
En vieux
briscard de la communication, le maire de Béziers, Robert Ménard, ancien
secrétaire général et co-fondateur de l'Organisation non gouvernementale (ONG)
Reporters sans frontière (RSF), a su focaliser les feux de la rampe sur sa
personne dans des moments particulièrement chauds en France, où exprimer sa
haine de l'immigré est devenu, chez une certaine classe politique, presque une
fierté nationale. Quitte à se mettre hors-la-loi, le maire de cette ville
française a refusé de marier un Algérien et une française sous prétexte que le
jeune Algérien se trouve en situation irrégulière en France, sous le coup d'une
obligation de quitter le territoire français (OQTF). Pourtant, la loi est
claire, notamment l'article 12 de la Convention européenne des droits de
l'Homme, qui stipule qu'«à partir de l'âge nubile, l'homme et la femme ont le
droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant
l'exercice de ce droit», ainsi que deux décisions du Conseil constitutionnel,
rendues en 1993 et en 2003, qui reconnaissent cette liberté du mariage et sa
conformité quelle que soit la situation administrative des futurs époux. Dans
le cas de ces futurs mariés, l'autorité judiciaire, représentée par le
procureur de la République, ne s'est pas opposée à ce mariage. Que se
passe-t-il dans la tête de ce maire qui veut fonder sa propre République à
l'intérieur de la République française ? En haut lieu, on lui a répondu que
s'il veut qu'une personne en situation irrégulière soit interdite de mariage,
il doit faire une proposition dans ce sens dans la prochaine loi sur
l'immigration. En l'état actuel des choses, il ne peut pas s'opposer à ce
mariage. Il peut, bien sûr, se mettre hors-la-loi, et refuser d'officier ce
mariage, mais il risque gros. Car, la mariée, une Française, qui a tous les
droits qu'il a lui-même, ne lui pardonnera pas cette offense. Déjà, dans le
sillage de sa tentative de ternir l'image du futur mari, affirmant qu'il est
«connu des services de police pour vol avec recel et agression», la future
mariée a dénoncé à travers les médias l'illégalité de la décision du maire, non
sans lancer que «c'est lui le voyou». L'affaire ira devant les tribunaux, car
les futurs époux ont décidé de porter plainte contre le maire en question, qui
risque gros, jusqu'à cinq ans d'emprisonnement et 75.000 euros d'amende, sans
parler de la sanction administrative (le Conseil des ministres peut procéder à
sa suspension).
Que
gagne-t-il dans cette affaire ? Une aura politique dans le cercle de l'extrême
droite. Une partie des Français est, de plus en plus, remontée contre les
étrangers, les Maghrébins particulièrement, suite à un matraquage en règle qui
laisse croire que tous les malheurs de la France sont provoqués par
l'immigration. La tension qui a régné, ces derniers jours, dans plusieurs
régions en France, suite à l'assassinat du jeune Naël,
a légèrement baissé, mais certains veulent encore plus de spectacle.