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Le rêve comme semence de l'espoir

par Kamal Guerroua

«On peut rendre fou quelqu'un en l'empêchant de rêver, dit la psychanalyste anne dufourmantelle. On peut aussi sauver sa vie en écoutant ses rêves à temps.» si le rêve, à titre individuel est essentiel, pour la société, il est aussi vital que l'eau, le logis et la nourriture. Pas d'exagération dans ce qui précède car, une société qui ne rêve pas est une société à déclarer morte sur le registre de l'état civil de la mairie. Le rêve, c'est le commencement de la construction de l'imaginaire collectif. J'aime un mot de karl popper qui parle de «l'architecture de l'imaginaire collectif chez l'homme social».

L'homme social pour ce philosophe, c'est celui qui rêve en permanence de changer les choses pour le meilleur. Qui plus est jette, une à une, les pierres qui vont fonder son édifice, c'est-à-dire l'architecture du corps et de l'esprit de la société. Cela dit, s'il n'y a pas de rêves, il n'y aura plus d'espoir. Et forcément s'il n'y pas d'espoir, plus aucune action. C'est la léthargie, synonyme du fatalisme où toutes les théories de «Allah ghaleb» seront convoquées, pour justifier l'échec et l'inaction. C'est pourquoi, on dit qu'une société où les artistes ne sont pas valorisés est une société qui creuse sa tombe, qui est en déchéance, en état d'agonie. Pourquoi l'artiste? Parce que, tout simplement, ce dernier est la pierre angulaire de l'architecture sociale, c'est l'âme de la société, le déclencheur de ses rêves...

L'artiste, c'est le semeur de rêves. Où ? Dans le sol, la terre et l'âme de la société. Puis, l'artiste, c'est aussi un éclaireur. Il donne à réfléchir, il donne à penser, il donne à rêver, il donne à s'instruire, il donne à espérer. Son rôle, c'est d'éveiller les consciences et de leur donner le goût du rêve. Le rêve, il faut le semer dans le sol de la société, l'arroser, en prendre soin, le greffer s'il est possible, et en faire d'autres implants, afin de le fructifier. Somme toute, le rêve c'est un chemin incontournable vers le progrès. Au Mexique et dans certains pays de l'Amérique latine, pendant de longues années, artistes et peintres s'étaient mis à investir les rues et les cités. L'objectif, faire des tableaux muraux, dessiner les valeurs révolutionnaires et les idéaux des luttes sociales sur les murs des villes, des écoles, des universités, des places publiques, etc. Au bout d'un moment, toute la société s'est mise à son tour à rêver avec ces artistes-là et finalement, au bout de quelques décennies, la prise de conscience des enjeux sociaux s'est fait sérieusement sentir, malgré tous les obstacles qu'ont posés le néocolonialisme, les dictatures, les coups d'Etat, etc. La société s'est formée par elle-même, dans le giron culturel et artistique de son élite : c'était une sorte de théâtre populaire à ciel ouvert. On revient ici, bien sûr, à la problématique de «la libération de la parole» et qui dit «libérer la parole, dira «libérer le rêve», et ouvrir les horizons de L'ESPOIR...