|
Envoyer à un ami |
Version à imprimer |
Version en PDF
Tout
un chacun sait qu'en période estivale, à l'instar de bien d'autres contrées, le
risque d'incendie augmente pour les 1.400.000 ha de nos forêts, les 2.400.000
ha de nos maquis et les 280.000 ha de nos jeunes reboisements, en raison du
climat chaud et sec. À noter que le taux de couverture végétale n'est que de
11% pour le Nord de l'Algérie et à peine 2% pour l'ensemble du territoire,
selon la Direction Générale des Forêts (D.G.F.).
On parle d'incendie de forêt lorsque le feu couvre une surface minimale de 0,5 hectare d'un seul tenant et qu'une partie au moins des étages arbustifs et/ou arborés est détruite. Le terme incendie vaut aussi pour les formations subforestières de plus petites tailles que sont les maquis et broussailles. Depuis ces dernières années, tout porte à croire que se forge telle une vérité, la conviction profonde que les feux de forêts ont une origine plus humaine que naturelle comme il peut-être aisément établi sur la base de données statistiques sur au moins un demi-siècle... En effet, comment ne pas adhérer aux propos lucides de notre ami Abdou BENABBOU qui à travers son éditorial (Quotidien d'Oran du 18 août 2022) nous dit: «Il fallait bien se rendre à l'évidence que 118 foyers d'incendies à travers 14 wilayas en un même instant n'est pas le fruit du hasard. On aura beau accuser la canicule avec plus de 40 degrés qui ont sévi dans le pays et laisser supposer comme justification que le feu embrase l'ensemble du bassin méditerranéen ces derniers jours, qu'il est impensable d'admettre que la catastrophe qui a coûté la vie à 38 personnes et plus de 200 blessés serait un impondérable naturel... La similitude de ce drame avec celui des forêts de la Kabylie survenu l'an dernier, jour pour jour, porte avec une évidence frappante, la signature de l'homme... Et d'ajouter pour mieux convaincre les gens crédules, manipulés, formatés par certains réseaux sociaux toxiques et téléguidés à distance par ceux qui ont vendu leurs âmes au diable en cherchant à nuire à leur pays, la «Grande Maison Algérie», marquée par le sceau de l'ADN résistance et le sang de ses vaillants martyrs : «On ne peut pas se promener avec trois briquets dans la poche pour prêter bonne figure à un paquet de cigarettes ni pour attiser le petit feu d'une innocente grillade.» C'est no comment ! N'est-ce pas ? DÉFENSE DES FORÊTS CONTRE L'INCENDIE Ce qu'il convient tout d'abord de dire, c'est que la lutte contre les incendies de forêt commence très en amont des départs de feux par une politique volontariste de prévention du risque. Est-ce à dire que rien n'est fait ? Il est vrai que les services forestiers contribuent dans la limite de leurs moyens, hélas dérisoires, à : entretenir et développer les équipements de points d'eau, de postes vigie et d'ouverture de pistes..., participer au diagnostic du danger de feu lié à l'état de dessèchement du couvert végétal, assurer quelques patrouilles de surveillance et de première intervention, grâce notamment à la mobilisation en cas d'urgence de pas moins de 9.000 éléments au niveau des wilayas (selon le ministre de l'Agriculture et du Développement rural). Ils exercent leurs missions en partenariat avec le corps de sapeurs pompiers qui faut-il le souligner, ne ménagent aucun effort dans l'exercice de leur noble mission de préservation des biens et des personnes avec souvent (lorsque cela s'avère nécessaire), le soutien actif de nos vaillants soldats assistés par quelques riverains des massifs forestiers dans un même élan de solidarité qui fait malgré tout, la fierté de notre pays, quoique d'aucuns en esprits haineux, puissent dire pour porter atteinte à notre moral en minimisant les efforts collectifs de l'État. Mais comment trouver la force de re, réécrire ce que j'avais déjà dit pour anticiper les risques latents des feux de forêts, à savoir que les travaux forestiers sont toujours régis par des mesures réglementaires et administratives plus répressives que participatives à l'égard de la population riveraine des forêts ? Presque aucun signe de retour d'écoute de la part de cette administration forestière largement embourbée dans les méandres d'une gestion désuète et dont la réactivité strictement techniciste reste en décalage par rapport aux préoccupations surtout sécuritaires de l'heure. Pour l'essentiel, la mission de cette administration reste la réalisation d'équipements à l'effet de juguler le phénomène d'érosion, tout en empêchant les riverains d'utiliser et de valoriser les sous-produits de la forêt. Cette vision étriquée reste marquée par une politique héritée en grande partie de la période coloniale, dominée exclusivement par les textes de l'interdit. Alors que bien au contraire et à l'exception des forêts périurbaines récréatives, les massifs forestiers de nos montagnes en partie cramées ne sauraient être des espaces dont le vide sidéral reste propice à la facilité de mobilité d'intrus non identifiables, ces «ovnis» de la traîtrise agissant contre les intérêts du peuple montagnard des «ghlalil». Ne dit-on pas que «la nature a horreur du vide ?» C'est à ce niveau que réside la faille et tout le reste n'est que laxisme et négligence à bien réfléchir si rien n'est prévu en ce sens ! Même s'il est vrai que le souci environnemental demeure un objectif primordial pour un pays comme le nôtre, redevable de la nécessité de préserver ses ressources, l'on semble oublier que le développement durable ne peut se réaliser indépendamment de l'implication et de la participation consciente de l'homme et dans ce cas précis, des populations riveraines actrices importantes dans tous les choix devant orienter et définir les programmes. Ceci d'autant que leurs impacts économique, social, culturel et environnemental sont grands. Il s'agit en effet, de la conciliation de l'Homme avec son milieu, afin qu'il sente la nécessité de le protéger à son tour ne serait-ce, que dans son intérêt propre et celui de sa famille... C'est tout comme dans les usines, les travailleurs doivent veiller à la préservation de leurs outils de production qui leur assurent leur maigre pitance ! C'est là, une règle primordiale à respecter car il y va de notre survie en tant que nation menacée dans son existence ! Quel dommage et quel gâchis pour cette administration forestière qui peine à inscrire sa politique dans un dispositif clair et négocié avec les populations concernées et impliquées pour l'élaboration et la mise en œuvre d'un «contrat-programme» inspiré par les principes avérés du «gagnant-gagnant» et des acquis mutuellement avantageux, reste encore d'actualité ! Les riverains ont besoin d'identifier la forêt comme un milieu plus ouvert, que fermé à leurs préoccupations et un potentiel dont l'exploitation et la mise en valeur tout en préservant son équilibre, ne pourra se faire qu'à travers des actions mutuellement avantageuses de partenariat et de programmes consensuels... DÉBROUSSAILLER PROTÈGE LES BIENS ET PERSONNES La majorité des départs de feux est d'origine anthropique. Ils démarrent le plus souvent le long de voies de communication ou depuis des constructions. La prévention des feux de forêts doit se faire tout au long de l'année, avec notamment le débroussaillage des tranchées pare-feu. Dans un terrain débroussaillé l'intensité du feu est moindre, ce qui facilite l'intervention des services de secours. Au regard des moyens limités dont dispose le secteur pour l'assainissement des massifs forestiers, l'éco pâturage apparaît comme solution non négligeable et à moindre coût pour le trésor public, à voir les expériences réussies de certains pays méditerranéens... La chèvre est gourmande, pensent les forestiers et c'est bien là son principal défaut, à l'origine de leurs conflits avec les éleveurs ! Ce temps est révolu ! En effet, aujourd'hui, une connaissance fine du comportement alimentaire de la chèvre en forêt, cette «vache du pauvre», rend possible des parcours qui permettent à la fois d'assurer correctement les besoins des troupeaux et le maintien de la ressource ligneuse. Tout est donc affaire de pilotage précis et d'adaptation du troupeau en forêt ! C'est dire que la réconciliation est possible entre éleveurs et forestiers dans l'intérêt de la préservation de notre patrimoine forestier... De par sa rusticité et ses faibles besoins alimentaires par comparaison à d'autres ruminants, la chèvre est la meilleure débroussailleuse écologique. Des conventions de pâturage doivent être accordées aux éleveurs en veillant à alterner les espaces où pâturent les chèvres afin de respecter la biodiversité, autrement dit, le cycle de repousse des plantes. C'est donc grâce au pastoralisme, que les riverains des forêts pourront participer à l'entretien des territoires et à la lutte contre les incendies dans des régions souvent touchées par la sécheresse. L'aménagement des forêts et le ramassage du bois, sont aussi d'autres domaines d'activités à ouvrir à la concession. Cela devrait permettre tout à la fois, d'améliorer les revenus et de réduire les risques fréquents d'incendies. À partir de cet élan qualitatif novateur, le caractère répressif d'essence coloniale sera démystifié et il sera alors possible, d'introduire chez les populations riveraines, des programmes de préservation du milieu. C'est là, une manière de présenter la forêt, comme un espace convivial, totalement inscrit dans l'esprit d'une action partenariale «gagnant-gagnant». En assurant de la sorte de l'emploi de proximité, la vigilance citoyenne trouvera à travers ces milliers d'yeux grands ouverts, matière à s'impliquer dans une surveillance plus efficace et plus citoyenne des massifs forestiers, surtout si elle est consolidée par une police forestière qui souligne fortement la présence de l'État pérenne. Il y a là, une grande opportunité pour la création d'emplois d'écogardes et de patrouilleurs équestres dans nos régions de montagne qui ne manquent pas de patriotes disposés à servir loyalement leur pays. Cette attitude préventive est de toute évidence moins coûteuse, que celle qui consiste à indemniser après coup, les zones sinistrés qui étalent leurs misères à travers leurs manteaux de cendre et pleurent leurs innocentes victimes. Tout cela pour dire que ce lourd fardeau ne saurait être porté par la seule D.G.F. qui doit évoluer en un département ministériel à part entière au regard des enjeux liés au réchauffement climatique, à la sécheresse et aux questions latentes qui se posent à l'échelle du barrage vert et de la steppe. Dans cette configuration, ne doivent rester au niveau du ministère de l'Agriculture, que les segments indépendance alimentaire sécurisée, la constitution d'une banque de gènes et la question lancinante du foncier agricole... *Professeur |
|