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Mali: sortir du giron hexagonal

par El-Houari Dilmi

La rupture est totalement consommée entre Bamako et Paris. Loin d'être une surprise, le Mali a décidé l'expulsion de l'ambassadeur de France à Bamako. Le renvoi manu militari du diplomate français est venu en riposte à la récurrence des propos «hostiles et outragés» du ministre français des Affaires étrangères à l'égard des autorités de transition. L'Afrique, décomplexée, adresse des messages forts à l'ex-puissance coloniale.

Réagissant aux propos de Le Drian qui a qualifié la junte au pouvoir «d'illégitime», le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, les a qualifiés de «propos pleins de mépris et inacceptables». Paris se prête à un «deux poids, deux mesures en Afrique, applaudissant ou condamnant les coups d'Etat en fonction des intérêts français», a dénoncé, sans prendre de gants, Abdoulaye Diop. Le colonel Abdoulaye Maïga, ministre et porte-parole du gouvernement de transition, s'est, lui aussi, livré à une charge virulente contre la ministre des Armées française, l'accusant de chercher «à diviser les Maliens, d'instrumentaliser les organisations sous-régionales et de conserver ses réflexes coloniaux».

La détérioration des relations entre Paris et Bamako a connu un nouveau développement depuis l'arrivée au pouvoir des militaires qui ont finalement décidé de repousser sine die des élections générales prévues en février 2022 et proposé un nouveau calendrier pour rendre le pouvoir aux civils. Alors que les opérations «Barkhane-Serval» et «Takuba» semblent vivre leur dernier quart d'heure, Paris est en vérité plus qu'agacée par la présence russe au Mali. Les nouvelles autorités maliennes sont soucieuses d'intensifier leurs relations avec Moscou et se tenir à équidistance avec l'ensemble des forces étrangères qui manœuvrent dans ce pays sous couverture de lutte anti-djihadiste.

L'autre cauchemar, pas seulement pour Paris mais de tout l'axe antirusse, est de stopper la contagion du fait accompli et surtout conjurer l'effet boule de neige du «cas malien» sur les Etats du Sahel, qui veulent prendre leur destin en main et sortir, une bonne fois pour toutes, du giron hexagonal.