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La poudrière du Sahel

par Abdelkrim Zerzouri

Si le retour à l'ordre constitutionnel au Niger est prôné par l'ensemble de la communauté internationale, une intervention militaire dans ce pays pour forcer le retour à la légalité et libérer le président Mohamed Bazoum, destitué par les militaires, selon une annonce d'un groupe de soldats à la télévision nationale dans la nuit de mercredi à jeudi 27 juillet, ne fait pas du tout l'unanimité dans le concert des nations. L'intervention militaire au Niger divise, au sein même des pays membres de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), premier groupe directement concerné par ce coup de force militaire, et dont les chefs d'Etat n'écartent pas le recours à la force militaire conjointe, même si elle reste « la dernière option sur la table ».

La Cédéao, qui a déjà mis en exécution de lourdes sanctions contre le Niger, a donné jusqu'à dimanche aux putschistes pour rétablir dans ses fonctions le président Mohamed Bazoum, sous peine d'utiliser «la force». Le Mali et le Burkina Faso, suspendus de ce groupe et de l'UA, avec la Guinée, après des prises de pouvoir par des militaires, considèrent une intervention militaire au Niger comme une déclaration de guerre contre leurs pays. L'Algérie, sans partager les mêmes considérations des deux pays en question, a mis en garde contre toute intervention militaire étrangère au Niger. A travers un communiqué du ministère des affaires étrangères, l'Algérie a appelé « à la prudence et à la retenue face aux intentions d'intervention militaire étrangère, des intentions qui ne sont malheureusement pas exclues et qui sont susceptibles d'être mises en œuvre, mais qui ne représentent que des vecteurs de complication et d'aggravation de la crise actuelle ». Non sans renouveler « son profond attachement au retour à l'ordre constitutionnel au Niger et au respect de l'Etat de droit, de même que le gouvernement algérien réaffirme à cet égard son soutien à Monsieur Mohamed Bazoum en tant que président légitime de la République du Niger ».

Mais, «ce retour à l'ordre constitutionnel doit être réalisé par des moyens pacifiques qui éviteraient au Niger frère et à l'ensemble de la région une aggravation de l'insécurité et de l'instabilité, et à nos peuples davantage de vicissitudes et de tragédies », a précisé la même source. Une vision partagée par Moscou, qui estime qu'une intervention militaire ne permettra pas de résoudre la crise au Niger. «Il est peu probable que l'intervention de forces extrarégionales puisse améliorer la situation», a déclaré aux journalistes le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, tout en appelant au «retour rapide à l'ordre constitutionnel» au Niger. Tous ces appels à la non-intervention militaire au Niger seront-ils entendus ? La Cédéao passera-t-elle à l'exécution du plan de la « dernière option sur la table » après le retour bredouille de sa délégation dépêchée, jeudi dernier, à Niamey pour discuter d'une solution à l'amiable avec les chefs militaires ? Le Sahel se transforme en véritable poudrière, c'est l'option qu'il faut prendre très au sérieux.