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Huile de table: La polémique enfle

par Abdelkrim Zerzouri

Cette affaire d'obstacles qui mettent à mal l'approvisionnement des commerces en huile de table et éreinte, au bout de la chaîne, le consommateur, prend une ampleur inédite, à la veille d'un mois de pic de la demande par les ménages et certaines activités qui prospèrent en cette période, en l'occurrence au mois sacré du Ramadhan. Des explications fournies par les parties autour de la perturbation dans l'approvisionnement du marché en huile de table, on est vite passé aux accusations qui fusent de toutes parts, et qui montrent que l'environnement est très malsain. Les premiers ciblés dans ce cercle intime des commerçants sont les détaillants, accusés par le président de la Fédération nationale de l'Agroalimentaire (FNA), affiliée à la Confédération algérienne du Patronat (CAP), Khaled Belbel, d'être à l'origine de la perturbation dans l'approvisionnement en huile de table, constatée sur le marché national durant les dernières semaines. Selon le même responsable, les commerçants au détail qui refusent de se faire facturer leurs achats auprès des grossistes et des producteurs, et ont de ce fait, cessé la commercialisation de ce produit devant l'exigence de l'établissement des factures, ont causé cette pénurie des huiles de table sur le marché ». Tout en continuant à servir l'huile de table sous la table pour quelques rares clients, au prix fort. Mais, contrairement à ce qu'il avance, les concernés ne s'en cachent pas et dénoncent la très faible marge bénéficiaire qu'ils tirent de la vente de ce produit, à peine 10 dinars, préférant ne plus en faire commande auprès des grossistes ou des producteurs, pour éviter la facturation des achats, et limitent leur approvisionnement à quelques bidons, faciles à gérer et à écouler, sur commande, au prix qui leur convient. Selon M. Belbel, donc, la raison « réelle » de cette perturbation est due au « refus » de ces commerçants d'appliquer les directives des services du ministère du Commerce instaurant « l'obligation » de facturation sur toutes les transactions réalisées, par tous les acteurs du marché, « à tous les niveaux ». Ce système de facturation est considéré « pénalisant » par les commerçants au détail vu que les transactions facturées sont « imposables », a précisé M. Belbel qui a ajouté que les détaillants estiment que leur marge bénéficiaire est « négligeable » s'ils achètent avec des factures les huiles dont le prix est plafonné par l'Etat.

Des stocks largement suffisants

M. Belbel a révélé que les agents de la direction du Commerce et des prix (DCP) « ont effectué, dernièrement, des visites d'inspection » pour s'enquérir de l'état des stocks des producteurs et autres grossistes et ont constaté, selon lui, que « les niveaux des stocks, en 2021, ont augmenté » par rapport à l'année écoulée. Il a donné l'exemple d'un des producteurs principaux des huiles de table, en Algérie, dont la production a « triplé » comparée à l'année précédente. Le responsable a déploré que « cette réticence à la facturation perdure depuis plusieurs années » tout en déclarant qu'il était difficile de « changer les mentalités » et cela demanderait du temps pour pouvoir « instaurer de nouvelles règles » qui ne pénaliseraient pas le consommateur final. Les producteurs, pour leur part, confirment ce qui a été avancé par le président de la Fédération nationale de l'agroalimentaire (FNA), soutenant qu'il n'y a aucune pénurie et que les stocks peuvent satisfaire la demande de plusieurs semaines. Pour eux, la perturbation dans l'approvisionnement en huile de table incombe aux grossistes qui refusent, également, de traiter avec la facturation. Alors que les grossistes accusent les producteurs de ne leur laisser qu'une faible marge bénéficiaire, après avoir augmenté unilatéralement les prix à la suite de la hausse des prix des matières premières sur le marché international, chose qui ne leur permet pas de faire tourner leurs affaires. Selon les distributeurs/grossistes, les producteurs ont augmenté les prix d'huile de table à un niveau qui ne leur laisse qu'une faible marge bénéficiaire de 20 dinars, à se partager avec les détaillants, pour ne pas aller au-delà du prix plafonné par l'Etat (600 dinars pour le bidon de 5 litres d'huile). Un cercle vicieux dans lequel se perd le consommateur. L'intervention du ministère du Commerce est indispensable pour trouver une solution urgente à ce problème, qui ouvre la voie à la spéculation.