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Du football à l'économie, en passant par la vie sociale et la culture, les archaïsmes dominent. État des lieux. Un match de foot n'a pas eu lieu. Une nouvelle réglementation économique a été promulguée. Une enquête sur la place des femmes dans la société a été publiée. Le point commun entre ces informations sans relations apparentes ? Elles révèlent, toutes, la régression sociale, culturelle et institutionnelle que subit le pays depuis de longues années. Cette régression a largement débordé le champ social, pour s'étendre aux sphères économique et institutionnelle, confirmant que ce qui fait office d'élite politique du pays assume désormais et amplifie les archaïsmes de la société. Plus encore, certains acteurs économiques et sociaux restent très en avance sur l'élite politique, qui veut à tout prix tirer la société vers le bas. En ce sens, cette élite politique constitue désormais une entrave sérieuse à la modernisation du pays. A Sétif, le match devant opposer l'équipe locale à celle des voisins de Bordj Bou-Arréridj, programmée pour le lundi 9 mars, n'a pas eu lieu. Au-delà des motifs invoqués, relatifs à la sécurité, et au-delà des accusations que les deux parties s'échangent, l'événement est d'abord un révélateur de l'état de la société algérienne. Une société minée par une colère sourde, aveugle, explosant de manière destructrice au moindre prétexte. Même quand elle n'explose pas, cette colère sert d'alibi pour couvrir des peurs, des incompétences, et raviver des archaïsmes tribaux dévastateurs. La dégradation s'est faite par glissements, pour aboutir à une situation absurde, dans laquelle un match de football se transforme en un affrontement tribal, régional, ou ethnique. Tous les éléments se sont concentrés pour déboucher sur ce cocktail explosif : une organisation approximative, des règles du jeu non transparentes, des manipulateurs à tous les niveaux, de faux consensus aboutissant à la désignation de dirigeants peu crédibles, liés à la nomenklatura locale et soucieux d'abord de leurs petits intérêts. A cela s'ajoute des appétits de plus en plus féroces, et des dérives devenues banales. Ainsi a-t-on pu lire il y a quelques semaines, au stade de Sétif, une affiche sur laquelle il était affirmé que l'Entente de Sétif était pour un troisième mandat au profit de M. Abdelaziz Bouteflika ! Cette dérive ne se limite pas au football. L'ensemble des domaines de la vie sociale sont submergés par des fonctionnements parallèles. On a progressivement inventé des règles qui obéissent plus à l'humeur du moment qu'à l'analyse et aux projections sérieuses. Ainsi, a-t-on abandonné, pendant des années, toute idée de régulation économique, en confiant au FMI le soin de dicter des règles supposées apporter la prospérité, avant de tout remettre en cause du jour au lendemain, pour imposer des taxes et des conditions qui risquent d'anéantir le peu qui a été réalisé. Sous prétexte que les règles instaurées n'ont pas donné de résultat, des bureaucrates ont fait semblant de redécouvrir les vertus de ce qu'ils appellent pompeusement le nationalisme économique, et qui se révèle en réalité comme un bricolage sans fin. Le résultat est évidemment sans appel. Dans les classements relatifs à l'efficacité économique, à la rentabilité de l'investissement ou à la transparence des règles économiques, l'Algérie se classe invariablement au-delà de la centième place, souvent autour de la 150ème place. L'apport des banques algériennes au développement économique n'atteint pas celui de certains pays africains totalement dépourvus de moyens. Il n'y a plus d'étonnement dès lors, lorsqu'on constate la régression du pays face à des questions qui paraissaient réglées, comme le travail des femmes. Selon les résultats effrayants d'une enquête réalisée par le Centre d'Information et de Documentation sur les Droits de l'Enfant et de la Femme (CEDDIF), un tiers des Algériens seulement seraient favorables au travail des femmes. 45 pour cent des hommes sont hostiles au travail des femmes, contre seulement 37 pour cent qui sont favorables. Par contre, 45 pour cent des hommes interviewés refusent le travail féminin. Plus grave encore, les réponses montrent un recul par rapport à une enquête menée en 2000. Le taux des hommes hostiles au travail féminin est passé de 32 à 38 pour cent. La même tendance est observée également chez les femmes : 18 pour cent étaient hostiles au travail féminin en 2000, contre 25 pour cent en 2008 ! La conséquence de cette évolution sur l'activité politique est évidente. Seuls 19 pour cent des personnes interrogées se disent favorables à une Algérie « moderne », avec des valeurs comme l'égalité des sexes. Inversement, près de 40 pour cent des Algériens restent hostiles à une plus grande implication des femmes dans la vie politique. Ces chiffres ont un mérite : ils confirment que l'Algérie évolue de manière cohérente vers plus d'archaïsme et qu'elle s'éloigne irrémédiablement de la modernité. A la veille d'une échéance aussi importante que des élections présidentielles, il ne serait peut-être pas superflu de tenir compte de ce cheminement au moment de prendre une décision. |
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