|
Envoyer à un ami |
Version à imprimer |
Version en PDF
Dans
de nombreux pays, le débat alimente la polémique entre les partisans et les
détracteurs de la consommation de l'alcool. Pour les premiers, souvent inféodés
au lobby des alcooliers, seul l'abus d'alcool provoquerait des maladies liées à
la consommation des spiritueux. Pour les spirituels abstinents, au contraire,
toute consommation d'alcool génère des maladies.
Chiffres à l'appui, chaque camp campe sur son intransigeante position. Aucune des parties ne veut mettre respectivement de l'eau dans son vin ou du vin dans son eau pour dégriser le débat trop enivré par les multiples titubantes études vacillantes en matière de véracité scientifique. Pour les défenseurs d'alcool, ou alcooliques « défoncés », devrait-on les nommer tant leurs soûlants arguments déversés sans modération ne tiennent pas debout, l'alcool n'est nullement responsable des différentes maladies associées pourtant ordinairement à la consommation des divers et variés spiritueux vendus par les tenanciers de bars et autres marchands de liqueurs. Pour les médecins et addictologues, au contraire, les études sont indiscutables : l'alcool constitue un problème de santé publique majeur. A l'appui de leur affirmation, ces scientifiques précisent que « l'alcool est la première cause d'hospitalisation », comme le démontre la récente étude française publiée le 4 juin 2021par l'Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale). Pour ces détracteurs de l'alcool, toute consommation d'alcool comporte un risque grave de santé, un danger sanitaire. Lucidement, ces partisans de l'abstinence de l'eau-de-vie, démontrent sobrement que la consommation d'un verre d'alcool par jour augmente le risque de pathologies et le risque de surmortalité. « Toute consommation d'alcool»même faible « a un effet délétère pour la santé »,souligne cette dernière étude del'Inserm. « Il n'existe pas de seuil en dessous duquel l'alcool est sans risque pour la santé », insistentles experts de l'Inserm. Selon ce rapport, les niveaux de consommation demeurent élevés, en particulier chez les jeunes. La France dénombre « 41 000 morts par an (dont 11 000 femmes) pour un coût social estimé à 118 milliards d'euros », note l'équipe de chercheurs français, dans cette étude composée de 700 pages, assortie de recommandations. Parmi les préconisations, les experts recommandent l'interdiction de la publicité sur internet et dans l'espace public, l'augmentation du prix (en taxant les boissons au gramme d'alcool ou avec un prix minimum comme en Ecosse). De surcroît, ils soulignent aussi les méfaits de l'alcoolisme passif (sur l'entourage et les enfants). Ils insistent sur les dramatiques effets collatéraux de l'alcoolisme : violences conjugales, viols, accidents de la route. Sans oublier les syndromes d'alcoolisation fœtale, consommation d'alcool en période de grossesse, première cause de retard mental évitable. Ces partisans de l'abstinence alcoolique se défendent de se placer sur un terrain moral. Ils s'expriment en qualité de scientifiques et non pas de moralistes. Seule compte la santé de la population. Pour ces adeptes de l'abstinence, la dangerosité et la nocivité de l'alcool sont évidentes. Pour preuve : près de 3 millions de personnes décèdent chaque année dans le monde pour cause d'alcoolisme (ainsi l'alcoolisme provoque autant de morts qu'une grippe saisonnière ou le nouveau Covid-19. Pourtant, ironie de l'histoire, aucune mesure de fermeture des lieux de consommation et de vente d'alcool n'a été décrétée pour enrayer cette hécatombe éthylique, ni également aucune mesure de confinement généralisé flanquée de la cessation de l'activité économique commerciale et industrielle n'a été instaurée pour empêcher le virus de l'alcoolisme de se propager). Force est de constater que l'alcoolisme provoque autant de décès que la grippe saisonnière et le coronavirus. Pour autant, aucune mesure de confinement pour cause de mise en danger de la santé n'a jamais été décrétée pour dégriser la société de l'alcoolisme délétère. Une chose est sûre : chercheurs et cliniciens l'affirment : « L'alcool est une drogue, une molécule cancérigène et toxique pour de nombreux organes dont la toxicité est relayée en partie par son métabolite, l'acétaldéhyde. Sa consommation est responsable directement ou indirectement d'une soixantaine de maladies. Son coût social, estimé à 118 milliards d'euros, se compose principalement de coûts liés à la mortalité (66 milliards d'euros) et à la morbidité (39 milliards d'euros) attribuables. L'alcool ne rapporte rien à l'État, il ampute les finances publiques », soulignent les auteurs. Quoi qu'il en soit, cette dernière étude vient conforter les recommandations de ces médecins imbibés de modération scientifique. En effet, cette récente étude démontre qu'un seul verre de vin quotidien a des effets nocifs sur la santé. Pour ces scientifiques, seul le «zéro alcool» prémunit totalement des risques de décès prématuré, des multiples pathologies, notamment les maladies cardiovasculaires et le cancer. Selon cette étude la consommation d'un seul verre par jour durant une année augmentede 0,5% le risque de développer des problèmes de santé liés à l'alcool (cancer, maladie cardiovasculaire, AVC, cirrhose, violences...), par rapport aux abstinents. Nul doute, la consommation d'alcool est responsable directement ou indirectement d'une soixantaine de maladies, dont des cancers comme le cancer du sein et des maladies cardiovasculaires. Elle est également la première cause d'hospitalisation et la deuxième cause de mortalité évitable en France (après le tabac), rappellent les experts (ce constat s'applique à nombre de pays confrontés à une consommation d'alcool élevée). Selon cette étude, la consommation régulière (10 fois ou plus dans le mois) concerne un jeune sur dix en classe de seconde et un jeune sur quatre en terminale. Les seniors (plus de 50 ans) sont également concernés : depuis une dizaine d'années, leur niveau de consommation d'alcool ne cesse d'augmenter, illustrée notamment par les épisodes d'« alcoolisation ponctuelle importante » (la beuverie express ou « bingedrinking ») et la consommation à risque d'alcool (plus de deux verres quotidiens). À cet égard, le rapport de l'Inserm tord le cou au mythe des vertus médicinales liées à la consommation d'alcool, mythe répandu par les lobbies des alcooliers. « Il faut arrêter de dire que c'est bon pour le cœur », indique à propos du vin rouge un deschercheursde l'Inserm.Seul le « zéro alcool » prémunit contre le risque de maladies, ajoute-il. Une précédente étude, menée dans 195 pays entre 1990 et 2016, publiéele 23 août 2018 par la revue médicale The Lancet sur les niveaux de consommation de l'alcool, avait tiréégalement la sonnette d'alarme quant aux risques sur la santé. «Les risques pour la santé associés à l'alcool sont énormes», précisait déjà l'étude. Elle notait que l'alcool se place au 7e rang du classement des facteurs de risque de décès prématuré et d'invalidité dans le monde. Globalement, il ressortait de cette précédente étude que la consommation d'alcool varie selon les pays. Pour la population masculine, placés en haut du classement des grands consommateurs d'alcool, viennent en tête les Roumains (8,2 verres par jour), talonnés par les Portugais et les Luxembourgeois (7,3 verres par jour). En ce qui concerne la population féminine, en tête du peloton des alcooliques figurent les Ukrainiennes (4,2 verres par jour), suivies des Luxembourgeoises (3,4 verres par jour). En France, la consommation est en moyenne de l'ordre de 4,9 verres par jour chez les hommes et de 2,9 chez les femmes. Pour l'Algérie, la publication ne mentionnait pas les chiffres de la consommation d'alcool. Pourtant, il serait intéressant de connaître la consommation « officielle » d'alcool des Algériens pour mesurer l'impact sur leur santé. Néanmoins, à sillonner certaines régions de l'Algérie, on peut se forger une idée de la consommation immodérée de l'alcool par la surabondance de canettes et bouteilles de bière jonchant les bordures de routes. Cette invasion de canettes et de bouteilles d'alcool nous renseigne sur l'alcoolisme manifeste de nombreux Algériens, et surtout sur leur absence de civisme illustré par l'abandon de leurs fioles d'alcool sur les routes, dénaturant par conséquent les paysages féeriques de ces régions algériennes, polluant les espaces naturels de ces contrées jusqu'à présentdemeurées immaculées. Enfin, l'étude avaitrévélé que le monde compte 2,4 milliards de buveurs d'alcool, dont 63% sont des hommes. D'autre part, 3 millions de personnes meurent par noyade alcoolique. Que pourrait-on leur conseiller, sinon d'apprendre à nager dans l'abstinence pour éviter de boire la tasse, de plonger dans le tourbillon de l'alcoolisme. Qu'à défaut de se désaltérer, pour apaiser leurs tourments, à coups de spiritueux, ils feraient mieux d'étancher leur affres en s'abreuvant de vie spirituelle. Spiritualité qu'il convient de dissocier de la religiosité. Car la religion, absorbée à forte dose, est une forme d'enivrement théologique où l'esprit sombre dans le coma de la rationalité, autrement dit dans une forme sévère d'altération des facultés intellectuelles. Dans certains pays griséspar le fanatisme, la religion n'est pas synonyme de spiritualité, loin s'en faut, ni de modération comportementale, ni de sobriété éducationnelle, ni d'exemplarité morale. En effet, dans sa forme radicale, consommée sans modération et imposée sans pondération, la religion peut nuire gravement à la santé mentale, voire peut altérer irrémédiablement les facultés intellectuelles, plongées sans rémission dansun coma réflexif et éthique. « To be, or not to be » favorable à la consommation de l'alcool? Telle est la question. Eau-de-vie ou ode à la vie ?Cahotant dilemme de l'existence chaotique. Qu'importe la façon de mener sa destinée, pourvu qu'on ait l'ivresse de la vie, et non pas la vieengloutie par l'ivresse ! « L'alcool ne prolonge pas le rêve, il s'empresse de le chasser dès qu'il va l'atteindre.» Alain Grandbois |
|