances frappantes. On y trouve en effet un système politique autoritaire, avec un multipartisme formel, dans lequel les partis ne jouent qu'un rôle de figuration. Ils constituent en fait une simple clientèle du pouvoir. Le vrai pouvoir, lui, se retrouve en réalité ailleurs, loin, très loin des partis. Même dans le domaine de la corruption, les deux pays semblent avoir décidé de se rapprocher. Certes, le mot backchich vient d'Egypte, mais l'Algérie s'est largement appropriée le concept, pour en faire un de ses moteurs de fonctionnement. Dans le baromètre de Transparency International, ils sont très proches, si proches qu'ils sont tous les deux à la 111ème place ! Face à la crise dans laquelle ils se sont enlisés, les deux pays ont recours au même procédé : vivre dans la fiction. Tous deux affichent des ambitions démesurées, prônent des démarches qui ont prouvé leur échec, et persistent dans des voies sans issues. Et quand la crise se fait pressante, ils brandissent un passé glorieux, une histoire millénaire et glorieuse. Une telle ressemblance devait amener les deux pays à envisager un match de football dans la même logique. A la veille d'un match qui devait les opposer, la question qui s'est imposée pour les deux pays ne concernait pas les choix sportifs à faire gagner le match, mais la meilleure manière d'en tirer le meilleur profit sur le plan politique. Et comme la crise est plus aiguë en Egypte, Le Caire y a mis les plus gros moyens. |
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