Le
président tunisien, qui a rejeté récemment les conditions du Fonds monétaire
international (FMI) pour le déblocage d'un prêt de près de 2 milliards de
dollars, comme la restructuration des entreprises publiques surendettées, qui
conduira inévitablement aux licenciements des travailleurs, ainsi que la levée
des subventions étatiques à des produits de base, qui constitue un risque
énorme d'explosion populaire, en fera-t-il de même
avec l'offre alléchante d'un milliard d'euros mis sur la table par l'Union
européenne ? Le forcing de la présidente du Conseil des ministres italien Giorgia Meloni a mobilisé toute
l'Europe pour trouver des solutions à la crise économique en Tunisie, notamment
à la suite de la panne d'idée pour provoquer un déclic dans les négociations
entre le FMI et la Tunisie pour débloquer un prêt de 2 milliards. L'Europe
peut-elle se substituer au FMI sans agiter ses exigences ? Sur le plan
financier, c'est déjà la moitié du prêt du FMI que l'Europe avance pour venir
en aide à la Tunisie. C'est ce qui ressort de la visite effectuée, dimanche 11
juin, à Tunis par la présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen, aux côtés de la présidente du Conseil des ministres
italien Giorgia Meloni, qui
tient sa promesse de revenir à Tunis après sa visite de travail effectuée mardi
6 juin, et du Premier ministre néerlandais Mark Rutte.
L'Union
européenne a proposé un «renforcement du partenariat» avec la Tunisie
comprenant une aide financière à long terme pouvant atteindre 900 millions
d'euros et une aide immédiate supplémentaire de 150 millions d'euros,
apparemment sans poser aucune condition. Mais, comme on ne donne rien pour
rien, en sus de partenariats couvrant l'économie, la formation et l'énergie,
l'Union européenne a glissé dans son programme un soutien financier à la lutte
contre l'immigration clandestine. Dans cet ordre d'idées, le président Macron
et la présidente du Conseil italien ont, tous deux, appelé, en mars, à l'issue
d'un sommet européen, à soutenir la Tunisie en absence d'accord avec le Fonds
monétaire international, afin de contenir la «pression migratoire» accrue sur
l'Italie et l'Union européenne. «Il nous faut, à très court terme, réussir à
stopper les flux migratoires qui partent de Tunisie», a insisté dans ce sens le
président français. «Si nous n'affrontons pas ces problèmes de manière
adéquate, il existe un risque de voir se déclencher une vague migratoire
objectivement sans précédent», a estimé de son côté la présidente du Conseil
des ministres italien. Mais, le président tunisien ne semble pas du tout
disposé à ce que son pays «soit réduit au rôle de simple gendarme qui veille
scrupuleusement à protéger les frontières des autres». Cette déclaration, faite
une journée avant la visite de cette troïka européenne en Tunisie, lors d'une
virée inopinée du président tunisien à Sfax, est-elle un message de refus de
jouer tout rôle du gendarme contrôlant les frontières extérieures de l'Europe ?
A-t-il une autre solution à proposer à ses hôtes pour
ne pas laisser tomber l'offre de l'UE ? En tout cas, qui prône sur ce plan une
solution «éminemment humaniste», ne voit pas, sous le même angle, le problème des
migrants venant du continent africain, réduit par d'autres à «une poussière
d'individus», et qu'il a qualifié, lui, «de victimes de l'ordre mondial de la
misère». Qui accusait, déjà, le président tunisien de tenir un discours raciste
à l'encontre des migrants ?