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Le conclave tenu vendredi dernier à
Djeddah entre les six pays membres du Conseil de coopération du Golfe (CCG)
ainsi que l'Egypte, l'Irak et la Jordanie semble plus répondre à des
engagements inscrits dans l'historique accord entre Ryad et Téhéran qu'à une
obligation de la Ligue des Etats arabes.
Programmée pour abriter le 32ème sommet de la Ligue arabe des Etats membres le 19 mai prochain conformément à un processus tournant entre les pays membres, l'Arabie Saoudite tente vraisemblablement avant de le tenir, de convaincre particulièrement les Etats de la région à soutenir et même intégrer l'accord qu'elle a conclu en mars dernier en Chine avec la République islamique d'Iran. Il semble que c'est à partir de ce qu'elle pourrait aplanir comme divergences entre les pays du Golfe et Téhéran qu'elle pourrait soumettre à «consensus arabe» un ordre du jour «conciliant». Premier point chaud, sa réunion à Djeddah avec les cinq autres pays que compte le CCG et dont elle est membre, ainsi que l'Egypte, l'Irak et la Jordanie, consacrée à la Syrie, précisément à la possibilité de lui permettre de récupérer son siège dont elle a été exclue en 2011 suite aux bouleversements politiques et sécuritaires qui l'ont précipitée dans un guerre civile qui dure à ce jour. C'est le porte-parole du MAE qatari Majed Al-Ansari qui a annoncé que Ryad devait présider vendredi dernier à cet effet une réunion «consultative» à Djeddah entre les ministres des Affaires étrangères du Qatar, Bahreïn, Koweït, Emirats arabes unis, Oman, Irak, Jordanie et Egypte. Le choix du Qatar d'en faire l'annonce n'a rien de fortuit, comparé à son acceptation de l'accord irano-saoudien et le rôle de «prestataire de service» qu'il a joué dans les années 2000, en Syrie et dans d'autres pays arabes pour provoquer «des printemps» sanglants. L'on rappelle en outre que les pays membres du CCG ont toujours exigé de condamner l'Iran dans toute déclaration de la Ligue arabe, «pour ses interventions dans les affaires internes des pays arabes», en Syrie, au Liban, en Irak, au Yémen, entre les factions palestiniennes politiques et armées... Mis à part le Sultanat d'Oman acquis à l'accord historique entre Ryad et Téhéran pour en avoir abrité certains rounds de négociation, les autres membres du CCG sont ainsi plus difficiles à convaincre en raison des velléités de leadership qui les ont toujours opposés à l'Iran. La réplique de MBS à Biden «C'est la fin des malentendus», avait déclaré vendredi 10 mars 2023, à Pékin, le Secrétaire du Conseil suprême de la sécurité nationale iranienne, à l'issue du paraphe de la réconciliation entre deux poids lourds dans la région du Golfe, le Moyen-Orient et plus loin encore. Pour Ali Shamkhani, «l'accord en question va contribuer à améliorer la stabilité et la sécurité régionales». Le conseiller à la sécurité nationale saoudien, Musaid Al-Aiban, a dit espérer «continuer un dialogue constructif avec l'Iran sur les principes du bon voisinage». Le chef de la diplomatie iranienne Hossein Amir Abdollahian avait affirmé que «le retour à des relations normales entre Téhéran et Ryad offre de grandes possibilités aux deux pays, à la région et au monde musulman» avec la promesse qu'il allait «lancer d'autres initiatives régionales». La Chine, architecte de l'accord, pourrait contribuer dans le règlement d'autres conflits très lourds dans le monde, en Asie et plus, en Afrique, mettant ainsi les Etats-Unis et Israël devant le fait accompli. Le message est clair, Pékin avec comme partenaire Moscou s'impose comme acteur de premier rang dans la structuration d'un ordre mondial multipolaire pour l'après-Covid-19. En prenant acte de l'accord, les Etats-Unis s'étaient empressés de «demander plus de détails aux Saoudiens» et de dire qu' «il reste à voir si l'Iran remplira ses obligations». Vue sous ces angles, la réunion de Djeddah pourrait être une forte réplique à la visite entreprise en juillet dernier par le président américain en Israël et en Palestine occupée. Les rappels des événements et propos en attestent. Mohamed Ben Salman tenait au même moment un sommet à Djeddah sur la sécurité et le développement. Il venait d'ouvrir son espace aérien à l'aviation israélienne «uniquement, a-t-il dit, pour des intérêts commerciaux», balayant ainsi, du moins publiquement, l'idée d'une coopération militaire et sécuritaire entre eux. Mais aussi rejetant l'idée de la création d'un OTAN arabe qui tient tant à cœur les responsables américains. MBS avait annoncé avoir déjà «des pourparlers positifs avec l'Iran grâce à une intermédiation irakienne (...)». Le président Joe Biden avait fait part à partir de Tel-Aviv «de progrès au sujet d'un îlot stratégique en mer Rouge, situé entre l'Arabie saoudite, l'Egypte et Israël». De «nouvelles initiatives» CCG-Iran ? Il a affirmé que «nous assurerons la sécurité du détroit d'Hormoz et de la mer Rouge», des régions où l'Iran a de fortes influences. Biden a assuré que «les Etats-Unis ne quitteront pas le Moyen-Orient en laissant un vide que pourraient remplir la Russie, la Chine ou l'Iran». La réplique saoudienne de vendredi dernier répond aussi à la précision de Biden d'être venu au sommet de Djeddah «non pas pour rencontrer le prince héritier mais les 6 membres du CCG ainsi que l'Egypte, la Jordanie et l'Irak». Il est attendu que ces pays partenaires de premier ordre des Etats-Unis s'attribuent une nouvelle feuille de route où l'Iran pourrait figurer comme protagoniste pour régler collectivement les conflits dans la région. La prochaine visite du président iranien à Ryad et l'ouverture de leurs ambassades respectives devraient en arrêter bien des étapes. L'Algérie et la Syrie n'ont pas dû voir d'inconvénients à ce que MBS réunissent ses partenaires du CCG, l'Egypte, l'Irak et la Jordanie pour discuter d'un point qui devrait, en principe, être soumis au vote au sein de la Ligue arabe des Etats membres. La complexité des situations dans le Moyen-Orient entre les pays du Golfe et l'Iran nécessite une remise en ordre politique et sécuritaire que l'Arabie Saoudite et l'Iran sont convenus d'inscrire dans leur accord comme «initiatives régionales». La reconnaissance de la Syrie à l'Algérie L'Algérie le voit ainsi en soutenant «cet accord important (qui) permettra, a-t-elle dit, aux deux pays et peuples frères de renforcer les relations de coopération et de solidarité conformément aux principes consacrés par la Charte des Nations Unies et de résoudre les différends par le dialogue, contribuant ainsi à renforcer la paix et la sécurité dans la région et dans le monde». L'histoire a retenu que l'Algérie a été l'un des rares pays arabes à refuser l'exclusion en 2011 de la Syrie de la Ligue arabe mais n'en a pas quitté les rangs parce qu'elle a toujours refusé de pratiquer la politique de la chaise vide. Et pour avoir été le premier pays à «négocier» ouvertement le retour de la Syrie dans la Ligue arabe, l'Algérie a toujours bénéficié d'une forte considération de la part du pays de Bachar Al-Assad.»Je suis ainsi venu exprimer cette reconnaissance et notre grande volonté d'œuvrer ensemble pour notre avenir à tous», a déclaré le ministre syrien des Affaires étrangères et des expatriés, Fayçal Al-Meqdad, à son arrivée samedi dernier à Alger, au lendemain de la réunion de Djeddah. Il a noté que «cette visite en Algérie se veut pour exprimer les sentiments sincères du gouvernement de la République arabe syrienne représenté par le président Bachar Al-Assad, aux dirigeants algériens ainsi que la reconnaissance de la Syrie pour le soutien traditionnel de l'Algérie notamment dans le cadre des évènements récents, ayant été le premier pays à dépêcher une équipe professionnelle qui a su faire face aux effets catastrophiques du séisme». Il est clair que le responsable syrien a été envoyé «spécialement» par le président Al-Assad pour mettre au courant les autorités algériennes de ce qui s'est passé à la réunion de vendredi à Djeddah. Reçu par Ahmed Attaf, le MAE syrien a déclaré à son arrivée que «l'Algérie représente une symbolique particulière pour le peuple syrien et pour tous les peuples du monde(...), les relations se poursuivront toujours entre nos deux pays frères (...), les concertations entre les deux parties sur les développements dans la région et dans le monde ne se sont jamais interrompues». Et, a-t-il ajouté, «quoi que nous disions, nous ne saurions qualifier le rôle majeur de l'Algérie à différents niveaux». |
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