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Le Tribunal de Sidi M'hamed
(Cour d'Alger) a condamné, jeudi, l'universitaire Saïd Djabelkhir,
poursuivi pour offense à l'Islam, à 3 ans de prison ferme, sans placement sous
mandat de dépôt, assortie d'une amende de 50.000 DA. Pour rappel, le procès
s'est déroulé le 1er avril dernier, suite à une plainte déposée contre Saïd Djabelkhir par un enseignant universitaire spécialiste en
sécurité électronique à l'Université de Sidi Bel-Abbès.
Au cours du procès, le procureur de la République près le Tribunal de Sidi M'hamed avait requis l'application de la loi contre Saïd Djabelkhir. Répondant aux questions de la juge, l'accusé qui est un spécialiste en jurisprudence de la Chariâ islamique, avait déclaré que ses publications sur Facebook ne constituaient pas une offense à l'Islam. Il s'agit, a-t-il soutenu, de commentaires qui reposent sur des recherches qu'il avait faites sur les livres de la tradition prophétique (Sunna) et de la Chariâ. «Il est inconcevable qu'un spécialiste de la Chariâ offense la religion musulmane», a-t-il ajouté, soulignant que «ses écrits s'inscrivent dans l'ordre de la jurisprudence, sans plus». Le jour même du verdict, Saïd Djabelkhir a annoncé sur compte Facebook que ses avocats allaient faire appel au verdict. «Nous ferons appel de cette décision avec le collectif de défense devant la Cour d'Alger, en défense de la liberté d'opinion et d'expression garanties par la Constitution», a-t-il déclaré. L'universitaire a également adressé ses «sincères remerciements à tous les amis qui me soutiennent et se montrent solidaires avec moi de l'intérieur et de l'extérieur de l'Algérie, par tous les moyens et méthodes légitimes». Djabelkhir a également partagé la réaction de l'islamologue Ghaleb Bencheikh, président de la Fondation de l'Islam de France, sur cette affaire. «Ma position a toujours été on ne peut plus claire. Ce qui se passe est un scandale. On ne peut pas criminaliser le débat d'idées. C'est une atteinte grave à la liberté de conscience et la recherche académique. Cette affaire dénote un archaïsme de la pensée que je dénonce», écrit Ghaleb Bencheikh qui exprime également son «soutien à Said Djabelkhir». «Ce qui lui arrive est tout simplement inacceptable. La liberté de conscience est bafouée et le débat d'idées est judiciarise. Tout cela relève de l'archaïsme. J'espère vivement qu'on reviendra à la raison lors du procès en appel. Il faut que la justice algérienne soit digne. On s'est assez donné en spectacle comme cela», ajoute le président de la Fondation de l'Islam de France. Cité par l'AFP, Moumen Chadi, un des avocats de Djabelkhir, s'est dit «choqué» par le verdict. «Il n'y a aucune preuve, le dossier est vide. Nous nous attendions à une relaxe», a ajouté Me Chadi, qui a dénoncé un vice de forme, a-t-il ajouté. Par ailleurs, dans un communiqué sur cette affaire, la LADDH (aile de Me Zehouane), signé par son vice-président Said Salhi, condamne la «dérive de trop». «La LADDH tout en exprimant sa pleine solidarité avec l'islamologue, réitère sa demande de respect des libertés de recherche académique, d'expression et d'opinion, elle rappelle au gouvernement le respect de ses obligations contenues dans les conventions internationales ratifiées par l'Algérie dont le pacte international des droits civils et politiques», lit-on dans le communiqué rendu public quelques heures après la prononciation du verdict. La LADDH affirme refuser «à ce que les salles des tribunaux se substituent aux amphithéâtres des universités, à ce que les tribunaux se transforment en tribunaux d'inquisition» et «dénonce la criminalisation des idées, du débat et de la recherche académique pourtant garanties par la Constitution». |
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