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Deuxième mandat, salaires, fonds détournés...: Les précisions de Tebboune

par R. N.

Lors de son entrevue périodique avec des représentants de médias nationaux, diffusée jeudi soir sur les chaînes de télévision et stations de radio nationales, le Président Abdelmadjid Tebboune a évoqué plusieurs sujets nationaux, dont ceux relatifs aux aspects économiques, aux salaires, la lutte contre la corruption, et les réalisations menées depuis son élection le 12 décembre 2019, mais également les questions diplomatiques, bilatérales (Russie, Chine, France...), ainsi que l'intégration de l'Algérie au groupe des BRICS.

Le président de la République a affirmé que sa plus grande préoccupation actuellement était de parachever, durant les deux années restant de son mandat présidentiel, la concrétisation des 54 engagements pris devant le peuple algérien, soulignant que le dernier mot revenait au peuple. Interrogé sur une éventuelle candidature à un second mandat présidentiel, il affirme : «Je n'ai aucune réponse et je n'y pense même pas. Nous sommes à deux ou trois mois au-delà de la mi-mandat et c'est plus que trop tôt d'en parler».

«L'essentiel, dit-il, c'est qu'il reste encore deux années pour terminer et concrétiser mes engagements et c'est au peuple de juger par la suite», ajoutant que «chaque chose viendra en son temps».

Le Chef de l'Etat a rappelé son souci d'opérer les réformes promises au peuple algérien à la vitesse qu'il juge nécessaire pour «changer la situation». Il a assuré, dans le même cadre, que l'année 2023 serait celle de la consolidation et de la consécration des réalisations accomplies ces dernières années, se disant «satisfait à 100% de tout ce qui a été réalisé jusque là».

Abordant le secteur de l'Education nationale, M. Tebboune a rappelé l'intérêt particulier qu'il accordait à ce secteur, s'engageant à améliorer les conditions socioprofessionnelles de l'Enseignant et à assurer le recrutement des diplômés des Ecoles normales supérieures (ENS). Il a précisé, dans ce cadre, que l'Ecole, contrairement à l'Université, garantit de facto un poste de travail à ses diplômés. L'avenir des enseignants contractuels (au nombre de 59.987) du secteur de l'Education dont la décision de titularisation a récemment été prise «est officiellement tracé», a-t-il rassuré, affirmant qu'il n'a jamais été question de refuser de recruter les diplômés des ENS.

Le chef de l'Etat a aussi réaffirmé son engagement de poursuivre l'augmentation des salaires des travailleurs et à prendre les mesures nécessaires, pour assurer une vie décente aux citoyens, tout en veillant à la régulation des prix, du taux d'inflation, et au renforcement de la production nationale.

Affirmant «la poursuite de l'augmentation des salaires annuellement jusqu'à ce qu'ils atteignent un seuil particulier», il a rappelé que «l'augmentation des salaires et de la valeur du dinar, et la lutte contre la spéculation, constituent un engagement à respecter». «Si la valeur du dinar augmente de 30%, le pouvoir d'achat du citoyen sera renforcé», a-t-il estimé.

Il a également mis en exergue l'impératif de «généraliser la numérisation pour pouvoir recenser les familles ayant un seul revenu», soulignant que «la numérisation deviendra un jour une réalité et tout sera révélé».

Poursuivre la lutte contre la corruption

Par ailleurs, le Président a réaffirmé la détermination de l'Etat à poursuivre la lutte contre la corruption, et le recouvrement des fonds pillés et détournés, annonçant que 20 milliards de dollars avaient déjà été recouvrés à l'intérieur du pays. Il a également rejeté l'idée de mesures de grâce au profit des auteurs de dilapidation et de détournement des deniers publics, car opposée aux principes «de la morale et de la loi».

«Vingt (20) milliards de dollars ont été recouvrés à l'intérieur du pays et nous poursuivrons l'opération de recouvrement du reste des fonds détournés», a-t-il indiqué, précisant que «les fonds thésaurisés feront l'objet d'une autre issue», ajoutant que «des sommes faramineuses ont été détournées (à l'étranger) en 10 à 12 ans».

«La majorité des pays européens ont prêté la main à l'Algérie à ce sujet et affiché leur disponibilité à coopérer avec nous pour le recouvrement de ces fonds et leur restitution au Trésor de l'Etat algérien, pour peu que les procédures légales soient respectées», a-t-il poursuivi.

«L'opération se poursuit. Il y a, aussi, d'autres biens sous forme d'hôtels 5 étoiles et autres et nous avons été officiellement saisis pour les récupérer, particulièrement par les pays vers lesquels ces fonds ont été détournés et ceux qui étaient source de surfacturations. Des fonds ont été déposés dans des coffres privés, notamment en Suisse, au Luxembourg et aux Iles Vierges», a-t-il ajouté.

Economie : Capter les IDE, l'industrie automobile...

Dans le volet économique, Abdelmadjid Tebboune, a affirmé que l'Algérie fournissait toutes les garanties pour capter les investissements directs étrangers (IDE) dans divers secteurs.

«Tout un chacun est convaincu aujourd'hui que l'investissement en Algérie est rentable et loin d'être une aventure. C'est un investissement sûr grâce à la possibilité de transférer les bénéfices», a précisé le Président. Dans ce cadre, il a fait état d'un travail en cours avec les pays présents en Algérie, à l'instar du Qatar et de la Turquie, pour poursuivre et renforcer leurs investissements, soulignant qu'il a été convenu avec la Turquie de porter ses investissements à 10 milliards USD.

«La porte reste ouverte» à d'autres pays désirant investir en Algérie, notamment après la promulgation de la nouvelle loi sur l'investissement qui consacre le principe gagnant-gagnant et le bénéfice mutuel «loin de toute idéologie», a-t-il ajouté.

Le président de la République a, en outre, souligné l'engouement des entreprises étrangères pour investir en Algérie après l'entrée en vigueur de cette loi, ajoutant que plusieurs entreprises américaines ont manifesté leur intérêt pour investir dans les domaines de l'agriculture, de l'industrie et d'autres secteurs.

S'agissant du dossier de l'industrie automobile, le président de la République a réitéré la détermination de la partie algérienne, en partenariat avec le groupe «Stellantis», propriétaire de la marque «Fiat», d'atteindre un taux d'intégration de 30 à 40% au bout de deux années.

L'objectif de la partie algérienne, dit-il, dans le cadre de la mise en place d'une véritable industrie automobile, était d'intégrer des entreprises algériennes dans le cadre de la sous-traitance avec le partenaire italien pour fabriquer de nombreuses pièces, ajoutant que l'objectif n'est pas seulement de construire des voitures touristiques mais également de fabriquer d'autres véhicules tels que des tracteurs et des camions.

Concernant le projet d'amendement à la loi relative à la monnaie et au crédit, le président de la République a affirmé qu'une partie de ladite loi sera soumise à l'examen lors du prochain Conseil des ministres.

En réponse à une question sur l'économie parallèle, le Président a réitéré son engagement à œuvrer à son élimination, compte tenu de répercussions notamment en matière d'inflation et de monopole, soulignant, dans ce sens, l'existence de mécanismes, en cours de mise en œuvre, pour absorber les liquidités et l'utiliser pour la création de la richesse et des postes d'emploi.

Augmenter les découvertes de gaz naturel

Toujours dans le volet économique, le Président de la république a fait savoir que l'Algérie avait proposé d'exporter l'excédent de sa production d'électricité vers l'Europe. Il a fait état d'une proposition faite à certains pays amis pour la réalisation d'un câble électrique reliant l'Algérie à l'Europe au point le plus proche de l'Italie, à 270 km.

Dans ce cadre, le Président de la République a évoqué les capacités de l'Algérie dans le domaine de la production d'électricité, outre l'industrie locale des turbines à gaz.

«Tous les moyens sont disponibles pour s'approvisionner en énergie depuis l'Algérie. Même les pays qui n'ont pas de gazoduc peuvent s'approvisionner directement en électricité», a-t-il soutenu.

Concernant le gaz, il a relevé la nécessité de multiplier les découvertes afin de porter le volume des exportations d'environ 53 milliards m3 actuellement à près de 100 milliards m3, en particulier en raison de la hausse du niveau de consommation interne.

Rappelant que l'Algérie s'était engagée avec le partenaire italien à hisser le volume des exportations de gaz naturel à 30/35 milliards m3, le président de la République a fait part d'un projet de réalisation d'un deuxième gazoduc, étant donné que le gazoduc reliant les deux pays «a quasiment atteint sa capacité maximale». En réponse à une question sur le projet de gazoduc transsaharien reliant l'Algérie, le Niger et le Nigeria, M. Tebboune a confirmé que la phase d'étude était presque terminée, et que certaines parties du projet étaient même réalisées, indiquant aussi que l'Algérie a convenu avec le Niger de prendre en charge la réalisation du tronçon du gazoduc qui relie le Nigeria à la frontière algérienne.

Adhérer aux BRICS en 2023

Par ailleurs, le président de la République a assuré que l'année 2023 sera couronnée par l'adhésion de l'Algérie aux BRICS, rappelant que la Chine, la Russie et l'Afrique du Sud ont accueilli favorablement cette démarche, soulignant que ce processus exigeait une poursuite des efforts dans les domaines de l'investissement et du développement économique et humain d'une part, et de passer à des niveaux supérieurs d'exportation d'autre part.

Le président Tebboune a affirmé, dans ce sens, que l'augmentation de la valeur des exportations hors hydrocarbures n'est plus un simple slogan, mais une réalité sur le terrain.

«C'est lorsque notre produit intérieur brut (PIB) dépassera les 200 milliards usd, que nous pouvons dire que nous sommes proches des BRICS», a poursuivi le Chef de l'Etat.

A ce propos, le président de la République a formulé le souhait de lancer des investissements conjoints avec les pays du groupe en vue de réaliser le projet de train transafricain, qui permettra de relier l'Algérie aux pays du Sahel.

Diplomatie, visite en Russie et en Chine

Lors de cet entrevue M. Tebboune a abordé les relations Algéro-françaises au sujet desquelles il dira qu'elle sont marquées par un traitement d'égal à égal, sans renoncer au dossier de la Mémoire, ni oublier ce qu'avait commis la France coloniale à l'encontre du peuple algérien, se félicitant de la coopération sécuritaire entre les deux Etats au plus haut niveau qui a franchi «un grand pas».

Le Chef de l'Etat a annoncé une visite en Russie et en Chine, ainsi qu'une visite en Algérie du prince héritier saoudien, Mohamed Ben Salmane dont le pays entretient avec l'Algérie d'»excellentes relations».

Evoquant sa visite en Russie en réponse à l'invitation de son homologue russe, Vladimir Poutine, le président de la République a assuré que la Russie «est un pays ami et nos relations sont bonnes et remontent à plus de 60 ans. Nous visiterons la Russie, puis la Chine».

Concernant les relations entre l'Algérie et l'Arabie saoudite, le Président Tebboune a indiqué qu'elles sont «excellentes», faisant état d'une visite à venir du prince héritier saoudien, Mohammed Ben Salmane, qui «devait se rendre en Algérie avant même la tenue du Sommet arabe».

Concernant la récente visite du Roi Abdallah II de Jordanie, le Président Tebboune a nié l'existence d'une médiation avec un quelconque Etat.

Pour ce qui est de la cause palestinienne, M. Tebboune a exprimé son souhait de voir tous les pays arabes épris de paix œuvrer en 2023 avec l'Algérie, dans le cadre de l'Assemblée générale de l'ONU, pour permettre à la Palestine de «devenir un Etat à part entière au sein des Nations unies».