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Le nouveau président américain participe coup sur coup à deux sommets décisifs. Il décidera pour les Arabes, qui ne sont pas encore prêts à décider pour eux. Barack Obama fera sa grande entrée en politique internationale cette semaine, à l'occasion de deux sommets qui devraient durablement marquer les relations internationales. Il se rendra coup sur coup à Londres puis à Strasbourg, pour les sommets du G 20 et celui de l'OTAN, avant de visiter la Turquie, un allié traditionnel des Etats-Unis, situé en première ligne face aux zones de turbulences en Orient. Depuis son intronisation, il y a deux mois, le président Obama n'avait guère eu la possibilité d'intervenir en politique internationale. Il était englué dans la crise économique, et consacrait beaucoup de temps à la formation de ses différentes équipes et à l'organisation de la transition. Il avait aussi besoin d'une connaissance plus complète des dossiers, et de se frotter à l'establishment, avant de définir la nouvelle politique américaine. C'est désormais chose faite, du moins sur les grands dossiers. Sur l'Irak, l'Afghanistan et l'Iran, la nouvelle administration américaine a défini de nouvelles lignes, qui ont un dénominateur commun: un rôle y est concédé à l'Iran, appelé à devenir un partenaire au lieu de rester figé dans le rôle d'ennemi définitif. D'ores et déjà, l'Iran « cogère » l'Irak avec les Etats-Unis, selon la formule qui veut que « l'Irak est un pays occupé par les Américains et géré par les Iraniens ». Dans la même veine, les Etats-Unis veulent donner un rôle à l'Iran dans la gestion de la crise afghane. Le pays des Talibans est appelé à devenir le nouveau front pour la lutte contre le terrorisme, et une partie des forces retirées d'Irak y seront affectées. Les Américains sont arrivés à la conclusion que la démarche engagée jusque-là ne pouvait pas réussir: ils avaient trop d'ennemis, pas assez d'alliés. Il fallait changer la donne. Ils ont donc opéré un double virage en Afghanistan. En plus du rôle consenti à l'Iran, ils ont décidé de négocier avec les Talibans « modérés », avec un objectif clair: jeter les ponts avec une partie de l'opposition islamiste armée, pour trouver de nouveaux alliés internes et réduire les rangs de l'adversaire. Signe de cette nouvelle démarche envers l'Iran et l'Afghanistan: les Etats-Unis ont participé cette semaine à une conférence internationale sur l'Afghanistan, conférence à laquelle étaient conviés des représentants iraniens. Ce n'est pas encore la normalisation avec Téhéran, mais c'est un premier pas. Avec, en perspective, la possibilité de reconnaître à l'Iran une place et un rôle dans l'échiquier régional. C'est la différence fondamentale avec la démarche des anciennes administrations américaines: au lieu de faire la guerre à certains pays, comme l'Iran, Barak Obama essaiera de les intégrer au sein d'un nouveau dispositif, dans lequel les Etats-Unis resteraient dominants, mais non acteurs exclusifs. Ainsi, au lieu de maintenir indéfiniment des relations tendues avec l'Iran, Washington semble préférer en faire un allié, qui sera associé à la mission de gestion de la paix dans la région. La nouvelle donne mettra du temps à se mettre en place, tant la méfiance est grande entre les deux pays, mais le dégel pourrait intervenir rapidement. Ces choix américains devraient être appuyés sans trop d'hésitations par l'OTAN, qui reste la principale force militaire dans le monde. L'OTAN vient d'ailleurs de bénéficier du retour, symbolique et opérationnel, de la France, avant de s'engager dans une nouvelle réforme qui devrait consacrer la prééminence américaine, tout en donnant aux autres partenaires des places symboliques plus consistantes. Le sommet de Strasbourg consacrera cette nouvelle ligne, et tentera de définir une nouvelle démarche envers la Russie, sujet qui ne fait pas encore consensus. Autre sujet non consensuel: la gestion de la crise. Le G 20 avait, dans un premier temps, affiché une ambition commune, lutter ensemble contre la crise. Mais les dégâts ne sont pas subis dans les mêmes proportions, et les responsabilités ne sont pas les mêmes. Certaines divergences ont vu le jour, comme sur la manière de faire face aux paradis fiscaux. Mais quel que soit le résultat du sommet de Londres, il marquera durablement l'économie internationale. L'enjeu est tel pour les Etats-Unis que l'échec semble exclu. D'autant plus que Barack Obama ne peut conclure sa première grande sortie par un échec. Il ne reste plus qu'à savoir quelles conséquences auront, pour l'Algérie, le Maghreb et le monde arabe, le sommet du G 20 et celui de l'Otan. Encore faudrait-il voir si les pays arabes ont préparé ces échéances. Le sommet arabe de Doha a éludé ces questions. La rencontre a été dominée par les traditionnelles frasques de certains dirigeants, les conflits personnels, donc non politiques, et le soutien affiché au président soudanais Omar El-Bechir. Les questions de fond n'ont donc guère été abordées. Le Maghreb n'existe pas encore comme centre de pouvoir. L'Afrique non plus. Maghreb, monde arabe et Afrique sont donc condamnés à subir le sort qu'on leur réserve. L'Algérie, quant à elle, a un autre handicap. Elle ne peut décider dans une conjoncture aussi incertaine, car elle est plongée dans un grand suspense électoral. Il faudra donc attendre la nouvelle administration algérienne pour étudier toutes ces questions. On saura alors si Obama connaît l'Algérie. |
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