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Le président du Conseil
national de l'ordre des pharmaciens (CNOP), le Dr Noureddine Mettiou, s'est dit «outré, voire choqué» par les
déclarations du ministre de la Santé du 10 février 2022, tenues devant les
membres de l'APN, concernant l'installation de nouvelles officines de jeunes
pharmaciens. Intervenant, hier, lors d'une conférence de presse tenue au siège
du Conseil de l'ordre, le Dr Mettioui a exprimé son
désarroi quant aux propos tenus par le ministre de la Santé, Abderrahmane Benbouzid, au sujet de «l'ouverture de la concurrence entre
pharmaciens». Et ce, «en installant une pharmacie entre deux déjà installées».
Annonçant que ces dispositions seront intégrées dans le futur arrêté qui
remplacera l'arrêté en vigueur «002 de janvier 2005 relatif à l'installation
des officines pharmaceutiques». Parler de concurrence entre pharmaciens est
«anti-déontologique», selon le conférencier, qui souligne que les prix des
médicaments sont déjà fixés par les pouvoirs publics. Tout en rappelant que la
pharmacie n'est pas un commerce, mais un acteur à part entière dans le système
de santé. Il ajoute que la pharmacie d'officine est une profession réglementée,
le code de déontologie précise ses règles en interdisant toute concurrence
déloyale et désordonnée entre confrères. Et de préciser qu'à ce jour, les
textes en vigueur ont permis une répartition géographique équitable. «Les
officines couvrant le territoire national ont facilité l'accès aux médicaments
à la population, selon les dispositions prévues par la loi 18-11, relative à la
santé, dans ses articles 6 et 7», dira l'intervenant. Le Dr Mettioui
a affirmé que l'ordre, le Snapo, et d'autres
organisations syndicales ne sont pas en train de faire de la résistance ou le
blocus. «Nous sommes en train de faire de la gymnastique pour pouvoir répondre
aux 19.721 demandes d'installation d'officines dont 4.500 à Alger, qui sont en
instance», dit-il. Et d'affirmer, sur la base des chiffres, que sur 19.721,
1.051 pharmacies ont été installées en 2021 et 191 autres en 2022. Pour ce qui
est des recrutements, 332 pharmaciens ont été recrutés en 2021 dans les
officines, 766 dans la distribution, 155 dans le secteur industriel, 199 dans les
hôpitaux et 20 dans la biologie. Pour ces deux mois de l'année 2022, 33
pharmaciens ont été recrutés dans les officines, 104 dans la distribution, 27
dans l'industrie, 29 dans les hôpitaux. Pour ce qui est du sud du pays, le
conférencier a affirmé: «Nous sommes passés de 2
pharmacies à 18 à Tindouf. Mais, dira-t-il, on ne peut pas faire mieux en
raison du flux des jeunes pharmaciens formés qui arrivent avec le cumul déjà
existant». Le Dr Mettoui a mis en garde contre
l'ouverture et l'installation anarchique des pharmacies. «On sera confronté en
conséquence de cette ouverture tous azimuts à une asphyxie financière de
certaines pharmacies, ce qui ouvrira la voie, selon le conférencier, à
l'automédication et la vente des médicaments sans ordonnance, les produits
«cabas» et dans les pires des cas, la vente frauduleuse des psychotropes». Il
précise que l'installation des pharmacies les unes près des autres est
antiréglementaire si on se réfère à la loi et aux standards, «c'est une
violation du numerus clausus», lance le conférencier. Le Dr Mettioui
a, par ailleurs, démenti l'information faisant état de l'implication du CNOP
dans l'élaboration de ce nouvel arrêté. « Le CNOP n'a pas été consulté ou
associé à un quelconque projet d'arrêté », ajoute-t-il, affirmant, dans ce
sens, que le Conseil de l'ordre a adressé deux demandes d'audience au ministre,
mais elles sont restées sans réponse. Pourtant, dit-il, le CNOP voulait
présenter des propositions et des solutions au département de Benbouzid, pour trouver des débouchés aux jeunes
pharmaciens en attendant de revoir en amont leur formation, qui devrait se
faire selon les besoins, avec la diversification des spécialités.
Le CNOP suggère, pour le moment, l'installation d'un ou deux pharmaciens à la tête des 800 agences de l'Entreprise nationale de distribution de médicaments au détail (ENDIMED). Précisant que ces dernières ne comptent aucun pharmacien dans leurs rangs, ce qui est illogique puisqu'il s'agit bien de la gestion de médicaments. Il réclame aussi un quota de 50% pour les 20 postes de graduation en pharmacie pour les pharmaciens. Il plaide aussi pour le recrutement des jeunes pharmaciens dans les hôpitaux et les services de la sécurité sociale (CNAS et CASNOS). Remise en cause d'une formation qualifiée de «pléthorique» Le président de l'ordre des pharmaciens a affirmé que la situation provoquée par une formation pléthorique avec des milliers de pharmaciens diplômés qui sont toujours en attente d'un emploi, ne laisse pas le CNOP indifférent. L'ordre, dit-il, est persuadé que leur intégration au sein de la corporation est un capital et une valeur ajoutée si la réglementation est appliquée. En insistant sur le fait qu'on forme beaucoup trop. « Nous avons dix facultés de pharmacie qui favorisent la formation des pharmaciens d'officine, ce qui n'est pas du tout logique si on se réfère aux besoins », explique le conférencier. Il argumente en avançant des chiffres: la promotion sortante de pharmacie pour l'année 2020-2021, prévue au mois de juillet prochain, compte pas moins de 2.932 étudiants et la promotion future de 2023 prévoit la sortie de 2.280 étudiants en pharmacie. Sachant que le nombre des inscrits en attente au tableau de l'ordre tourne autour de 20.000 sur le territoire national. Le Dr Mettioui plaide pour un numerus clausus de formation de 120 à 140 pharmaciens par promo et une formation diversifiée selon les besoins. Il a ouvert une parenthèse pour exprimer le soutien du CNOP à l'appel lancé par le Snapo pour la tenue d'une grève nationale d'une journée renouvelable, le lundi 28 février prochain, en guise de protestation contre les déclarations du ministre sur l'installation de nouvelles pharmacies au profit des jeunes pharmaciens. Et ce, sans consultation au préalable du Snapo et du Conseil de l'ordre. |
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