Sous le ciel de l'Algérie nouvelle, l'on continue, encore
et toujours, à s'interroger s'il faut continuer à se nourrir pour vivre ou
simplement vivre pour boustifailler en circuit fermé, la bouche béante, en
attendant le dernier voyage de la vie éphémère vers le monde immortel du
trépas. Parce qu'à regarder de près l'avancée triomphante de l'almanach algéro-algérien, il y a au moins une bonne raison de penser
à recréer le monde sans nous. Partie des aurores novembristes,
l'Algérie s'est payée un gros repos mérité par un étincelant soleil de juillet
jusqu'à l'arrivée des premières secousses, chargeant le ciel, faussement
serein, de gros cumulus menaçant de nous mouiller... jusqu'à l'os. Un pied par
terre et le dos au mur, le pays de l'Emir Abdelkader s'imposa un arrêt
d'urgence forcé, jusqu'à ce que des mains invisibles le conduisent dans le
gigantesque atelier de tous les rafistolages. Arriva le jour où le pays se
fatigua et aménagea son emploi du temps à sa guise, faisant de son
semi-week-end, de ses nombreuses fêtes nationales, des jours fériés puis des
jours sans, la sève (sur) vitale d'un calendrier sans temps ni âge. Et parce
que justement il est connu et reconnu que l'âge opère des ravages là où le
temps demeure indécis, l'Algérie s'est retrouvée à se reposer six mois par an,
prendre congé en triple détente trois mois par an, faire la fête en petit,
moyen et grand format quatre semaines par mois, et travailler une demi-journée
tous les deux lustres, pour boucler la boucle avec un demi-congé national
jusqu'à la fin du mois de carême. Au point que sur la tombe de chaque Algérien
fatigué de vivre, une main à sept doigts fera graver en lettre dorées : « Ici
repose Larbi Ben Untel qui s'est reposé toute sa vie...».