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«Un étrange chagrin» de Mohamed Magani, un si étrange roman !

par Slemnia Bendaoud

A l'exemple de son excellence Monsieur Xavier Durencourt, ambassadeur de France en Algérie de (2008 à 2012 et 2017 à 2020) dans son ouvrage «L'énigme algérienne », le Hriak s'invite dans ?'un étrange chagrin'' de Mohamed Magani.

L'équation est tout de même fort complexe à pouvoir être démontrée et réalisée. Ecrire sur le Hirak, en dépit du fait qu'il n'a encore pas livré tous ses secrets reste une expédition très difficile comme thématique. Cependant pour ce faire, il est exigé de l'écrivain d'être outillé bien comme il faut pour mieux l'aborder. D'autant plus qu'il s'agit d'un roman qui a la particularité d'échapper aux convenances stylistiques ordinaires en la matière.

L'histoire démarre en trombe. L'accroche est réalisée de manière lucide et impeccable qui laisse le lecteur à bout de souffle. L'héroïne du livre qui s'apprête à convoler en justes noces, malheureusement trouve la mort de manière si étrange. Le soupçon est quasi général.

Le crime doit être diagnostiqué. Un mobile solide à élucider : ses parents qui avaient un âne pour subvenir à leur besoin fut réquisitionné de nuit par des hommes inconnus. Il leur reviendra plus tard chargé de liasses de billets de banque dans des sachets noirs. Un autre problème à résoudre qui les laisse éveillés pendant le sommeil du commun des mortels.

Voici donc tracé le cadre privilégié dans lequel se déroule l'histoire, palpitante et accrocheuse à souhait. L'entrée en matière a tout l'air d'une véritable bombe qu'il y a lieu de la dégoupiller avec subtilité et surtout précision.

Tel est le scénario présenté au lecteur. Depuis, en effet, « la rumeur circulait comme une fausse monnaie ». Jusqu'à jeter « de la méfiance et de la suspicion entre les hommes ». Aussi, cette famille qui ne sait que faire de ce cadeau empoisonné « de tous les côtés lui parvenaient des signaux inamicaux ».

Mais ne dit-on pas que « les temps difficiles s'inventent des sauveurs » ? Sauf que dans pareil cas « la prudence s'imposait ». Autant dire que « peu de choses dans la vie sont plus réelles que matérielles ».

Cependant, n'est-il pas naturel qu'on écrive dans le style de son temps ? « Car le style ? et il en existe des milliers de styles -, c'est un Don du Ciel, c'est le Talent* ». Aussi Jacques Chardonne disait : « le vrai style est un art qui ne s'apprend dans aucune école ; il n'y a point de techniques du style ; le vrai style est l'essence d'une manière de vivre, de souffrir et d'aimer ».

Face à cette expédition « fort complexe » et trop risquée, notre romancier a eu l'ingénieuse idée d'inventer « le dialogue à distance » en utilisant « l'écriture en italique », une sorte d'un interlocuteur « présent-absent » pour enchainer le dialogue qui sert de cadre d'expression pour ses personnages fictifs ou imaginaires.

Ainsi a-t-il trouvé la formule pour nous passer à travers les mailles du roman « le Hirak » dans toute sa dimension douloureuse mais humaine. Mieux encore, c'est un roman écrit d'une manière inédite.

Il est une phrase puisée dans le livre qui résume majestueusement l'ouvrage «les richesses des fables nourrissent un imaginaire collectif en piteux état et mettaient en lumière le désarroi et l'inquiétude de Sefewane », un des personnages-clefs du roman.

L'espoir du Hirak s'accroche à ces pancartes levées très bien haut et si savamment travaillées qui les fait tout le temps résonner dans la tête des manifestants. En conclusion, insinue-t-il, nous sommes passés à côté d'une très grande « Révolution ». Une énième occasion ratée. Que c'est dommage !

*Mémoire d'outre-tombe