D'aucuns
ont eu le toupet d'imputer l'inqualifiable crime commis contre le martyr de
Miliana à l'échec consommé de l'Ecole algérienne ! S'il est vrai que l'école
publique algérienne est pour beaucoup dans les tares et avatars qui minent
notre société déboussolée, pour feu Mohamed Dib, lui, toute l'Algérie est un «
cas psychiatrique » ! Véritable chantier herculéen ouvert depuis toujours, mais
jamais fermé, la place de l'école dans le projet de société (toujours en
gestation) est et sera encore et toujours le problème number
one du pays. D'une vérité tragique, retour sur l'histoire de H'mida, victime collatérale de l'école « fawda-mentale » ! Pas de quoi faire peur à un pays qui a
voulu rattraper le temps perdu en partant, la poitrine aux quatre vents, à la
chasse à la licorne avec pour seul bagage un cerf-volant « crevé ». Un peu
comme cet athlète tricheur qui, en voulant commencer la course trop vite et
avant les autres, termine très loin derrière la ligne rouge. H'mida a tout juste l'âge de l'acné et il vient juste de
décrocher son bachot avec mention « rabais ». Sollicité par son paternel (peu
ou prou alphabétisé), H'mida a un mal fou à remplir
un banal formulaire de demande de visa. Assommé par une telle «hérésie», le
père, qui, toute sa vie durant, vida sa tête et ses poches en voulant remplir
celle de son fils indigne, réclame sans délai une authentification de la
supposée attestation de réussite attribuée à son cancre de rejeton. Tout juste
moyen en arabe, un peu moins bon en français, peut mieux faire en maths, faible
en histoire-géo, sait écrire mais à peine lire, le garçon paraît bien disposer
d'une tête un tantinet « pleine», faute d'une citrouille bien faite, se
catastrophe son géniteur qui regrette net d'avoir laissé le stylo prendre le
large, sans jamais avoir réussi à le rattraper. Mais pourquoi H'mida est comme ce maître-nageur qui dispose bien d'un
diplôme en natation mais sans jamais avoir trempé dans une bassine d'eau de
toute sa triste vie? Depuis le retour du soleil de la
liberté sur le pays et jusqu'aux générations « lobotomisées » de Benbouzid, l'Algérie consommait le quart de son budget dans
l'éducation et la formation pour se retrouver avec des millions d'analphabètes
sur les bras, plus d'un demi-siècle plus tard. Sauf qu'avec l'inquiétante
dévalorisation du « bachot au rabais», la situation apparaît comme une
véritable bombe à retardement, quand on sait les déperditions très importantes
enregistrées, dès la première année universitaire. Malade de ses «réformes
cobayes», l'Ecole algérienne et le système de formation et d'enseignement en
général n'apprennent quasiment plus rien à de vrais-faux récipiendaires devenus
de bien médiocres impétrants. Elle-même victime des luttes idéologiques et politiques
depuis l'ère de l'indépendance, l'Ecole algérienne se retrouve aujourd'hui
comme la première usine des recalés de la vie. Si de nombreux Algériens ont
depuis longtemps fait le choix « cornélien » entre le cartable et le pain, des
générations entières se retrouvent, aujourd'hui, sacrifiées pour avoir certes
fréquenté l'école, mais pas celle qui vous apprend à devenir un homme et de
trouver sa place dans un monde où le non instruit ne doit pas avoir sa place
dans un enclos. L'onde de choc de l'enseignement au rabais pratiqué depuis
longtemps en Algérie se fait déjà ressentir avec la non-reconnaissance des «
papiers» délivrés par les universités algériennes, y compris dans des pays qui
ont commencé l'interminable course vers le monde « clos » du Savoir et de la
connaissance bien après nous. La mission régalienne d'éduquer un peuple et lui
donner les moyens de faire face à un monde impitoyable pour les « sans-lettres
» est l'un des premiers éléments constitutifs de la souveraineté d'un pays
digne de ce nom. Au fait, qui a dit que, élevé à la rude école du malheur, il y
remportait tous les prix... ?