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Le
gouvernement a décidé une revalorisation des salaires pour juguler l'érosion du
pouvoir d'achat des citoyens. Il est vrai que la dégradation du pouvoir d'achat
notamment des couches sociales les plus défavorisées ne peut etre ignorée ou occultée au risque de conduire à un
embrasement social comme l'ont relevé nombres d'observateurs
Cette dégradation du pouvoir d'achat est constatée depuis un certain temps déjà notamment par des études et projections réalisées par des associations comme l'Association de protection et d'orientation du consommateur et son environnement (Apoce), qui s'est interressé à l'évolution des prix et des salaires moyens entre 2010 et 2021, qui a mis en exergue le gap de plus en plus profond entre salaires et prix, en faisant ressortir que la moyenne des prix des biens de consommation et des services a plus que doublé en une décennie (entre 2010 et 2021), tandis que les salaires sont restés figés et constatant que le salaire de 2010 a perdu 50% de sa valeur en 2021 du fait des hausses des prix. Une autre étude parue en Mars 2021, réalisée par le Syndicat national autonome des personnels de l'administration publique (Snapap) et la Confédération générale autonome des travailleurs en Algérie (Cgata) a indiqué qu'un salaire minimum de 81 751,14 DA est indispensable pour assurer les besoins essentiels d'une famille de 5 membres contre 73 027 DA par mois en 2017, soit une augmentation de 8 750 DA Au dela de certaines controverses sur les chiffres avancés et la crédibilite des enquetes réalisées, le constat ne fait aucun doute, le pouvoir d'achat a fortement baissé au cours de ces dernieres années et il continue de se dégrader avec l'inflation qui frappe notamment les produits de large consommation des mémages, dont le taux a atteint 5,1% au mois d'août dernier, contre 4,5% en juillet passé, selon le déclaration du Premier Ministre Aïmene Benabderrahmane, qui souligne par ailleurs que cette hausse des prix «est conjoncturelle». Cette augmentation des prix de nombreux produits alimentaires importés en grande quantité comme les légumes secs, serait liée, en partie, à la hausse importante enregistrée sur les marchés mondiaux, induite par les retombées de la crise sanitaire, qui a engendré une augmentation des coûts de la production et du fret international, ainsi que des prix de certains intrants et facteurs de production. Le coût du fret maritime aurait connu une forte augmentation. Alors que le prix du transport d'un container de 40 pieds était estimé entre 1 700 et 3 000 dollars avant la pandémie de Covid-19, ce prix serait passé à plus de 10 000 dollars, notamment sur les longues distances comme la Chine ou l'Asie du sud est en général. A cela s'ajoute la depréciaion du taux de change du dinar ainsi que tous les droits et taxes et les marges des multiples intervenants. Cet ensemble de facteurs tire quasi mécaniquement les prix vers le haut. Tous ces facteurs objectifs ont un impact sur la formation des prix et en sont explicatifs de la hausse constatée, et comme il n'existe aucun mécanisme d'ajustement des salaires par rapport aux prix, le fossé entre revenus salariaux et coût de la vie, a tendance à se creuser. Mais ce qui l'est moins sans doute c'est l'autre volet de l'explication de cette flambée des prix au niveau des marchés qui serait le résultat de «pratiques criminelles» (la spéculation en l'occurrence qui vient d'etre criminalisée) . La spéculation au dela de son caractere immoral et condamnable est une pratique courante des agents économiques dans tous les pays du monde notamment la ou le marché est mal régulé et ou l'économie est largement informalisée comme c'est le cas chez nous. Si la légitimité d'une augmentation des revenus notamment des ménages les plus défavorisés et les plus nombreux ne fait aucun doute, comment procéder dans le contexte qui est le notre. Quels choix s'offrent aux pouvoirs publics pour traiter de cette problématique ? Apparemment, le gouvernement ne dispose pas de données scientifiquement établies pour décider d'apporter des correctifs à la politique salariale de facon rationnelle en tenant compte de tous les impacts sur toutes les variables macroéconomiques, que seule une grande institution dédiée aux études économiques, à la modélisation et à l'élaboration des scénarions décisionnels, est en mesure de fournir, soit un grand ministere de la planification nationale comme c'est le cas en Turquie à titre d'exemple. Le Premier ministre n'a ? il pas déclaré que l'Exécutif compte réaliser une «évaluation minutieuse» des politiques des salaires, à travers des enquêtes et des études qui toucheront tous les secteurs d'activité, ce qui est susceptible d'orienter les choix du gouvernement en matière de politiques des salaires et des revenus en vigueur au niveau national». Par conséquent, on peut se demander sur quelle base le gouvernement a opté pour une ingeneirie indirecte d'augmentation du pouvoir d'achat, reposant sur le relèvement du point indiciaire dans la fonction publique et la baisse de l'IRG, permettant une augmentation des salaires et conséquemment une amélioration du pouvoir d'achat des citoyens. Nous n'avons de cesse de dénoncer la nocivité de l'empirisme dans la prise de décision publique Le relevement du point indiciaire qui sert de base au calcul des salaires qui est actuellement à l'ordre de 45 dinars algériens et qui passera à 65 dinars selon les informations diffusées par la presse nationale. Concrètement, cela se traduira par une augmentation au prorata du nombre de points indiciaires de chaque catégorie salariale.Cela engendrera une augmentation salariale pour les différentes catégories. Comme l'ont relevé certains observateurs, une augmentation des points indiciaires des bas salaires par progression degressive de 40 à 5% entre les 20000 à 40000 dinars est plausible, mais « une révision à la hausse de la valeur du point indiciaire est non seulement insoutenable financièrement, mais une pérennisation immorale des disparités salariales existantes.» La baisse constante du pouvoir d'achat, compte tenue de l'augmentation des prix (notamment des produits de premiere necessité et pas seulement), les nouvelles exigences de résultats économiques particulièrement dans les entreprises publiques dont la majorité éprouve des difficultés à trouver un équilibre entre la préservation des acquis sociaux des travailleurs et l'amélioration de la productivité, avec la nécessaire réhabilitation du savoir et des compétences, des structures de répartition qui s'éloignent de la rationalité économique et qui développent de multiples frustrations qui accablent les titulaires de bas revenus, expliquent la complexité de la politique des salaires surtout dans les conditions économiques actuelles. La croissance économique demeure toujours faible faute d'un rythme soutenu et élevé d'investissements productifs. Il n'existe certainement pas de solutions faciles et d'approches singulières aux problèmes soulevés par la politique des salaires. La complexité de son domaine est accrue par le fait qu'elle embrasse les intérêts fondamentaux non seulement des travailleurs mais également des employeurs, des syndicats, du gouvernement... Ces intérêts n'étant pas totalement convergents loin s'en faut, d'où la nécessité de déterminer un équilibre délicat constamment remis en question et réajusté sous l'influence de l'évolution des conditions économiques, sociales et politiques. Il s'agit d'une problématique complexe qui fait l'objet de peu de travaux académiques dans le contexte de l'économie Algérienne. Nous avons longuement exposé les fondements théoriques des politiques salariales dans un livre que nous avons publié chez l'OPU en 2013. Nous avons pu constater que nombreux étaient les facteurs déterminent le niveau de salaire dans un pays à un moment donné. Certains de ces facteurs sont objectifs et quantifiables, comme le coût de la vie, le niveau général des prix, le niveau général des salaires, la capacité de payement des entreprises, la classifications des emplois, la part du revenu prélevé par le fisc, la situation économique générale (déficit budgétaire) , d'autres facteurs plus spécifiques comme le niveau de vie recherché par les travailleurs, ou encore le pouvoir de négociation des travailleurs organisés en syndicats ou en association. Dans la plupart des pays, l'Etat fixe non seulement les salaires de la fonction publique mais il détermine de plus le salaire minimum interprofessionnel garantie (SMIG) qui assure à tout salarié travaillant à temps complet une rémunération au moins égale à son montant et prévoit un mécanisme d'indexation sur le prix à la consommation afin que le pouvoir d'achat des salariés les plus modestes ne s'amenuise pas sous l'effet de l'inflation. L'Algérie ne fait certainement pas exception, sauf que l'application de telles dispositions ne semble pas opérante dans la mesure où nombreux sont les problèmes relatifs à l'indexation dont les critères d'appréciation, au-delà des négociations, ne semblent guère être partagés et reconnus par tous les partenaires concernés (Etat, Employeurs et Syndicats) Que faire, toutefois, pour rendre plus efficiente la politique salariale du pays ? Il n'existe certainement pas de système idéal, ni en théorie, ni en pratique , chaque pays tente de répondre à cette problématique en respectant d'abord les principes de base sus mentionnés fondant un optimum consensuel, ou pour une situation donnée, dans une période donnée et des conditions sociales données, il existe un système plus efficace que les autres, même en tenant compte du crédo de toute politique salariale à savoir, tenir compte de l'amélioration réelle du niveau de productivité, des performances de l'économie nationale et de l'évolution du coût de la vie. Il convient comme l'a relevé le CNES, il y a bien longtemps déjà, de s'inscrire résolument dans une perspective de partage des gains de productivité et non de rente pétrolière. Il est en effet suffisamment admis que les hausses de salaire ont un caractère inflationniste dès lors qu'elles excèdent les gains de productivité d'une part ; elles ont tendance à se détruire elles-mêmes par l'effet dépressif qu'elles exercent sur l'emploi d'autre part, car les entreprises, l'économie nationale, ne peuvent supporter indéfiniment une forte divergence entre les progrès de la productivité et ceux des coûts salariaux, à moins de répercuter ces derniers dans leurs prix de vente ; mais alors, c'est le «retour à la case de départ», en sachant que ce sont les titulaires de revenus fixes (les plus pauvres notamment) qui souffrent le plus du phénomène inflationniste. C'est dire combien il est important de s'interroger sur la relation prix ? salaires-productivité d'une part, de s'interroger surtout sur la manière la plus saine et la plus efficiente de préparer, dans les faits, l'instauration d'une telle relation afin d'assurer une croissance et un développement durables. Il faudrait pour cela rompre avec la relation de forte dépendance du pays vis-à-vis des hydrocarbures, diversifier son économie, renforcer les structures productives, d'autant plus qu'il est possible de produire de nombreux biens importés actuellement et qu'il existe des capacités réelles permettant d'exporter plus de biens. Or avec les nouvelles orientations prises par le gouvenement, augmentation du pouvoir d'achat et recours à l'importation pour stabilisrr les prix, on est loin de ce schémas et à terme plus ou moins rapproché on reviendra à la case départ avec sans doute plus de difficulés car les marges de manoeuvrent s'amenuisent de plus en plus (déficit budgétaire abyssal, et réduction drastiques des réserves de change) L'économie a ses lois, meme si on affirme souvent que les connaissances se renouvellent de plus en plus vite (tous les 5ans ?) Cela ne change rien a certains mécanismes économiques depuis lontemps dévoilés ... Si on augmente le pouvoir d'achat d'un coté (ce qui est légitime) il faudrait par ailleurs avoir prévu ou pouvoir réaliser une augmmentation des biens et services produits localement, fortement demandés par les ménages, sinon, c'est par l'importation que se réalisera l'équilibre (comme cela a été décidé ) et on n'est pas «sorti de l'auberge» car non seulement il faut financer ce suplus de monnaie injecté par voie d'augmentation des salaire en monnaie nationale (emprunts ou carrement création de monnaie, ce qui est cause d'inflation avec son cortege de conséquences nocives qui reposera le probleme d'augmentation salariale de manière récurrente ) mais aussi l'importation de biens et services (financement en devise, ce qui ne fera que rogner sur le déjà maigre solde en devise du pays). Comme l'a souligné un observateur attentif de l'économie nationale, « Le seul moyen de remédier à ces hausses étant non pas d'augmenter la masse monétaire qui cassera la valeur du dinar en continuant à importer mais en soutenant l'effort de production locale et non le pouvoir d'achat orienté vers les ports.» L'autosuffisance qui est devenu un slogant tellement galvaudé est le seul moyen de mettre le pays à l'abri de la fluctuation des prix et de la pénurie subite des produits de première nécessité comme l'affirment les plus hautes authorités de l'Etat. Mais à ce jour, avec tous les ministres qui se sont succédé au Ministere de l'agriculture et du commerce, aucune stratégie rationnellement concertée n'a été edictée pour enclencher ce fameux cercle vertueux qui verra le pays d'année en année réduire les importations et augmenter les exportations Nous ne pouvons mieux conclure cette modeste contribution qu'en reprenant les propos du Premier Ministre Aïmene Benabderrahmane : « »la solution radiale» aux problématiques du pouvoir d'achat et de l'inflation se trouve dans la relance économique et le soutien à la croissance». Mais dans ce cas, la relance par la consommation en recourant aux importations pour satisfaire la demande domestique est loin de repondre à cet objectif qui ne peut trouver de solution qu'avec une relance par l'investissement. *Dr Economiste |
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