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« Il faut démystifier le
concept parce que certains pensent que l'économie de la connaissance se résume
à la création de startups ou une digitalisation tous azimuts », souligne le
professeur Abdelkader Djeflat.
Invité par le ministère délégué à l'Economie de la connaissance et aux startups aux assises nationales du 29 et 30 mars dernier, pour, a-t-il dit, «présenter et expliquer aux 1.300 participants et aux membres du gouvernement ce nouveau paradigme de l'économie de la connaissance (...), le prof Djeflat a donné un cours magistral sous le titre «L'Economie de la connaissance en Algérie : gérer les transversalités». Il a répondu aux questions «comment le concept est né en Algérie, où en est l'Algérie et quelle stratégie le gouvernement pourrait suivre pour entrer dans l'économie de la connaissance». Professeur d'économie, fondateur de la première unité de recherche en Algérie sur les questions de transfert de technologie affiliée au CREAD (Centre de recherche en économie appliquée), actuellement enseignant universitaire à Lille (France) après l'avoir été à l'université d'Oran où il a enseigné l'économie et le management pendant plus de 20 ans, Djeflat a tracé une véritable feuille de route pour le gouvernement en vue de lui permettre d'engager l'Algérie dans un processus de construction, explique-t-il, «d'une économie où la connaissance devient un véritable facteur de production aussi important que le travail, le capital, et la technologie». C'est aussi, ajoute-t-il, «substituer au modèle existant de croissance qui a montré ses limites un nouveau modèle qui permet très rapidement d'augmenter la compétitivité, la diversification, et une rupture radicale avec la rente». C'est ce qu'il qualifie de «modèle tiré par la recherche, le développement et l'innovation surtout au sein des entreprises pour augmenter leur compétitivité, une transformation digitale rapide et réussie, un système éducatif performant et des universités de rang mondial». Pour cela, affirme-t-il, «l'économie de la connaissance comme nouveau concept en Algérie doit être bien comprise par tous, aussi bien au plus haut niveau de l'Etat que par les opérateurs économiques, tous secteurs confondus, et la société dans son ensemble». L'impératif de lever les confusions Fondateur en 1994 et pilote à l'université de Lille du Master Ingénierie des projets de coopération (IPC) et dirige l'équipe de recherche sur les questions d'innovation et de développement et sur l'économie de la connaissance au sein du Centre lillois d'économie et de sociologie (CLERSE, UMR 8019 CNRS), Djeflat a clairement expliqué au gouvernement comment devrait-il agir pour atteindre l'économie de la connaissance. Son curriculum vitae explique largement la pertinence de ses recommandations. En 94, il a aussi créé le réseau de recherche sur la Science et la Technologie pour le développement des pays du Maghreb, appelé MAGHTECH (Maghreb Technologie) dont il est le coordonnateur scientifique (www.Maghtech.org). Il a également occupé la position de membre du Comité scientifique et ensuite vice-président du réseau mondial Globelics sur les systèmes d'innovation (www.Globelics.org). (...) Il a mené près d'une quarantaine d'études et consultations pour différents organismes internationaux dont (l'Unesco, la Commission économique pour l'Afrique (ONU), la Commission économique pour l'Asie de l'Ouest (ONU), l'Union européenne, la Banque mondiale (WBI), le Programme des Nations unies pour le développement (ONU) et l'ISESCO. Il est actuellement membre du Conseil scientifique consultatif (COMSTECH-SAC) de l'Organisation de la coopération islamique (OCI). Intervenant à partir de Lille en visioconférence, cet expert international a noté que son objectif est «de mettre en lumière les sphères dans lesquelles l'action publique doit être requise pour une insertion réussie de l'Algérie dans l'économie de la connaissance». Il recommande alors «un éventail d'actions qui relèvent de l'urgence immédiate et d'autres à portée plus stratégique». Il a prévenu d'emblée le gouvernement qu'il est impératif d'éviter «de confondre ce nouveau modèle avec la démultiplication des startups ou bien une digitalisation à outrance, ce que, de toute évidence, l'économie de la connaissance n'est pas». Il estime que «comprendre ce qu'est la connaissance et en harmoniser le langage devient vital». Cela nécessite, selon lui, «le passage par les notions de base comme les connaissances tacites que tout le monde possède (fruit de l'expérience) que l'on soit cadre dans une grande entreprise ou paysan dans une zone rurale». Les exigences de l'économie de la connaissance En second lieu et d'une manière succincte, enchaîne-t-il, «il faut présenter les instruments utilisés pour mesurer cette économie». Ces exigences, Djeflat les justifient en rappelant «la position défavorable de l'Algérie (96ème en 2012 en utilisant l'indice de l'économie de la connaissance (KEI) de la Banque mondiale et 104ème sur 139 pays en 2020 en utilisant l'indice global de la connaissance (GKI) développé par le PNUD». Une mauvaise place qui lui fait dire que «deux piliers, en particulier posent problème : l'écosystème défavorable qui tire vers le bas (1er indice) et l'innovation (second indice) qui nécessitent des actions immédiates et urgentes». Pour corriger ces faiblesses, «nous avons utilisé la notion de «transversalité», l'économie de la connaissance étant une question transversale par excellence, à tous les secteurs parce que la connaissance est accumulée, utilisée et stockée dans toutes les activités et détenue par tout individu», a-t-il fait savoir. Il énumère «quatre types d'action que le gouvernement doit envisager». Il indique que «le premier concerne à la fois la codification massive de toutes ces connaissances qui risquent de se perdre, leur capitalisation, d'une part, et, d'autre part, mobiliser tous les gisements de connaissance pour les besoins de la croissance et du développement». Mais avoue-t-il, «ce n'est pas évident parce qu'il faut pour cela des politiques appropriées et surtout mettre tous les acteurs de la société en confiance». En deuxième lieu, c'est réussir, renseigne-t-il, «la transversalité inter-piliers parce que pour la mise en place d'une économie de la connaissance compétitive et diversifiée, les quatre piliers doivent agir de concert et doivent être constamment interconnectés: la recherche et l'innovation, le système éducatif et de formation (inclue la formation professionnelle), les infrastructures de communication (TIC) et des mécanismes d'incitation et un climat propice (l'écosystème)». Il conseille : «L'action publique devra veiller ici à ce que tous les piliers fonctionnent sans entraves (casser les verrous) et en particulier celui du régime institutionnel et incitatif, c'est-à-dire l'écosystème, et d'autre part, approfondir et accélérer les interactions entre les piliers». Les détails d'une feuille de route pour le gouvernement Au titre du 3ème type d'actions, Djeflat note que «l'économie de la connaissance est également transversale à tous les secteurs agissant dans la logique de développement durable qu'on appelle post-carbone (Energies renouvelables, économie verte, économie bleue, économie créative, etc. ), qui ont besoin d'écosystèmes spécifiques». L'action publique devra, dit-il, «faciliter l'approfondissement des échanges et la mise en place de ces écosystèmes spécifiques où la connaissance est échangée en plus des valeurs véhiculées de respect de la planète et de l'environnement». Enfin, la quatrième transversalité, elle est verticale et sort de l'économique pour s'inscrire dans le champ du sociopolitique», recommande-t-il. En effet, «l'économie de la connaissance, c'est aussi une question qui est transversale à toutes les franges de la société et toutes les catégories socioprofessionnelles nécessitant aussi bien du top down que du Botton up», dit-il. Elle nécessite par conséquent, fait-il savoir, «des modes de gouvernance particuliers où la base participe autant que le sommet à l'avènement de l'économie de la connaissance dans le pays. Djeflat a tenu à rappeler que «la première Conférence nationale de l'économie de la connaissance a eu lieu en 2006 au cours de laquelle a été lancé le premier ouvrage sur l'économie de la connaissance («L'Economie fondée sur la connaissance : état des lieux et perspectives pour l'Algérie, Dar El Adib 2006). C'est de là, a-t-il souligné, «qu'est née l'idée portée par le Dr Rachid Bénaïssa d'appliquer systématiquement le modèle de l'économie de la connaissance au secteur agricole et rural, notamment la politique du renouveau agricole et rural». Il estime que «l'action publique qui a été appliquée à partir de 2008 représente un véritable cas d'école de la mise en œuvre de l'économie de la connaissance et une illustration de la transversalité verticale et sa réussite». Sa conclusion: «ces quatre transversalités doivent être gérées simultanément, en parallèle, prendre en charge la dimension stratégique, car, comme le montrent tous les cas de réussite dans le monde, elle nécessite l'élaboration d'une «vision» à long terme (entre dix à vingt années (cas malaisien par exemple) et insuffler un nouvel «état d'esprit» surtout à une population jeune, baignant dans le digital, ouverte sur le monde (...)». |
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