Le mois, supposé être celui de la spiritualité et du
partage, se termine dans une ambiance tristounette. Le porte-monnaie des
Algériens, ayant été soumis à très rude épreuve, la fête de l'Aïd aura un goût
amer dans la bouche. Attirés par leur goût maladif du lucre, la race des
chiroptères a sévi à visage découvert pour extorquer l'argent aux plus faibles.
Si au moins cette engeance de suceurs de sang, qui grossit à vue d'œil,
contribuait pour quelque chose au développement du pays. Même pas. Ils en sont,
à n'en point douter, intellectuellement et culturellement incapables. Les
néo-millionnaires de ce pays ne forment pas une bourgeoisie entrepreneuriale
mais une engeance de nouveaux riches sans attaches ni références. L'exhibition
au grand jour de ces fortunes fulgurantes fait partie, aujourd'hui, de la «
normalité», un spectacle habituel, dans un pays où l'effort n'a jamais reçu une
médaille de mérite. L'ostentation de richesses, amassées à l'ombre d'un
désengagement tacite de l'Etat-mamelle qui aura trop duré, ne suscite même plus
l'indignation de ceux qui, le couffin douloureux, voient passer au volant de
grosses cylindrées, les rentiers du désordre ambiant.
A l'image de ces
médecins, moins bien payés que leurs collègues de certains pays africains plus
pauvres, qui prennent, des bleus dans l'âme, le chemin des hôpitaux étrangers,
des toubibs toujours dédaignés par cette engeance d'anthropophages qui, sans
s'user les culottes sur les bancs de l'école, jouissent d'un statut social
beaucoup plus valorisant. Quel pays, quelle société voulons-nous dans un tel
état d'esprit ? N'importe quel mercanti ou négociant en tout-venant dispose
d'un revenu infiniment supérieur sans avoir passé des années à ahaner à la
tâche. A l'ère de la doxa implacable des néo-opulents, il en va ainsi des
peuples et des sociétés qui se forgent les modèles qu'ils peuvent...